Au camp de Doraleh, s’est tenue hier matin une séance de plaidoyer et de diffusion qui a réuni, officiers de la garde-côte et représentants humanitaires. L’objectif  étant de renforcer la coopération et garantir le respect de la dignité humaine lors des opérations de refoulement des personnes en situation irrégulière, dans un contexte où Djibouti reste l’un des points névralgiques de la migration en Afrique de l’Est.

Le centre d’instruction de la garde-côte sis à Doraleh,  a accueilli, hier matin, une séance de plaidoyer et de diffusion consacrée aux opérations de reconduite aux frontières des personnes en situation irrégulière. Organisée sous le patronage du colonel Wais Omar Bogoreh, commandant de la garde-côte djiboutienne, cette rencontre a rassemblé 26 officiers et sous-officiers supérieurs de l’institution. Aux côtés des cadres de la garde-côte, on notait la présence de la secrétaire générale du Croissant-Rouge de Djibouti, Amina Houssein Farah, et d’un représentant du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

Cette initiative illustre la volonté de Djibouti d’instaurer un dialogue renforcé entre forces de sécurité et acteurs humanitaires. Car le pays, situé au carrefour de la Corne de l’Afrique et de la péninsule arabique, se trouve depuis plusieurs années au cœur des routes migratoires de la région. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 200 000 migrants transitent chaque année par Djibouti, principalement en provenance d’Éthiopie, dans l’espoir de rejoindre le Yémen puis les pays du Golfe.

Face à ce flux migratoire d’envergure, les autorités djiboutiennes multiplient les opérations de contrôle et de reconduite aux frontières. Mais ces interventions, nécessaires à la régulation des flux et à la préservation de la sécurité nationale, soulèvent aussi des enjeux humanitaires. C’est du moins le sens de l’atelier de sensibilisation et d’information organisé par le croissant Rouge en collaboration avec la Garde-côte. Au cours de la cérémonie inaugurale de cette séance Dans son allocution, le colonel Wais Omar Bogoreh a tenu à rappeler la ligne directrice de son institution. « La mission qui nous réunit ce matin vise à renforcer les capacités opérationnelles des personnels de la garde-côte, conformément à la législation nationale et aux engagements internationaux souscrits par la République de Djibouti. Dans le strict respect de la dignité humaine, la garde-côte s’assure que l’ensemble de ses interventions se déroule dans la transparence, la rigueur et le plein respect des normes en vigueur » a indiqué le colonel Wais Omar.

Il a ajouté que cette rencontre ne se limitait pas à un simple rappel technique. « Cette séance doit consolider une approche plus humaine, plus respectueuse et pleinement consciente des enjeux humanitaires qui accompagnent nos opérations. La collaboration avec le Croissant-Rouge nous offre ici une opportunité stratégique pour renforcer la coordination, harmoniser nos méthodes et améliorer la compréhension mutuelle entre nos agents et les acteurs humanitaires sur le terrain » a souligné le commandant de la Garde-côte.

Pour sa part, la secrétaire générale du Croissant-Rouge de Djibouti,  Amina Houssein Farah, est revenue sur la mission de son organisation et sur l’importance de la reconnaissance de son rôle par les forces de sécurité. « Le Croissant-Rouge de Djibouti existe depuis 1977 et s’inscrit pleinement dans les principes fondamentaux du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Mais il subsiste encore des zones d’ombre quant à notre rôle et à nos prérogatives. Ces approximations compliquent notre intervention et nuisent à notre efficacité », a-t-elle déclaré. L’organisation intervient notamment au centre de transit de Nagad, où sont conduits les migrants en situation irrégulière. Elle y apporte une assistance multisectorielle : soins médicaux, distribution de vivres et d’eau potable, ainsi qu’un appui psychologique. « Notre présence à Nagad est une expression de notre engagement à accompagner humainement ces personnes, au-delà de la dimension sécuritaire de leur reconduite », a précisé Mme Amina Houssein.

Rappelons que cette rencontre a permis de mettre en lumière une problématique centrale, celle de concilier les impératifs sécuritaires de l’État et les exigences humanitaires liées à la prise en charge des migrants. Pour Djibouti, petit pays de moins d’un million d’habitants mais au rôle stratégique, cet équilibre est d’autant plus délicat que les flux migratoires ne faiblissent pas. En 2024, l’OIM estimait que plus de 80 % des migrants traversant Djibouti provenaient de l’Éthiopie voisine, fuyant pauvreté, conflits et manque d’opportunités. Beaucoup d’entre eux se retrouvent bloqués sur le territoire djiboutien, vulnérables, parfois victimes de réseaux de passeurs. C’est dans ce contexte que le colonel Wais Omar Bogoreh a rappelé la volonté de la garde-côte de travailler main dans la main avec les acteurs humanitaires.  « En conjuguant nos compétences, nous contribuerons non seulement à l’efficacité de nos opérations, mais également au rayonnement de notre pays en matière de respect des droits humains » a-t-il insisté.

La séance d’hier s’inscrit dans une série d’initiatives visant à formaliser et renforcer la coopération entre les forces de sécurité et les acteurs humanitaires à Djibouti. L’objectif étant de  faire en sorte que les opérations de reconduite se déroulent dans un cadre respectueux des droits humain, tout en permettant aux institutions de maintenir l’ordre et la sécurité. « Je souhaite que cette journée d’échange soit marquée par un esprit d’ouverture et de coopération. Puisse cette initiative être le point de départ d’un partenariat encore plus solide et d’une action conjointe exemplaire au service de notre cher pays » a lancé le colonel Bogoreh pour clôturer son intervention.

La séance d’hier a été saluée comme une étape importante dans la construction d’un cadre de travail plus structuré entre militaires et humanitaires. Les participants ont exprimé le souhait que ces séances de plaidoyer se poursuivent et s’élargissent à d’autres acteurs de la chaîne migratoire, notamment la police nationale, la gendarmerie et l’armée.

Car si Djibouti, en raison de sa position géographique, ne peut échapper à la réalité des flux migratoires, il peut choisir la manière dont il les gère : avec fermeté certes, mais aussi avec humanité.

La cérémonie s’est terminée par la remise des certificats aux participants qui ont bénéficié de cette formation.