De plus en plus de femmes djiboutiennes prennent le parcours du combattant pour avoir un enfant.  Normal, dans notre société où les belles-mères squattent chez leurs fils, pour attendre l’heureux événement. Mais pour beaucoup de femmes, ce parcours s’annonce difficile et, pour y arriver, elles sont prêtes à tout. Mousoubiyanad, mauvais œil, que faut-il réellement y penser ?

Avoir un enfant semble si simple pour certaines et pour d’autres, elles seraient prêtes à tout pour y arriver. En effet, à Djibouti, où avoir beaucoup d’enfants est la norme, les familles qui décident d’en avoir un ou deux sont toujours mal vues. « Ils pensent qu’ils sont en Europe », est la première critique, et la seconde est tout de suite tournée vers la femme : « la pauvre elle n’arrive pas à avoir un enfant ». Et si c’était un choix de vie ? Très difficile à comprendre pour certains, une femme peut décider d’en avoir un ou plusieurs, c’est son corps après tout. C’est elle qui supporte les nausées du matin, les lourdeurs de la grossesse, les pieds gonflés, les changements d’humeur, alors pourquoi lui en vouloir. Et puis toutes les femmes ne sont pas hyper-fertiles, il existe des femmes qui paieraient cher pour en avoir plusieurs et d’autres qui se contentent de ce que Dieu leur offre.

La « Mousoubiyanad » existe-t-elle réellement ?    

En matière de fertilité, notre pays a bien évolué. Il y a quelques années, la FIV n’existait pas, elle est désormais possible à Djibouti.  Des cliniques spécialisées sont là pour aider celles qui se lancent dans ce parcours. Sinon, une autre alternative, aller en Égypte ou en Turquie. Plusieurs femmes y ont trouvé leur bonheur. Après plusieurs mois et des traitements, elles reviennent avec leur enfant dans les bras, mais à quel prix ? Pour y aller, il faut d’abord prévoir un budget conséquent, auquel il faut ajouter le logement et aussi le billet pour monsieur, car lui aussi devra faire le déplacement. Le traitement se fait à deux, et les enfants aussi. Pas d’immaculée conception. Pour ces femmes, elles ont choisi la voie médicale, mais pour certaines, elles se tournent vers les cheikhs.

Pas moins qu’hier, une femme s’exprimait sur les réseaux sociaux, où elle racontait sa vie, et son envie de devenir mère. Et dans son texte, elle demandait les coordonnées d’un cheikh pour lutter contre la « Mousoubiyanad ».  Beaucoup de personnes ne savent pas ce que c’est, alors explication.

La Mousoubiyanad serait en réalité un djinn qui vit dans l’utérus et qui empêche de tomber enceinte. Entre mythe et légende, beaucoup de femmes y croient dur comme fer. Elles sont là, à visiter tous les cheikhs qui leur prescrivent des remèdes qu’il faut suivre à la lettre. Pourtant, après des recherches, on retrouve bien ce concept, un peu partout sur internet.

Il est dit que, dans la plupart des cas, le djinn s’établit au niveau de l’utérus de la femme pour altérer les ovules et empêcher par conséquent la fécondation. Parfois aussi, il peut laisser la fécondation se faire mais, après quelques mois de grossesse, il frappe d’un coup de pied une veine utérine, provoquant ainsi une hémorragie conduisant à la fausse couche.

Dans la plupart de ces cas, la femme qui est atteinte de ce sortilège souffre de douleurs au bas-ventre, surtout lorsqu’elle se trouve pendant la période des menstrues, et de douleurs au dos. Parfois, ces femmes sentent aussi comme une boule qui se déplace dans leur appareil génital avec la sortie de petites boules de sang qui n’ont aucune relation avec une quelconque maladie connue. En rêve, ces femmes voient un personnage ou une créature en train de lui donner des coups au ventre pour faire sortir le bébé et lorsqu’elles se réveillent, elles sentent des douleurs au bas-ventre et les premiers symptômes de la fausse-couche commencent à apparaître.

Les symptômes classiques de ce genre de sortilèges sont souvent des douleurs au bas-ventre, et au bas du dos, des règles perturbées avec des douleurs insupportables, une oppression thoracique surtout pendant la nuit (sensation d’étouffement), une sensation d’une fatigue générale au matin en se réveillant avec des courbatures. Mais aussi une sensation de dégoût envers l’époux, ou une boule étrange qui se déplace dans le ventre et dont le point de départ est l’appareil génital, un resserrement au niveau du cœur de la tombée de la nuit jusqu’à sa moitié, une succession de fausses couches, des insomnies récurrentes, des cauchemars, des maux de tête fréquents, que les médicaments ne peuvent faire disparaître, une nervosité qui survient régulièrement.

Dans ce cas, pour soigner, il est très important que le guérisseur et le malade soient animés d’une foi sincère et de la confiance en Allah et de la conviction qu’Allah, le Transcendant, est celui qui gère les affaires et que ce qu’Il veut se réalise quand Il le veut et que ce qu’Il ne veut pas n’arrivera pas. On peut aussi recommander la récitation du verset du Trône avant de se coucher sept fois, elle préserve des mauvais rêves. Mais savoir déjà ce dont on souffre est le premier pas vers la guérison.

Et le mauvais œil ?

Pour certaines, elles seraient juste victimes du mauvais œil, ce qui empêcherait tout simplement la grossesse. L’envie de tomber enceinte rendrait n’importe quelle femme sujette à n’importe quelle croyance. Certes le mauvais œil est reconnu dans notre religion, et il existe plusieurs rukya à cela, mais l’essentiel est d’avoir la foi. Pourtant, des femmes, de tout bord, ont la ferme conviction que le mauvais œil les suit dans leur quotidien de femmes mariées. Et les voici qu’elles tombent dans de fausses croyances, telles que le ‘‘Saar’’ et autres. Elles se parent d’habits rouges, de la tête aux pieds, achètent le fameux parfum ‘‘Fur cadde’’ qui sent super mauvais et préparent des pop-corn et du café selon un rituel bien précis. Cette pratique qui relèverait plus de la magie noire n’a aucunement sa place dans notre religion. Penser que le ‘‘Saar’’ existe serait bien faux, pourtant, rien ne ferait qu’elles délaissent cette pratique d’un autre temps et d’un autre âge. Et ceci peut devenir, à la longue, très malsain et certaines femmes finissent par ne plus accepter leur destin, qui peut être bon ou mauvais : si quelque chose de bien leur arrive, elles sont contentes, s’il leur arrive un malheur, c’est sûrement de la faute aux autres, alors que nul n’est à l’abri de l’épreuve ! Toutefois, il est important de se dire que chaque chose est prescrite, et combien de femmes ont gardé la foi et ont pu avoir des enfants après plusieurs années de mariage. Mousoubiyanad, mauvais œil, si nos mères y croyaient, les jeunes femmes d’aujourd’hui, elles, choisissent de se tourner vers la médecine moderne.

Elles s’en remettent également à Dieu, car c’est Lui qui décide de tout.   Et au lieu de se dire “pourquoi moi ?”, il vaut mieux se dire “pourquoi pas moi ?” Pourquoi les autres seraient éprouvés et pas moi ? Est-ce forcément à cause des autres ou est-ce juste mon destin ? On ne sait pas au final. Donc à part être patient, dire Alhamdulillah, prier et avoir confiance en Allah et en son destin, il n’y a rien d’autre à faire. Penser à ce genre de choses nous empêche d’accepter son destin, amène la suspicion et nous amène à porter des accusations très graves sur des personnes sans que nous ayons de certitudes.

Gardons la foi et surtout la médecine fait des miracles, de nos jours. Les « Saar » et autres n’ont plus vraiment leur place dans nos foyers. Un conseil, les enfants sont une bénédiction divine alors gardons la foi et peut-être qu’un jour, ce miracle tant attendu viendra.

N. Kadassiya