Comparable historiquement à la ville de Tombouctou dans le sahel, la ville de Harar considérée comme la quatrième ville sainte de l’islam a nourri l’imaginaire de nombreux voyageurs qui se sont rendus dans la corne.  Elle est certainement l’une des plus anciennes villes dans notre région et a indubitablement joué un rôle essentiel dans la diffusion de l’islam en Afrique de l’est.

Selon la légende la ville de Harar aurait été fondée par Sheikh Abadir accompagné de ses disciples venu du Hedjaz en 1216. Ville mythique par excellence, il est difficile de trancher entre mythe et réalité lorsqu’on évoque cette ville millénaire de Harar, si chère au cœur des musulmans de la corne car lieu de diffusion de l’islam dès le 13ème siècle.

La ville abrite actuellement 82 mosquées et près de 300 sanctuaires de saints. Ville classée au patrimoine mondial de l’UNESCO à cause de son architecture unique et sa culture originale mélange d’influences, africaines et arabe. Désigné sous le nom de Harar ouHarar Jugol, « Jugol » désignant les murailles de la ville. Dans l’imaginaire collectif des harari et dans la culture harari qui possèdent un fort sentiment d’attachement à la cité, les harari se définissent comme Ge Usu « les habitants de Harar » ; Ge désignant la ville. De la même manière les harari désignent leur langue par le terme Ge Sinan, « la langue de la ville », la maison harari est appelé Ge Gar et l’ensemble de leur traditions : « Ge Ada ». Cette ville sera dirigée par des rois musulmans qui vont se succéder du 15ème au 16ème siècle. Ainsi de 1520 à 1568 elle sera la capitale du royaume Harari. Cette muraille que les harari appellent «Jugol » sera construite au milieu du 16ème siècle par l’émir Nur Ibn-Mujahid.

Au cours de ce 16e siècle, la ville deviendra la capitale du sultanat d’Adal et c’est de Harar que vont partir les grandes attaques des musulmans coalisés (somalis, afars, argoba) qui vont s’opposer à l’empire chrétien d’Abyssinie. Craignant d’être submergé par les troupes musulmanes les abyssins demanderont l’aide des royaumes chrétiens d’occident. Ce sont finalement, les portugais qui vont venir à leur secours. Le plus connu de ces imams de Harar en guerre contre l’Abyssinie chrétienne est l’imam Ahmed Ibn Ibrahim Al-Ghazi (1506-1543). Cet imam revendiqué au 20ème siècle comme étant un des leurs, à la fois par les somalis, les afars !  Les exploits de Amed gragne gouray ou guura et ses troupes sont relatés et sont entrés dans la postérité grâce à un livre,« Futuh al-Habashah » écrit au 17ème siècle par un chroniqueur yéménite arabe : Sihab ad-Din Ahmad bin Abd al-Qader bin Salem bin Utman. Le livre a été traduit en français par René Basset en 1898.

Une traduction en somali a été faite à Djibouti par M. Aden Hassan Aden (notre actuel ambassadeur à Mogadiscio) et par L’historien et fin connaisseur de la littérature orale somali de formation, m. Rirache.

En 1647, avec la défaite des principautésmusulmanes contre l’empire Chrétien d’Abyssinie, l’Emirat musulman du Harar abandonne la ville soumise aux pillages des pasteurs Oromo pour se réfugier dans la région de l’Haoussa Afar en Ethiopie.

Fer de lance de l’islam en Afrique de l’est, après une période d’affaiblissement entre la fin du 17ème siècle et le milieu du 18ème siècle ; la ville reprend son essor et va devenir un important centre pour le commerce caravanier entre les hauts plateaux Ethiopiens, les autres régions de l’intérieur et les régions côtières. 

Harar constitue en même temps un important centre d’enseignement islamique et son rayonnement atteint au début du 19ème toute l’Afrique de l’est. Occupée par les égyptiens en 1875, la ville sera conquise par Ménélik en 1887 et sera désormais intégrée à L’Ethiopie.

En 1974, Harar est classée patrimoine national éthiopien puis en 2006 au patrimoine mondial de l’Unesco. Une particularité mérite d’être signalée enfin, bien qu’ayant une superficie et une population modeste, en 1991, la région de Harar, le Harargué est devenue la 9ème région fédérale de l’Ethiopie.

Et elle a exactement le même statut et les mêmes prérogatives que les 8 autres régions fédérées.