
Il est des personnes qui vous fascinent par leur engagement, leur sincérité, leur sens de l’intérêt général mais aussi leur aptitude à vouloir toujours aider les autres. Les plus démunis, quand ils ont le plus besoin d’une main tendue. Un geste salvateur qui leur permet de reprendre espoir, sortir du fond de l’abime et se battre pour garder toujours leur dignité. Un petit coup de main mais très décisif qui peut changer toute une vie. Fihima Mohamed Ismail Alias « Raliya bintu ixtiraam » est de ce genre de personne. Elle a l’entraide chevillée au corps. Pour elle, la solidarité n’est pas un vain mot. Au contraire, les citoyens peuvent s’entraider, se porter secours. Sans gros moyens bien sûr. Chacun à son niveau peut mettre la main à la pâte dans la mesure du possible. Portrait de cette femme très engagée et très connue sous nos cieux, surtout sur la toile où elle compte plusieurs milliers de followers.

Qui est d’abord Fihima ?
Une citoyenne djiboutienne qui a vécu durant 13 ans à Londres. Elle nous précise qu’après des études primaires et secondaires à Djibouti ville et un bac littéraire obtenu en 1999, elle s’envole pour la France pour poursuivre ses études supérieures. Elle est inscrite à la faculté de droit et de science politique de Nantes. En 2004, elle part à Londres pour parfaire son anglais, nous dit-elle, car elle s’est aperçue que le monde basculait vers la langue de Shakespeare. Elle passe le test TOEFL et avec son très bon score, elle obtient un travail d’interprète assermenté auprès de la cour de justice de Londres. Parallèlement, elle s’engage dans le social à travers une ONG présente aussi à Djibouti et qui s’appelle «Danish refugee council ». Elle devient « integration officer » au sein de cette ONG, ce qui lui a permis de découvrir aussi sa fibre sociale. Trois ans durant, elle s’occupe des cas des réfugiés francophones et somalophones. D’une pierre deux coups, Fihima décroche un master 2 en « refugee study » grâce à l’aide de l’ONG danoise. Sa thématique était liée à tout ce qui avait rapport à l’immigration. Pourquoi les gens immigrent ? Quels sont les facteurs qui les poussent à quitter leur pays ? En 2012 un avènement douloureux survient au sein de sa famille. Elle perd son père et regagne le pays. Etant l’ainée, elle avait la charge de s’occuper de sa fratrie et de leur maman. Elle passe trois mois à Djibouti et décide de s’y installer définitivement. « Durant mon séjour londonien
j’ai fait des formations sur le social service. J’ai vu qu’à Djibouti beaucoup de choses manquaient raison pour laquelle je me suis engagée en faveur des personnes nécessiteuses qui sont en bas de l’échelle sociale », nous dit-elle. Ceux qui ont attitiré son attention ? Les femmes, les orphelins et autres démunis malmenés par les aléas de la vie. Mais outre s’occuper des autres et leur porter secours, Fihima doit travailler aussi pour nourrir sa famille . Grâce à de petites économies elle ouvre une société de logistique en 2013. Elle fait du porte à porte pour aider sa clientèle à acheter ceux dont ils ont besoin dans les pays étrangers comme l’Inde , la Chine etc… En 2016, elle décide de sortir de son petit cocon, comme elle le dit. Elle organise un iftar collectif pour entre 9000 et 10.000 personnes. Et depuis cette noble action s’est pérennisée à Balbala. « Petit à petit, j’ai commencé à avoir un réseau de personnes qui voulaient faire « la sadaka » mais qui ne savaient à qui s’adresser ». Elle déambule dans Balbala et se focalise surtout sur les femmes démunies car si on aide une maman, on aide toute la famille selon Fihima, qui nous précise que nos mères sont courageuses et se débrouillent bien. Le bilan est éloquent. Plus de 9000 femmes ont trouvé aide et assistance. Avec une somme comprise entre 30.000 et 100.000 FD, elles se lancent dans des activités génératrices de revenus. « Nous faisons en sorte qu’elles n’aient pas besoin de tendre la main », précise t-elle non sans fierté d’avoir pu redonner espoir à ces femmes qui, pour certaines d’entre-elles étaient au bout du rouleau.
Comment voit-elle la situation de la femme à Djibouti ?
Elle s’est beaucoup améliorée ces dernières années, selon Fahima. Les femmes prennent leur destin en main. Il existe une vraie volonté politique visant à les associer à toutes les questions concernant la société. La « mère Theresa » locale organise bientôt une première conférence entre les femmes parlementaires et les citoyennes lamda . L’objectif est de créer une plateforme pour pouvoir orienter et sensibiliser les élues sur les lois nécessaires pour la promotion et l’émancipation des femmes.
Patriote dans l’âme, elle est convaincue que des gens doivent s’occuper de ce pays. Pour faire bouger les choses, elle utilise les réseaux sociaux qui lui permettent de toucher un maximum de mécènes et de donateurs. Et souvent dans l’anonymat le plus total. Les femmes qui bénéficient de son aide et son assistance lui sont reconnaissantes et ne cessent de la remercier. « Ce qui me réconforte, c’est cette fierté retrouvée de la part des femmes qui avaient désespéré de tout et qui ne savaient à quel sain se vouer ».
Huit sites sur la toile traduisant autant d’activités sur le terrain
Fihima se qualifie comme une entrepreneuse social qui veut toujours aider son prochain et lui apporter aide et assistance. Elle est l’initiatrice aussi de l’opération « Geed beer rajobeer » qui veut littéralement dire “plante un arbre, plante un espoir”. Cette action a permis de planter plus de 3500 arbres sur le sol national. Récemment elle a étendu cette action aux tourtereaux. Dans une autre version intitulée « Geed beer guri ber » , elle propose aux jeunes mariés djiboutiens de planter un arbre qui symbolise leur union pour le meilleur et pour le pire. Ils verront cet arbre grandir, donner des fruits. Les fruits de leur amour. Une idée géniale pour planter une multitude d’arbres représentant autant d’unions et de contrats de vivre ensemble.
« Planter un arbre signifierait pour les nouveaux mariés, une façon de voir leur amour grandir au fil du temps. Mais aussi l’occasion d’être un couple écolo qui veut apporter sa contribution. Si le couple possède de la place on plante avec eux sinon pour bientôt on aura une place spécialement pour les arbres plantés par des couples. ” rappelle t-elle.
Autre activité et non des moindres, elle possède un jardin bio situé à PK25 . Elle cultive une multitude de plantes et de fruit qu’elle écoule sur le marché local. ” Si tout le monde se met à cultiver, nous pouvons attendre une autosuffisance alimentaire. Lorsqu’on nous rabattait les oreilles que notre sol est infertile et que rien ne peux pousser à Djibouti, c’était une grande aberration…” , insiste t-elle. «Pour développer l’agriculture à Djibouti, la création d’une école agricole agrée est nécessaire », dit elle avec force et conviction. Les oiseaux du paradis est une autre structure qu’elle a initiée et qui s’occupe des enfants orphelins et ceux de père inconnu.
Fihima est une batteuse, qui caresse beaucoup de rêve pour son pays et ses compatriotes. Notamment la création dans les quartiers de centres sociaux qui s’occuperaient des jeunes en difficulté. Elle est un exemple pour toutes ces femmes qui , chaque jour que Dieu fait, nourrissent, éduquent et prennent soin de leur famille. « Il faut donner de notre temps et sortir de notre cocon pour aider ce pays », ne cesse t-elle de répéter Tout le monde ne tarit pas d’éloge à l’endroit de cette citoyenne qui a le coeur sur la main.
Celle qui a renoncé à sa nationalité britannique veut s’occuper uniquement du développement de son pays. Nous lui souhaitons bon vent.
KENEDID IBRAHIM