Les travées de l’Institut français de Djibouti étaient bondées mardi soir pour la première du spectacle de Vanille Fiaux, Du C(h)oeur des femmes, joué par une brochette de jeunes filles et de femmes qui ont remarquablement interprété des figures féminines internationales ! Temps forts ! 

Le décorum, digne d’un bar à chicha, vous saisit de prime abord. Des femmes, grosses lunettes noires sur le nez et habillées en stars hollywoodiennes, fument ou vapotent nonchalamment, ici et là. Costumes signés Coco Chanel ou Christian Dior, fards et déguisements  de scènes, Vanille Fiaux n’a rien laissé au hasard. Une petite musique de fond donne l’ambiance, elle est rapidement dominée par des clips vidéo de chansons tournées dans les décors lunaires de la banquise de sel du Lac Assal.

L’une des artistes déclame des vers poétiques envoutants, lorsqu’une belle musique monte depuis la régie. Puis, place à de longs monologues suivis de dialogues ou d’interviews qui se mélangent savamment, dans une délicieuse confusion ! L’épaisse fumée qui enveloppe la scène lui donne un visuel sélénite. Des photos savoureuses des actrices dans leurs milieux naturels défilent sur l’écran au milieu de cette magnifique chorégraphie musicale.

Le spectacle Du C(h)oeur des femmes, c’est tout simplement du grand art à la hauteur des légendes féminines comme Mireille Mathieu, Romy Schneider, Catherine Deneuve, Isabelle Adjani ou Juliette Binoche, admirablement jouées par des jeunes filles et des femmes de 15 à 60 ans.

L’impression de grand foutoir qui se dégage de ce show polymorphe et sublimedépeint astucieusement la comédie humaine et plus généralement la jungle de la vie. C’est toute la malice du spectacle qui traite habilement de la condition féminine, ses préjugés, ses luttes internes et ses déchirements. Du C(h)oeur des femmes montre au public « l’être au Féminin » à travers l’écriture, la création et la représentation théâtrale, le chant, les films, etc.C’est aussi et surtout un outil de lutte contre toutes les discriminations sous toutes ses formes » selon Vanille Fiaux.

Autrice, comédienne et metteuse en scène de son état, la jeune femme, a imaginé ce spectacle comme une folle aventure collective destinée à « Négocier avec tout le féminin et ses travers ». Des travers qui transparaissent dans les pensées insondables de la Femme ! « Aimer être femme,-là, puis préférer être une autre momentanément. Nier tout, rejeter tout. Devenir femme dans le regard des autres femmes. Se sentir femme dans le regard des hommes. Donner la vie, ne pas perdre la sienne. Chercher dans les mythes des réponses. Et revenir à soi ». Mais le spectacle offre  aussi un moment «d’amitié à travers laquelle nous trouvons l’esprit de compréhension réciproque qui permet à des femmes différentes, par leur âges, leurs métiers, leurs convictions politiques, leurs croyances religieuses de s’aventurer ensemble ».

Le spectacle sert aussi d’exutoire où « on y confie ses peines, on désenfouit les douleurs. Toutes les femmes réunies dans ce chœur y sont muses, interprètes, ambassadrices, poètes. Je les accompagne et je les emmène. On y écrit, on y chante, on joue à être d’autres, on est bien ensemble. Certaines arrivent, d’autres partent et reviennent, passent un moment. » Cette belle aventure commune a créé, le temps d’une soirée,une parfaite symphonie parmi la vingtaine d’actrices d’un soir qui ont joué ce spectacle inédit.

Il faut dire que Vanille Fiaux a murement préparé son coup durant ses périodes de résidence à l’Institut Français de Djibouti. Un temps précieux passé à travailler avec l’ensemble Du C(h)oeur des femmes et le musicien Benoit Prisset. Ensemble, l’autrice et sa vingtaine d’actrices ont peaufiné le spectacle et préparé leurs prestations avant d’offrir une grosse heure d’extase  au public! Une mention spéciale aux jeunes femmes du CASAF et aux associations Solidarité Féminine, les femmes de Randa et de Tadjourah, Sounah Al Hayat, et d’autres structures féministes qui ont mis la main à la pâte pour participer à cette soirée de fête et de folie ! 

Pour la petite histoire, Du C(h)oeur des femmes a germé dans l’esprit de Vanille Fiaux en 2018. Son talent naturel et sa force de persuasion ont fait le reste. Des dizaines de jeunes filles et de femmes de tous les âges et de toutes les conditions ont adhéré au projet qui a rapidement conquis le public dans les quartiers de Malakoff et du Breil mais aussi à Angers. A force d’ateliers de pratique artistique et de prestations sur l’espace public, le succès a fini par sourire enfin aux jeunes filles et femmes qui ont donné au spectacle ses lettres de noblesses et lui ont ouvert la voie royale vers la scène internationale.

Le rendez-vous de l’IFD fut une belle étape dans la tournée internationale Du C (h)œurdes femmes !

Au nom de toutes les femmes, nous disons merci à Vanille Fiaux qui a su «inspirer la solidarité, avec toutes les femmes du monde. Créer du lien, donner du temps, poser un regard, repousser les limites de… » Car, « Ici, c’est toujours ailleurs, un ailleurs plus lumineux et tendu vers une douceur certaine, nous tendons vers la joie ensemble vers la joie ensemble dans la réalisation artistique ».

Stéphane Gallet, conseiller de coopération et d’action culturelle à l’Ambassade de France à Djibouti et directeur de l’IFD a eu le fin mot de l’histoire. Dans un clip vidéo où il donne une interview improvisée à Vanille Fiaux, il rend hommage au « talent collectif des actrices Du C(h)oeur des femmes dans un spectacle qui ne demande pas tellement de budget et qui active les fibres de la solidarité et de la fidélité. Bravo pour le shooting photo des actrices en herbe qui les montre au naturel dans leurs quotidiens, loin des clichés de stars qui pourrait leurs coller à la peau ! C’est ce qui donne toute son authenticité au projet ! Je vous tire mon chapeau mesdames !»

Les femmes valent bien qu’on les écoute et qu’on les comprenne ! Elles méritent le respect et l’amour que leur confèrent leurs statuts de plus belle moitié de l’humanité, d’origine du monde ! Voilà qui est dit !

A bon entendeur salut !

MAS