Des magistrats du parquet de justice, des officiers de police judiciaire de la police et de la gendarmerie nationale, des gardes pénitentiaires, et des représentants d’organisations de la société civile sont en session de formation depuis hier au Sheraton. D’une durée de trois jours, ces assises studieuses sont axées sur la recherche et le monitoring des droits humains.

Le président de la Commission nationale des droits de l’homme(CNDH), Saleban Oumar Oudine, qui a ouvert les travaux de la formation, est revenu sur le statut et les missions de la CNDH. « La Commission Nationale des Droits de l’Homme de Djibouti est une institution indépendante, dotée de la personnalité juridique, créée en avril 2008 par décret présidentiel. L’idée de mettre en place cette structure chargée des droits de l’homme découle de la volonté politique du chef de l’Etat, M. Ismaïl Omar Guelleh, pour faire des Droits de l’Homme une priorité. En juillet 2014, pour renforcer les capacités institutionnelles, la CNDH a proposé d’entreprendre une reforme de son statut. L’Assemblée a adopté la loi n° 59/AN/14/7ème L du 20 juillet 2014 qui abroge et remplace le décret n° 2008-0103/PR/MJAP du 23 avril 2008 portant création de la Commission Nationale des Droits de l’Homme. La première raison qui a suscité le renouvellement du statut de la Commission est de mettre en place une institution indépendante ayant une autonomie financière, et disposant d’un mandat fort et élargit. L’expérience a montré qu’un mandat limité d’une Institution Nationale des Droits de l’Homme est souvent vecteur d’une perte de crédibilité. L’autre raison qui a motivé la reforme du statut de la commission est celle de se conformer aux principes de paris et obtenir l’accréditation auprès du comite international de Coordination (CIC) des INDH. La Commission était composée auparavant de 23 membres nommés par arrêté présidentiel. Suite à cette reforme de la commission, le nombre des commissaires a été réduite à 7 au lieu de 23 membres. Le but de cette réduction revêt à la fois le souci économique et pour la rendre plus efficace. Les commissaires sont nommes par décret et sur proposition du Ministre de la justice chargé des Droits de l’Homme, pour un mandat quinquennal renouvelable une seule fois ». Suite à ce rappel historique, le président de la CNDH a précisé que son institution «  en vue de préserver son indépendance et sa crédibilité, ne reçoit d’instruction ou d’ordre d’aucune institution étatique et ses commissaires disposent de l’immunité durant l’exercice de leur fonction pour pouvoir agir dans l’impartialité ».

Après cette entrée en matière et un tour de table qui a permis aux participants de se présenter, l’expert formateur, Pierre Robert, a évoqué les objectifs, la méthodologie et les résultats attendus de cette formation. L’occasion pour lui de balayer large sur les techniques et les méthodes de recherche et monitoring des droits humains. Il a mis en évidence les techniques de collecte d’informations, l’entrevue, les visites aux personnes détenues, le monitoring du retour des réfugiés et/ou des personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, l’observation des procès, celle des élections, le suivi des manifestations, celui des droits économiques, sociaux et culturels, le monitoring au cours de conflits armés, la vérification et l’évaluation des renseignements rassemblés, et l’emploi de ces renseignements pour faire face aux problèmes de droits de l’homme.

Qu’est ce que le monitoring ?

Il s’agit selon l’expert d’une méthode permettant l’amélioration de la protection des droits humains.  L’objectif principal du monitoring des droits de l’homme consiste à renforcer la responsabilité de l’Etat dans la protection des droits de l’homme. Cela permet aussi de jouer un rôle de prévention. Lorsqu’un fonctionnaire de l’Etat ou autre acteur responsable est observé, cette personne devient plus attentive à sa conduite.

Les organisations et les individus qui mènent le monitoring doivent situer leur travail dans la perspective générale de la protection des droits de l’homme. Ils peuvent noter des observations et réunir des informations aussi bien pour un usage immédiat qu’à des fins ultérieures. Ils peuvent communiquer ces informations aux autorités compétentes ou à d’autres organes. Il faut donc observer les événements, rassembler des renseignements et percevoir la manière dont il convient de se conduire. Mais il faut également, dans les limites autorisées par les mandats et les compétences, identifier les problèmes qui se posent, leur apporter un diagnostic, y envisager des solutions possibles, et aider à les résoudre. Certains principes comme la recherche de la consultation, le respect des autorités, la crédibilité, la confidentialité ou la sécurité constituent des aspects fondamentaux du monitoring.

La sagesse naît souvent de la discussion et de la consultation

A ce titre, il faut reconnaître que la sagesse naît souvent de la discussion et de la consultation. Dans le cadre d’un monitoring, les organisations et les individus doivent s’entretenir avec leurs agents, ou s’assurer que les consultations appropriées ont eu lieu, afin d’éviter les doublons, voire des activités potentiellement contradictoires.

L’objectif premier est de respecter le fonctionnement régulier des autorités, en reconnaître les améliorations, et tenter de trouver comment encourager toutes politiques et pratiques gouvernementales de nature à poursuivre l’application des droits de l’homme. La crédibilité est essentielle au succès du monitoring. Il doit être fait en sorte de ne jamais promettre quoi que ce soit que l’on ne soit pas en mesure de tenir, pour quelque raison que ce soit, et de vérifier l’accomplissement de toute promesse faite.

Les personnes doivent pouvoir faire confiance. Faute de quoi elles ne souhaiteront pas coopérer ni fournir des informations fiables. En s’entretenant avec des victimes ou témoins de violations, il est indispensable de se présenter et d’expliquer brièvement son mandat, de décrire ce qu’il est en son pouvoir de faire et de ne pas faire, d’insister sur la confidentialité des informations transmises, et de souligner l’importance d’obtenir une foule d’informations, si possible, dans l’établissement des faits – et par exemple, d’une violation éventuelle des droits de l’homme. 

Ce sont autant de détails techniques que l’expert a présenté aux participants de la formation.  Des présentations qui ont été suivies avec beaucoup d’intérêt et d’enthousiasme par les magistrats, les officiers de police judiciaires ainsi que les agents de la garde pénitentiaires et les représentants d’organisations de la société civile. Les échanges promettent d’être riches aujourd’hui et demain.

MAS