Marwo Fadoun Ahmed Abaneh, décédée le 18 octobre 2021, était une figure emblématique auprès des femmes djiboutiennes. Si les jeunes générations connaissent le nom de Mahamoud Harbi Farah, le héros mort pour l’indépendance de notre pays, peu ont entendu parler de la vie non moins exceptionnelle de sa veuve.

Fadoun Ahmed Abaneh a connu l’exil, la solitude et même la déportation durant la période coloniale lorsqu’elle a tenté de regagner sa patrie après le décès de son cher époux. Par la suite elle a combattu pour l’indépendance auprès de la future Première Dame, Mme Aicha Bogoreh. C’est naturellement qu’elle a accompagné cette dernière après l’accession de notre pays à l’indépendance. À sa création elle est devenue Vice-Présidente de l’Union nationale des femmes djiboutiennes, l’UNFD.

Elle apportait un parfum d’exotisme aux jeunes militantes qui n’avaient pas eu la chance de voyager autant qu’elle et qui sortaient tout juste de la nuit du colonialisme. Elle avait acquis très tôt l’expérience du pouvoir auprès de son célèbre mari durant les brèves années qu’elle avait partagé sa vie. Elle avait une longueur d’avance sur beaucoup de nos compatriotes notamment grâce à son séjour dans un pays qui avait accédé à l’indépendance quelques dizaines d’années avant le nôtre.

Personnalité charismatique, elle attirait l’attention des médias et apportait souvent sa contribution lors des événements nationaux, que ce soit à l’issue des commémorations de notre indépendance ou célébrations du parti politique à l’origine de l’indépendance, LPAI devenu RPP ; d’ailleurs elle en a été un fervent membre. Elle ne manquait pas une occasion pour rappeler la grandeur de notre nation et les richesses de notre culture.

Un destin exceptionnel qu’était le sien. Son père était un ancien navigateur, qui avait sa place parmi les notables des années 50. Elle venait d’un milieu aisé, riche de métissage du côté de sa mère.

Dotée d’une volonté de fer, elle a traversé les épreuves de la vie avec abnégation et courage. La mort précoce de son mari ne l’a pas ébranlée, au contraire, elle en est sortie plus forte encore. Elle a porté haut le flambeau de la liberté à la mémoire de son défunt mari. Consciente de son rôle dans notre société et du modèle qu’elle représentait pour toutes les femmes, de par le sacrifice qu’avait consenti sa famille pour l’indépendance de notre pays, elle forçait l’admiration.

Dans la vie privée elle était une personne dynamique, généreuse, pleine de compassion. Elle a su inculquer à sa fille et ses cinq petits-enfants l’amour de la patrie et le sens du devoir. Elle va laisser un grand vide à tous ceux qui venaient chercher aide et réconfort auprès d’elle, amis ou proche famille et Dieu sait combien ils étaient nombreux.

Moi qui la connaissais depuis ma tendre enfance, j’étais toujours fascinée par sa vivacité, son intelligence et sa bonne humeur. Sa vie est le témoignage de l’itinéraire d’une grande dame dont la joie de vivre et les conseils continuent de m’accompagner jusqu’à aujourd’hui.

Qu’Allah t’accueille dans son paradis éternel, tu vas nous manquer chère maman.

Mariam Ahmed Goumaneh