Si le mois béni du Ramadan est avant tout une période de prière, de jeûne et d’invocation à Allah, il représente également, à Djibouti comme dans la plupart des pays à majorité musulmane, un moment de forte activité économique. Entre l’augmentation de la consommation, la multiplication des dons caritatifs et la frénésie commerciale à l’approche de l’Aïd, cette période profite à de nombreux secteurs et constitue une aubaine pour de nombreuses petites activités commerciales.

Le Ramadan est, à Djibouti, comme la plupart des pays à majorité musulmane du monde, une période où la consommation alimentaire explose. Des différents marchés locaux, aux petits vendeurs de Samboussa des quartiers, en passant par les magasins de Prêt-à-porter et les supermarchés, le commerce enregistre une affluence record.

La demande des produits de première nécessité, tels que les dattes, le lait, la farine, le sucre, le riz, les pâtes, les viandes et les céréales qui sont essentiels à l’iftar, le dîner et le Suhur, connaît une flambée. Cette frénésie d’achats profite aux commerçants. Mohamed, gérant d’une épicerie à Cheikh Moussa dans la commune de Balbala, confirme cette hausse des ventes.  « Les clients achètent en gros. L’huile, le sucre, la farine et les dattes se vendent comme jamais. Je fais parfois deux à trois réapprovisionnements par semaine, alors qu’en temps normal, un seul suffit » nous dit-il.

Le marché de Riad et la Place Mahamoud Harbi deviennent des lieux incontournables pour acheter des vêtements tandis que les magasins de parfums et de jouets connaissent aussi un pic d’activité, car offrir un cadeau reste une tradition durant l’Aïd. Les vendeurs de décorations et d’accessoires religieux enregistrent eux aussi une hausse des ventes. « Les chapelets électroniques et les tapis de prière figurent parmi les demandés » nous apprend Ali Abdo, un vendeur ambulant que nous avons rencontré au centre-ville.

Le secteur de la charcuterie et celui des fruits et des légumes, enregistrent également un essor fulgurant. « En temps normal, je vends une cinquantaine de kilos de viande par jour. En période de Ramadan, cela double, voire triple », confie Ahmed, un boucher du marché de Ryad. Même constat pour Halima, vendeuse de légumes et de fruits dans ce même marché : « Les clients achètent en gros. Certains prennent pour la semaine, ce qui nous oblige à augmenter nos commandes. Cette hausse de la demande booste nos revenus »

Une multiplication des stands de rue

Les petits commerçants et les vendeurs ambulants profitent eux aussi de cette période pour augmenter leurs revenus. On observe une multiplication des stands de rue proposant des plats traditionnels comme le samboussa, des dattes et les jus frais, très prisés à l’heure de la rupture du jeûne. À PK12, Mariam, une mère de famille, prépare des samboussas et des beignets qu’elle vend devant chez elle à Ambouli.

« Je gagne entre 2 000 et 3 000 FDJ par jour, ce qui m’aide à subvenir aux besoins de mes enfants. Pendant le Ramadan, la demande explose, et je commence la préparation dès midi pour être prête à temps » nous dit-elle, sourire aux lèvres.

Les magasins de prêt-à-porter et ceux des jouets ne sont pas en reste. Abdousalam, propriétaire d’un stand au marché de Ryad, se frotte les mains. « J’importe des vêtements de Chine et de Turquie spécialement pour le Ramadan. Les derniers jours avant l’Aïd, je fais mon plus gros chiffre d’affaires de l’année » nous confie-t-il. Pour le magasin voisin, spécialisé dans la vente des jouets, la période est juteuse. Said le propriétaire a minutieusement préparé son stock plusieurs semaines à l’avance, anticipant la forte demande des parents désireux de gâter leurs enfants pour l’Aïd. « Les familles viennent en masse pour offrir des jouets à leurs enfants. Voitures miniatures, poupées, jeux éducatifs… Tout part très vite ! » explique-t-il avec enthousiasme. Pour maximiser ses ventes, il propose même des offres spéciales et des packs promotionnels. « Certains clients achètent plusieurs jouets à la fois. C’est le moment idéal pour écouler mon stock et fidéliser ma clientèle » ajoute-t-il.

Dans les allées du marché de Ryad, l’effervescence est palpable. Les clients défilent, comparant les prix, négociant chaque article, tandis que les commerçants redoublent d’efforts pour attirer l’attention. L’approche de l’Aïd transforme le marché en un véritable centre d’attraction où chacun espère tirer profit de cette frénésie d’achats.

La période constitue une aubaine également pour les tailleurs de la place qui enregistre aussi une forte demande dans le domaine de la confection des rideaux, obligeant les couturiers à travailler jusque tard dans la nuit. « C’est notre haute saison, on ne dort presque pas », confirme Fatouma Awaleh, une mère de famille qui tient un atelier chez-elle à la cité Wadajir dans la commune de Boulaos. Si le Ramadan booste l’économie de nombreux secteurs, certains connaissent un ralentissement notable, notamment ceux nécessitant un effort physique important. Dans le bâtiment, par exemple, les ouvriers travaillent tôt le matin et réduisent leur activité l’après-midi à cause de la chaleur. « On commence tôt le matin car à partir de midi, c’est difficile de travailler sous le soleil sans boire d’eau. Donc nous réorganisons nos équipes. Nous nous concentrons le matin sur les tâches qui demandent le plus d’efforts physiques », nous explique Abdillahi Wais, chef d’une entreprise de construction.

Quant aux transports publics, ils enregistrent également une baisse d’activité en journée, avant d’avoir un pic en fin d’après-midi, lequel se prolonge jusqu’à tard dans la nuit, surtout en cette période d’approche de l’Aïd El-Fitr. « Je paie 200 Fdj au lieu de 150 Fdj pour me rendre à la place Mahamoud Harbi », se plaint Mme Kadra Omar, une mère de famille résidant à la cité Nasiib, dans la commune de Balbala. « Le Bajaj qui me conduit de chez moi jusqu’aux environs du 4ᵉ arrondissement me coûte 100 Fdj. De là, nous prenons un premier bus qui nous dépose devant le marché Ryad, puis un second bus qui nous amène finalement à la place Mahamoud Harbi », explique-t-elle. Il est à noter que le Ramadan est aussi l’occasion pour de nombreux djiboutiens, d’effectuer la Omra (petit pèlerinage à La Mecque), ce qui profite aux compagnies aériennes et aux agences de voyage.

RACHID BAYLEH