Nous avons rencontré  le jeune poète Souhaib Ali Youssouf, lors de sa présentation de son premier recueil de poème «Bribe de Stances » à l’IFD. Né en septembre 1997, Souhaib Alí Youssouf commence à écrire tôt. En 2009, il remporte un concours de lettres et de poésie en langue arabe et participe à un forum culturel des pays arabes aux Émirats Arabes Unis. Plus tard en 2012, il achève son premier roman encore inédit à ce jour. En 2015, il décroche son baccalauréat littéraire avec brio et s’oriente vers des études de droit. Il a bien voulu répondre à nos questions.

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire ?

La passion. C’était d’abord comme une écoute esthétique d’une parole secrète en moi, une volonté d’arracher les mots à mes sentiments, ô combien vagues. Je lisais presque tous les jours depuis bien un temps. Et quand on lit, toutes les fois qu’on traverse une petite expérience dans sa vie, on a envie de la transcrire, pas forcément pour publier mais pour sortir de soi-même, se confier aux pages qui sont devenues nos amies.

Sur quoi avez-vous commencé à écrire ?

Un roman autobiographique. C’était en 2011, alors inspiré de « Les Confessions » de J. J. Rousseau. J’avais peaufiné mon roman et je l’ai présenté à mon enseignant qui ne m’a jamais fait part de ses appréciations. En même temps, je griffonnais des textes poétiques et des récits imaginaires à côté.  

Avez-vous déjà eu un journal intime, des carnets où vous releviez des citations, des pensées, etc. ?

Je pense qu’aucun écrivain n’a jamais été sans journal intime, ces premiers brouillons et esquisses. J’avais aussi comme compagnie un répertoire sur lequel je marquais les idées volées des livres ou encore mes passages préférés. 

Faisiez-vous lire ce que vous écriviez ? Si oui, à qui ? Quels étaient les avis que vous récoltiez ? Avez-vous été encouragé ?

Mes enseignants seulement. Certains m’ont beaucoup encouragé, d’autres n’étaient pas très amoureux des livres. Mais j’ai toujours préféré garder mes écrits pour moi jusqu’à leur édition.

Écriviez-vous des choses que vous ne montriez à personne ?

Pour drôle d’anecdote, il y avait une courte période de ma vie où je ne dormais jamais sans écrire quelques lignes sur mes expériences confidentielles sur des feuilles simples. J’ai aussitôt lâché l’idée parce que perdais souvent mes feuilles le lendemain.

Que lisiez-vous quand vous étiez enfant et adolescent(e) ? (Journaux, Coran, littérature, littérature jeunesse, bandes dessinées, etc.) Quels sont les auteurs que vous aimiez ? Et maintenant (évolution possible des goûts) ?

J’ai parcoeurisé le Coran à bas âge. Ça a été un avantage pour le reste de mes lectures que j’ai commencé avec les romans. Ensuite, j’ai beaucoup admiré les recueils de poèmes et les recueils de nouvelles, pour leur simplicité et la profondeur de leurs expressions et images. Et je lisais en trois langues, français, arabe et anglais. Aujourd’hui, je lis sans distinction de genre. Mais je me cultive auprès des essais et des ouvrages non-littéraires. 

Avez-vous essayé d’écrire dans une autre langue ? À quel moment (si plusieurs langues pratiquées ?

Au lycée, j’écrivais de la poésie arabe classique que je partageaisavec ma mère. J’écrivais aussi en anglais des poèmes libres. 

Avez-vous été dans des cercles littéraires ?

En 2016, j’ai été dans le comité exécutif de l’association de la Caravane du Livre à côté de plusieurs autres écrivains avec qui j’ai réalisé des activités tant au niveau local qu’au niveau régional. En 2018, j’ai été l’un des fondateurs du Café-littéraire Gafaneh. Il y a un an, j’ai aussi initié l’idée d’un atelier d’écriture avec le soutien de certains amis, et j’ai rassemblé une dizaine de plumes en herbe pour les encadrer.

Expliquez-nous comment devient-on poète de nos jours ?

Le comment reste difficile à répondre parce que la poésie est une virtuosité de la langue et que le poète écrit ce qu’il peut. Il suffit, dirai-je, d’écouter ses sensibilités et de les traduire, de verser ses sentiments sur les pages dans une harmonie musicale et dans une quête de sens. On doit recueillir nos forces pour une coagulation verbale intense.

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes Djiboutiens qui veulent s’initier dans l’écriture ?

Lire était le premier Verbe divin au Coran. Je donne ce conseil dans toutes mes interventions. Encore faut-il, après avoir assimilé ses lectures et mûri son style, penser à laisser un patrimoine culturel à la société qui est la nôtre dans une ère où l’art musical ou pictural prennent toutes les lumières et que le livre se trouve délaissé. Ecrire alors, pour vivre à travers les âges et faire vivre les autres.

Propos recueillis par Souber