Imaginons un instant une armée de jeunes djiboutiennes et djiboutiens, sans le treillis propre aux hommes en armes, sans salaire, mais tout autant dévoués au service de la Nation…  Fiction ? C’est pourtant l’idée mise en avant par le ministère de la Jeunesse et dont le projet de loi, adopté en conseil des ministres, atterrira bientôt à l’Assemblée nationale.

Derrière ce texte, se profile une vision claire et ambitieuse : la création d’un Corps National des Volontaires Djiboutiens. L’initiative, aussi noble soit-elle, pose une question essentielle : comment transformer ce volontariat en un véritable levier de développement et de cohésion sociale ? Le volontariat, par définition, repose sur un engagement libre et désintéressé au service de la communauté. Il représente, dans le contexte de notre pays, un vecteur puissant de participation citoyenne, en particulier pour une jeunesse souvent confrontée à un manque de perspectives professionnelles et sociales.

En instituant un cadre juridique et organisationnel pour cette pratique, ce projet de loi témoigne d’une volonté gouvernementale de valoriser cet engagement. Pourtant, sa portée dépasse largement le simple aspect administratif.Le projet pourrait devenir un instrument majeur de lutte contre le chômage des jeunes, tout en renforçant leur conscience civique. Il offre une plateforme pour que notre jeunesse puisse acquérir des compétences professionnelles, participer à des projets concrets d’intérêt général, tout en se forgeant une identité citoyenne forte.

Cependant, la réussite de cette politique dépendra de plusieurs facteurs. Tout d’abord, il est impératif que le volontariat ne soit pas perçu comme une simple réponse aux insuffisances du marché du travail. Les futurs « appelés » doivent le comprendre comme un acte valorisé, utile et formateur. A cet égard, la création d’un cadre juridique est un pas dans la bonne direction, mais ne suffit pas à elle seule. Il faudra s’assurer que les volontaires reçoivent un soutien adapté, notamment en matière de formation et d’accompagnement professionnel, gage que leur engagement ne sera pas une impasse mais un tremplin vers des opportunités futures.

Ensuite, la question de la reconnaissance sociale du volontariat est cruciale. Il est essentiel que ces jeunes, qui choisissent de consacrer une partie de leur vie au service de l’intérêt général, soient valorisés comme des héros nationaux et érigés enrole model. La mise en place de mécanismes permettant de reconnaître les compétences acquises au cours de leur volontariat sera déterminante pour leur insertion sur le marché du travail. En d’autres termes, l’État devra jouer un rôle proactif pour garantir que cet engagement bénévole se traduise par des perspectives concrètes.

À l’heure où l’engagement citoyen semble vaciller dans de nombreux pays, Djibouti fait le pari inverse : investir dans la mobilisation volontaire comme moteur de développement. C’est un pari courageux car il incarne une promesse : celle d’une jeunesse active, formée, consciente de ses responsabilités citoyennes et prête à s’engager pour l’avenir de son pays. Pour tenir cette promesse, les dispositifs mis en place doivent être à la hauteur des ambitions affichées. Le volontariat mérite d’être porté comme l’une des valeurs cardinales et soutenu par l’ensemble de la société djiboutienne. Car c’est là, au cœur de cet engagement citoyen, que se dessine peut-être le véritable avenir de notre pays.