«L’handicap n’est pas physique, il est mental”. La preuve avec Masso-Daoud : la résilience faite homme ! Ce monsieur d’une quarantaine d’années est né avec l’engagement dans l’âme. Excellent orateur, il est en lui-même la persévérance incarnée. Dougoum est sa création, sinon, le fruit de son combat pour valoriser son terroir. Immense personnalité, il explique avec aisance le développement qu’a connu son village. Le village le plus apprécié de la région de Tadjourah. Dougoum est le laboratoire de la résilience, Daoud Ahmed est son messager. Il n’a pas été scolarisé mais invite et incite les enfants à apprendre, à se former. Il explique avec détermination comment ils ont pris la décision de se pendre en main, de se prendre en charge avant d’attirer les regards de la communauté locale et nationale. De la fromagerie, à la création du forage en passant par les autres activités communautaires, cet homme, malgré son handicap, est le symbole de l’action sociale d’utilité publique. Il faudra lui rendre visite, non pas pour simplement le voir mais aussi et surtout pour s’en inspirer, inspirer les autres à s’autosuffire, à savoir s’impliquer sur le plan communautaire pour subvenir à leurs besoins. Daoud est un homme de parole, un influenceur qui s’est formé sur le tas, sur le terrain. Dougoum est un village exemplaire, Daoud est la voix de la population locale. Dans cette interview Daoud Ahmed fait savoir qu’il a besoin d’être connu, d’être reconnu à sa juste valeur, et il a exprimé son souhait de voir les instances nationales, valoriser sa production locale: Le Fromage de Dougoum ! Succulent, savoureux et à l’état naturel, ce fromage est un pur produit de cette localité. Très beau travail, très belles personnes aussi bien généreuses que travailleuses, notre devoir est de contribuer à leur promotion. « Je préfère ce fromage à la vache qui rit, ou aux autres fromages importés. », dit-il non sans fierté . Rencontre avec un homme très attaché à son terroir et qui peut servir d’exemple à beaucoup de nos compatriotes
Monsieur Daoud, pouvez vous vous présenter à nos lecteurs ?
Je me nomme Daoud Ahmed Daoud. Je suis président de l’association des habitants de Dougoum. Elle a été créée en 2013. C’est une association à but non lucratif et qui a fait son chemin depuis, pour aboutir à ce que vous voyez aujourd’hui. Elle est composée des membres aussi bien d’hommes que des femmes très dynamiques et actives.
Quels sont les objectifs de votre structure associative ?
Les buts de cette association sont divers et nombreux. Elle consiste d’abord à lutter pour le développement durable du village, et aussi d’aider les villageois à se développer, à se prendre en charge par leurs propres moyens de subsistances. Ces moyens sont aussi multiples. Il s’agit entre autres des jardins communautaires, du tourisme intégré, de l’artisanat, de l’apiculture ect… A cela s’ajoute une priorité accordée à un équilibre sanitaire et un style de vie ecoresponsable, le tout pour lutter contre l’exode rural et l’oisiveté. Vous voyez? Dans tout le village, il a été mis des poubelles devant chaque maison pour y mettre des ordures, déchets plastiques et autres objets néfastes pour le bien-être communautaire et pour l’hygiène. Je voudrais un peu évoquer le cas du jardin communautaire..
En quoi consiste le jardin communautaire?
Il s’agit d’un jardin qui appartient à toute la communauté de Dougoum. Vous comprenez ici l’entente qui y existe. Surtout entre les femmes. Un groupe de 23 femmes se partage ce jardin. Chacune d’elles détient une petite parcelle et elles y cultivent ce que bon leur semble. Il y a une parcelle de l’herbe (foins) pour nourrir les animaux domestiques, l’autre pour les légumes, l’autre pour les fruits ect… Ce n’est qu’un travail de pilotage. On attend l’inauguration prochaine d’un forage et à partir de cela, nous allons nous lancer dans l’agriculture à grande échelle. Et nous restons très optimistes. Dougoum deviendra le grenier de la région par sa proximité avec la ville de Tadjourah, par l’engagement unanime de sa communauté et par des personnes de bonnes volontés qui comptent en nous et pour nous, je pense plus particulièrement à l’association Les Abeilles de Dougoum qui a rendu notre rêve possible.
Parlez-nous du fromage de Dougoum. Est ce une particularité du village ?
Absolument. La réalisation de ce projet nous a permis d’avoir la reconnaissance du grand public. Nous avons remporté le prix du Chef de l’Etat et le fromage de Dougoum est né. Pour cela, j’aimerais bien que nos compatriotes sachent qu’un fromage naturel est produit à Dougoum. Mais c’est pour le moment à l’état embryonnaire. J’espère qu’ils auront pour bientôt une production locale de fromage made in Djibouti.
Qu’attendez-vous du gouvernement et qu’avez-vous reçu comme aide ?
Je remercie la ministre de la promotion de la femme Madame Momina Houmed Hassan, qui nous a soutenu dans le cadre de la formation qui nous a été dispensée par un expert italien et on en a profité. Avant, on attendait la présure qu’on importait de France, et grâce à l’expert italien, on a reçu une nouvelle technique à base du petit lait, qu’on trouve chez nous et qui nous a facilité la tâche. Désormais, Dougoum fabrique son fromage pur et naturel à base des produits laitiers de nos cheptels. On va développer davantage l’agropastoralisme pour produire plus. Pour être plus clair, un litre de lait donne un fromage au goût naturel. Et nous avions appris des experts qu’un litre de lait pour les fromages importés donne plusieurs morceaux de fromage artificiel. Un fromage coûte chez nous 800 fd, il est fait avec un litre de lait. Vous voyez la qualité.
Un message pour les Djiboutiens…
Je salue l’engagement de la communauté de Dougoum, unie et soudée qui est prête à relever le défi pour un développement local intégré. D’autre part, j’appelle les instances en charge de la production et de commerce à nous aider à trouver des moyens plus performants pour la fabrication et la commercialisation de nos produits à l’échelle nationale et régionale, voire internationale. J’invite les autres villages à s’impliquer dans le développement intégré et écologique. Dougoum vous attend à bras ouverts.
Propos recueillis par MAI