Le premier recueil de poèmes du Docteur Abdo Hanifa est un cri à triples dimensions, publié en cette année 2020 par les Éditions du Soleil Levant. Il ne s’agit pas d’un cri sonore poussé à pleine poitrine, mais celui modulé par une poésie raffinée, une profonde réflexion, un style et un rythme d’une grande élégance. La construction géométrique des vers combinée à l’acrobatie émotionnelle du poète emmène le lecteur dans le dédale des cris. C’est pour cela que ce cri multiforme, je le compare à un cri de ralliement qu’en Afar on appelle DEERO. À ce Deero tout le monde doit répondre (éveil de conscience collective).Il y a une obligation sociale, qui dénote la solidarité, l’entraide et l’hospitalité. Comme RACHID HACHI le dit dans sa préface, je remarque moi aussi qu’il y a trois grandes formes de cris que pousse Abdo Hanifa, l’homme des montagnes de Mabla.

1 – Le  KAAY de la contestation sociale :

C’est une demande de prise de conscience qui fait appel au cœur et à la raison de chacun et chacune d’entre nous. Il y a des poèmes acerbes et sulfureux, des voix qui notent la lassitude et d’autres voix qui empruntent l’humour (L’administration) et la dérision (Les gladiateurs de Bunaamoyta).Bunamoyta : c’est une poussée de paroles fiévreuses, des duels verbaux sanspasserà l’action qui font partie de nos racines sociales et culturelles. Ce sont des cris contre les SOURNOIS, des FLAGORNEURS, plus globalement ceux qui prennent sans effort autre que la parole du CONTRÔLE SOCIAL DES INDIVIDUS.

2- Un KAAY au féminin avec

5 poèmes écrits dans un style épuré : vibrant hommage à la femme :

a. Femmes P.47

b. Femmes rebelles P 51

c. À celle qui porte le monde P. 53

d. Le sang des vierges P.55

e. Femme affranchie P.58

Ce sont des poèmes d’une grande sensibilité. Le rythme est musical, alerte et accéléré. Il ressemble à un tambour qui fait résonner la voix du poète. Il y a des refrains, qui scandent les mots comme un chant non de désespoir, mais de lutte et d’espoir des femmes nouvelles engagées dans le combat pour retrouver l’usage et la jouissance de leurs droits.

2- Le KAAY de ralliement :

C’est l’optimisme qui guide le poète, il veut être utile avec une conception de l’écriture comme un pansement, un baume sur les blessures. C’est aussi l’ouverture sur le monde, un appel aux plus proches, avec lesquels il partage, il s’instruit et grandit. Là ce sont des poèmes d’affection : (Lettre à ma mère, Lettre à mon père, Merci Momo, Lettre à mes enfants, etc.). Il y a l’amour cet autre KAAY qui commence par l’amour filial, l’amour fraternel, et l’AMOUR tout court : FOU DE LOULI, ou encore la Lettre à Momo où le poète célèbre son amour intarissable pour sa femme qui a fait de lui « papa » et ceci est fort « honorable ». L’homme desMabla, l’homme des rivages, l’homme des plaines,l’homme de la ville qui laisse transparaitre dans son écriture à plusieursKAAY (à plusieurs dimensions) un espoir immense de transformer notreregard, nos voix et notre façon de voir le monde. Il partage l’amour de l’Humanité, la préservation absolue de la Planète bleue. Dans ce recueil,on voit l’auteur très engagé pour le droit de la femme.

Je voudrais conclure en disant que c’est un recueil superbe qui mérited’être placé parmi les plus grandes lectures des amoureux de la poésie.

BRAVO ABDO HANIFA.

TOUTES MES FÉLICITATIONS.

Docteur Chehem Watta

Auteur-poète

Réactions des participants :

Dans la soirée du 14 novembre 2020, le Café littéraire Gafaneh a organisé une soirée de poésie en collaboration avec l’Institut Français de Djibouti dans la salle de spectacle à 19heures. La soirée fut animée par des écrivains du Café à savoir Souhaib Ali et Moussa Kako. L’invité de marque était le Dr. Abdoulkader Aboubaker Hanifa. Une soirée riche en couleurs qui a fasciné tous les amis de lettres.

Après une critique littéraire claire et perceptible par l’éminent poète le Dr. ChehemWatta, la parole fut donnée à l’auteur du « Kaay », Dr. Abdo Hanifa qui nous retraça la genèse de son recueil de poèmes et de son goût marqué pour la littérature. Il nous présenta avec passion et dextérité les tenants et les aboutissants de son œuvre.

Une soirée où la littérature orale a révélé toute sa splendeur dans Les Gladiateurs de Bun’amoyta,un poème des plus lus et des plus appréciés qui m’ont donné à moi, leSomalophone, la tentation de m’incruster dans ce débat, qui ne m’était plus totalement étranger, tellement les langues se sont déliées dans un savoureux « pugilats » entredes esprits parfois vifs, d’autresfois indolents et…

Le bun’amoyta fut le poème par excellence suscitant le plus de commentaire parmi le public des amoureux du Kaay.Avec son talent fou et son génie, Dr. Abdo Hanifa, a révélé tout son humour et sa poésie.

Après la lecture du poème Fou de Louli,un amour de son jeune âge, soulevé par ChehemWatta, il se rend compte de la présence de sa fille et de sa femme dans la salle. Volte-face et changement de discours. Le poète rattrape le coup et rend hommage à sa femme dans Merci Momo.

Le temps passe, les ans nous

délaissent

L’écoulement du temps est vivace

Mais aujourd’hui comme hier

Même flamme anime mon cœur

Mes feux restent toujours allumés

Vous avez bien fait de « sauver votre peau » cher poète Abdo Hanifa

Fahmi Ahmed Mohamed

Enseignant

La rencontre avec Abdo Hanifa, autour du kaay, son premier recueil fut une réussite qui s’est confirmée dans Les gladiateurs de Bun’amoyta.

Un ouvrage littéraire riche en émotion où l’auteur est en correspondance avec son défunt père. Lettre à mon père. Un poème qui enveloppa la salle dans une grande émotion où les âmes sensibles pouvaient éclater en sanglot. Le Kaay, c’est aussi un « cri » strident envers les hommes à surmonter les revers du Pays mirghan.  Fin orateur maniant la langue de Molière à sa fantaisie, Dr. Abdo Hanifa a répondu sans langue de bois à toutes nos attentes. Le poème Merci Momo en l’honneur de sa femme a coupé le souffle du public qui a réagi dans un tonnerre d’applaudissements.

Mon bout de cœur,

Je te dédie ce poème

Pour te dire combien

Les mots me sont infidèles

Pour te prouver combien

Je suis confus

Tu as fait de moi Papa

Et cela est fort honorable

Je veillerai sur toi Amour

En guise de conclusion, je tiens à féliciter le prodigieuxpoète Abdo Hanifa et lui souhaiter un franc succès pour ses prochaines publications.  Mes hommages ! Cher ami poète.

Harbi Osman Robleh

Enseignant

La rencontre littéraire avec mon ami Abdo Hanifa, lors de la mémorable soirée au café littéraire Gaffaneh, a été un moment d’extrême émotion.

Le poète a joué sur les affects. Tantôt aventurier romanesque par ses poèmes Fou de Louli,Idil mon Adèle et Merci Momo, tantôt évoquant directement la réalité par le poème Bun’amoyta et Administration et enfin se laissant trahir par les sentiments qu’il voue à ses défunts parents par les poèmes épistolaires Lettre à ma mère, lettre à mon père Abdo Hanifa par son talent de génie emporte dans une émotion contagieuse son lecteur.

Tu es parti à tout jamais

Laissant ton binôme seul sous le soleil

Ainsi notre trait d’union s’envolait

Ainsi mon âme s’amenuise dangereusement

Aujourd’hui, je défie seul

Et cette situation me trouble

La vie m’est exécrable

Les gens dédaigneux

Par la lecture de sa lettre à son père, j’ai vu certaines âmes sensibles pousser en tapinois des soupirs. Une soirée littéraire émotionnelle où mon ami Dr. Abdo Hanifa a réussi à rapprocher le Kaay à son public.

Abdo Abdallah

Ingénieur