On reproduit ci-dessous le discours que le Président de la République, Ismaïl Omar Guelleh, a prononcé dans son intégralité lors du forum sur la santé et les affaires qui s’est tenu hier à Addis-Abeba en marge du 32ème sommet de l’Union Africaine.
Je suis particulièrement heureux d’être parmi vous à l’occasion du lancement du forum sur « la santé et les affaires en Afrique », organisé par la Commission Economique Africaine. C’est un privilège pour moi de partager avec vous quelques réflexions sur ce thème mais également vous avancer l’exemple de Djibouti, tant en matière de défis que d’opportunités dans ce secteur.
Je voudrais tout d’abord, à l’entame de mes propos, adresser mes chaleureux remerciements à tous les responsables qui ont contribué de près ou de loin, à la tenue de ce forum et aux fructueux travaux que vous allez engager ces jours à venir pour mieux identifier et étoffer les liens entre santé et croissance économique en Afrique.
Aucune nation ne peut prétendre à un développement économique sans une population en état de complet bien-être physique, mental et social.
Fort de cette conviction, mon pays a placé au cœur de ses priorités une santé équitable et accessible pour tous. Ainsi, la part du budget national consacré aux dépenses de santé n’a cessé d’augmenter afin de se rapprocher des engagements de la déclaration d’Abuja de 2001.
En dépit de ces efforts déployés une grande partie de la population continuait à être exclue de l’accès aux soins de qualité. Avec l’introduction du système de participation élargi à l’ensemble des bénéficiaires permettant de recouvrer, en partie, les coûts de la santé, c’est une partie et non des moindres des frais de soins de santé qui revenait à la charge des patients ou de leurs familles.
Le paiement à l’acte a constitué une lourde charge pour les citoyens concernés et a fortement contribué à leur appauvrissement. Malgré son utilité pour combler le gap de financement du poste santé, Ce système est resté particulièrement inéquitable pour les personnes vulnérables.
Ainsi, nous avons remarqué que l’absence d’un système assurantiel constituait un des facteurs de basculement des ménages dans la pauvreté. Les ménages aussi bien en milieu rural qu’urbain étaient exposés à une variété de chocs qui les empêchaient d’accumuler les biens et le capital humain susceptibles de les aider à sortir de la pauvreté.
Dans l’optique de promouvoir le droit à la santé pour tous, sans discrimination et sans iniquité et aussi dans l’optique de lutter contre la pauvreté, la République de Djibouti s’est dotée d’un système d’assurance maladie universelle (AMU). La particularité de ce système étant la généralisation du tiers-payant. Ce qui a permis de supprimer toutes les barrières financières à l’accès aux soins de santé.
L’objectif de mon pays, dans le court terme est d’atteindre la Couverture santé universelle (Universal Health Coverage) afin d’être en phase avec le troisième pilier des objectifs du développement durable. Nombreux sont également les pays sur le Continent qui convergent vers la CSU.
L’Afrique fait face aujourd’hui à la résurgence de maladies qu’on pensait maitrisées et d’autres qui étaient en phase d’éradication. Les taux de prévalence de certaines maladies non transmissibles comme le diabète, atteignent aujourd’hui des niveaux inquiétants.
Des investissements importants ont été consentis dans le domaine de la santé et surtout pour rehausser les niveaux des plateaux techniques dans les grandes formations sanitaires nationales. Malgré ces lourds investissements, vous conviendrez avec moi que nous continuons toujours à manquer d’infrastructures de pointe et que nous n’arrivons pas à garantir et à sécuriser nos approvisionnements en médicaments et en produits pharmaceutiques de bases.
A Djibouti, avec l’avènement de l’assurance maladie universelle et notamment du tiers-payant généralisé, nous avons pu garantir au secteur médical public comme privé le paiement des frais de soins prodigués à chaque patient. Les établissements privés dispensent les services nécessaires et arrivent à recouvrer les frais. Cette réforme a favorisé le développement des soins de niveau tertiaire plus coûteux et jugés plus rentable. Il est grand temps, maintenant de promouvoir à une échelle plus large, les partenariats publics-privés dans le domaine de la santé de manière générale et notamment de l’orienter dans les segments qui ont un puissant effet sur les indicateurs de santé publique dont les volets les plus importants demeurent les soins de santé primaire, l’hygiène et la nutrition.
Ensemble, nous pouvons augmenter l’efficacité et la qualité de nos systèmes de santé si nous orientons les ressources dans ce triptyque et ce, à travers l’innovation technologique grâce auquel nous pourrons :
– Développer de véritables systèmes d’informations sanitaires, utiles pour répondre efficacement aux
différentes épidémies qui peuvent frapper une région ou un pays ;
– Développer des plateformes de productions et de distributions de médicaments et de produits pharmaceutiques car l’accès à des médicaments de qualité et à bas coût est un enjeu majeur ;
– Développer des centres de diagnostics performants;
– Mieux former nos ressources humaines médicales et investir dans les start-up dédiées au e-santé qui est la santé de demain.
Voilà des exemples d’actions que nous devons mener ensemble.
Le partenariat public-privé a demontré son efficacité dans plusieurs pays comme la Nouvelle-Zélande, l’Australie et le Royaume-Uni et a été un cercle vertueux. Cela doit être le cas en Afrique.
Notre continent a une population jeune. Ce qui est une chance. Grace à un partenaire clairvoyant entre le public et le privé, je demeure convaincu que nous pourrons l’aider à vieillir en bonne santé.