– De notre envoyé spécial à Addis-Abéba : A.A-MAHE  / Crédit Photos : A.A.-Mahé

En 2007, l’Union Africaine crée et déploie pour la première fois, une mission destinée à libérer les principales agglomérations de l’emprise du groupe terroriste Al-Shebab, d’instaurer une paix durable et de favoriser un processus politique capable de rétablir le pouvoir de l’Etat Somalien. A l’époque, la Mission de l’Union Africaine (AMISOM) avait  remplacé la mission d’appui à la paix en Somalie, qui fut dénommée «IGASOM». Créée par l’Autorité Intergouvernementale pour le Développement (IGAD) et approuvée par l’Union africaine au mois de Septembre 2006, l’IGASOM  était une mission de protection et de formation destinée à fournir une force de maintien de la paix au Gouvernement Fédéral de Transition de l’époque. Cette force devait s’engager dans  la dernière phase de pacification et mettre à termes cette guerre civile somalienne qui avait mis à genou le pays.   Le 20 Février 2007, le Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations-Unies autorisa  l’Union Africaine à déployer une mission de maintien de la paix plus élaborée que celle de l’Igad. L’organisation continentale décida alors de mettre sur pied l’AMISOM qui remplaça définitivement l’IGASOM.

A son tour, après une décennie et demie d’exercice, la Mission de l’Union Africaine en Somalie (AMISOM) tirera sa révérence, à la fin de ce mois de Mars 2022, pour céder place à la Mission de Transition de l’Union Africaine  en Somalie (ATMIS). Approuvé par le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine et par le Conseil de Sécurité des Nations-Unies,  l’ATMIS disposera selon l’Union  Africaine de deux années pour stabiliser le pays et transférer l’entière responsabilité de la sécurité nationale au Gouvernement Fédéral Somalien. Le calendrier et le concept des opérations furent également  adoptés par le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine, lors de sa 1068ème  réunion qui s’est tenue le 8 Mars 2022, avant la date butoir du 31 Mars 2021, date fixant la fin du mandat de l’AMISOM.

C’est lors d’une réunion qui s’est tenue la semaine dernière à Mogadiscio que des Diplomates de l’Union Africaine et des Représentants du Gouvernement Somalien, se sont mis d’accord sur les textes régulant le futur dispositif de la sécurité du pays. Le calendrier établi pour les deux prochaines années concernera pour l’essentiel, la construction des forces terrestres et aériennes du pays, des institutions liées au renseignement et à la sécurité, en vue de leur prise en charge globale. L’Union Africaine et le Gouvernement Fédéral Somalien, initialement en désaccord sur l’avenir de l’AMISOM et les conditions d’une nouvelle mission, se sont entendus à Mogadiscio pour travailler ensemble et fructifier cette période de transition dont l’importance est capitale.  Au cours d’une conférence de presse qu’il a tenu le 14 Mars dernier, le Commissaire de l’Union Africaine aux Affaires Politiques, à la Paix et à la Sécurité, SEM Bankole Adeoye, avait déclaré que l’ATMIS sera différente de l’AMISOM en tout point de vue. En effet, tout en disposant des troupes actives au combat, cette nouvelle mission aura en plus à sa disposition une importante équipe de technocrates capable de contribuer au redressement administratif de toutes les structures de l’Etat et des Régions, des structures affaiblies par des années de guerre civile. L’Ambassadeur Bankole Adeoye a indiqué que la stratégie du Gouvernement Fédéral Somalien et l’objectif de l’ATMIS seront fonctionnellement alignés. Selon le diplomate, c’est ce facteur important qui fera la différence. Le but étant d’éviter de créer un vide  dans la lutte contre le terrorisme, durant cette période de transition qui prendra fin au mois de Décembre 2024. La Somalie ayant toujours insisté sur la mise en place d’une mission de transition axée sur les composantes militaires ; mais surtout, orientée sur le renforcement institutionnel.

Une transition calibrée

Créé en 2007 pour soutenir le gouvernement fragile de Mogadiscio, l’AMISOM a joué un rôle crucial dans la lutte contre les terroristes AL-Shebab et dans le maintien d’une sécurité relative à travers tout le pays. Bien qu’elle n’avait aucun moyen pour dissuader la population de rejoindre les terroristes, un tel effort ayant besoin d’être épaulé par de meilleures institutions et de meilleures opportunités économiques. 

Au cours d’une rencontre qui a eu lieu le 17 Mars 2022, entre l’Ambassadeur Bankole Adeoye et le Président Mohamed Farmajo, les deux responsables avaient convenu que l’extrémisme restait un problème majeur en Somalie et qu’il fallait le combattre par tous les moyens. Un communiqué publié par la présidence somalienne confirme qu’un accord a été conclu entre le dirigeant somalien et le responsable de l’Union Africaine sur le transfert des fonctions de l’AMISOM à l’ATMIS. “Ce que je retiens  de cette rencontre, avait déclaré l’Ambassadeur Adeoye, c’est que l’Union africaine et le Gouvernement de la Somalie restent dans le cadre de la vision de l’Union Africaine dont l’objectif est de construire un continent intégré, prospère et pacifique”. 

A l’issue de cette réunion à laquelle participait également le Représentant Spécial du Président de la Commission de l’Union Africaine pour la Somalie et Chef de l’AMISOM, M. Francisco Madeira, l’Envoyé de l’Union Africaine avait déclaré  que les propres forces de la Somalie assumeront l’entière responsabilité de la sécurité de leur pays durant ces deux années de transition de l’ATMIS. « Ce que je retiens de cette rencontre, avait déclaré l’Ambassadeur, c’est que l’Union Africaine et le Gouvernement de la Somalie reste dans le cadre de la vision de l’Union Africaine dont l’objectif est de devenir une Afrique intégrée, prospère et en paix.

Le Président Farmajo a affirmé quant-à lui, que la Mission de Transition offrira plus d’opportunité et favorisera la renaissance de la Somalie. « Je peux vous assurer, a-t-il dit, que l’ATMIS mettra à la disposition de la Somalie les moyens nécessaires pour améliorer ses forces dans tous les domaines. Que ce soit l’armée, la police, les services de renseignement et d’autres institutions étatiques, pour nous permettre d’assumer pleinement la responsabilité et la sécurité du Pays et de son Peuple ».

Néanmoins, les défis ne manquent pas

Le Directeur Général du Ministère de la Défense, Monsieur Hassan Ga’aliye, a laissé entendre que la Somalie, durant ces deux années de transition, devra se consacrer à rebâtir toutes les divisions de  l’Armée Nationale Somalienne (SNA) et forger leurs compétences pour qu’ils puissent assurer tous les besoins de sécurité intérieure et extérieure. « Nous veillerons, avait dit

M. Ga’aliye, à ce que le SNA assume tous les engagements de sécurité y compris la défaite des extrémistes”. Dans ce cadre, le Premier Ministre, M. Mohamed Houssein Robleh, avait rencontré tous les Commandants des Forces de Sécurité Somaliennes dont le SNA, la Police et l’Agence Nationale de Renseignement et de Sécurité (NISA) ; ainsi que des officiers représentants les Forces de l’AMISOM, soulignant « la nécessité d’une collaboration plus étroite entre les Forces Somaliennes et les Casques Bleus de l’Union Africaine,  dans l’effort qu’il faudra consentir pour lutter contre le terrorisme. Et surtout, rester très vigilant durant cette période où, le pays restera littéralement  tourné vers des activités électorales ».                                            

Loin de vouloir lâcher la Somalie, l’Union Africaine cherche à impliquer le Gouvernement Fédéral Somalien pour qu’il soit plus apte à combattre les terroristes Al-Shebab et d’instaurer une paix durable à travers l’ensemble du pays. Et ce, avec ses propres forces de sécurité. Pendant ces deux années de transition, l’Union Africaine fournira, à travers l’ATMIS, un soutien sans faille au Gouvernement Fédéral Somalien. Elle renforcera non seulement les capacités des forces de sécurité ; mais aussi, des différentes institutions de l’Etat. Cette transition répartie en quatre phases, reste limité dans le temps. Car, l’union Africaine et le Gouvernement Fédéral Somalien disposeront désormais, dès le 1er Avril prochain, d’une marge de deux ans pour relever le défi et réussir ce pari tant espéré par tout le Peuple somalien.  

Dans ce dossier, nous ne manquerons pas de rendre un hommage posthume à tous ces valeureux soldats qui ont payé de leur vie pour instaurer la paix et restaurer une sécurité durable en Somalie. Tous ces pays qui ont contribué à fournir des troupes et des unités de Police à l’AMISOM.  Leur engagement continu et les sacrifices consentis depuis 2007, date à laquelle la Mission a été déployée en Somalie, méritent d’être salués. Il s’agit, en outre la République de Djibouti, de la République du Burundi,  de la République Fédérale et Démocratique d’Éthiopie,  de la République du Kenya, de la République d’Ouganda. Durant le mandat de l’AMISOM, la République de Djibouti, à travers ses forces terrestres, a apporté une grande contribution pour la restauration de la paix et de la sécurité en Somalie. 

Dans le cadre des nouvelles missions de l’ATMIS, elle continuera d’apporter sa pierre à l’édifice et ne lâchera pas ce peuple frère somalien  jusqu’à la victoire finale.