La sécurité dans la Corne de l’Afrique nécessite une Somalie stable

Dia Al-Din Saeed Bamakhrama, ambassadeur de la République de Djibouti et doyen du corps diplomatique auprès du Royaume d’Arabie saoudite

Dans la continuité des efforts déployés pour soutenir les frères somaliens et pour accompagner les réconciliations somaliennes, Djibouti a abrité les 14 et 15 juin 2020, à l’initiative et sous le patronage de son président, M. Ismail Omar Guelleh, un sommet consultatif qui a réuni le président de la République fédérale de Somalie, M. Mohamed Abdullahi Farmajo, et le président du Somaliland, Musa Bihi Abdi. Ce sommet a débouché sur la reprise des pourparlers entre les deux parties, la formation d’un comité technique pour suivre les questions en suspens, la mise en œuvre de ses résultats et la non-politisation de l’aide humanitaire et des investissements.

Il est notoire que la République de Djibouti était -et est toujours- attachée au voisinage d’une Somalie forte, sûre, stable et prospère, d’autant plus que cela a un impact positif sur la sécurité et la stabilité de toute la région et réduit le flux de réfugiés ; surtout que toutes les parties de cette région sont liées géographiquement, culturellement, humainement et économiquement.

De ce point de vue, la République de Djibouti a initié et abrité les premières conférences de réconciliation somaliennes après l’effondrement du gouvernement central somalien. En effet, deux conférences de réconciliation se sont tenues, en juin et juillet 1991, à Djibouti et ont réuni les parties au conflit à l’époque en Somalie. Il y a été convenu de former un gouvernement de transition et d’élire Ali Mahdi Mohamed président intérimaire.

Après plusieurs tournées dans le cadre des rapprochements somaliens, le président de la République de Djibouti, Ismail Omar Guelleh, a parrainé, en mai 2000, la conférence d’Arta, avec la participation de plus de deux mille personnes, pour la plupart des dirigeants de la société civile, des chefs tribaux, des politiciens et des intellectuels. Cette conférence a continué pendant plusieurs mois dans la ville d’Arta, près de la capitale, Djibouti.

La conférence d’Arta a été un tournant décisif dans la série des conférences de réconciliation somaliennes, car elle a réussi à élaborer une charte intérimaire considérée comme la pierre angulaire de la reconstruction de la Somalie. De plus elle a pu jeter les bases démocratiques et institutionnelles dansce pays, ce qui signifie que les gouvernements de transition successifs et même le gouvernement fédéral actuel sont tous des produits et un prolongement naturel des résultats de la conférence d’Arta, où Abdi Qassem Salad Hassan a été élu président de la Somalie.

Il convient de noter ici que le parrainage -par le président de la République de Djibouti Ismail Omar Guelleh- de la Conférence d’Arta en 2000 n’était pas seulement honorifique, vu que le Président était également présent en interaction avec les participants, sur la base de sa connaissance approfondie de la région et de ses peuples, déterminé et adhérant à la nécessité du succès de la conférence, au service de l’intérêt du peuple frère somalien. Les Somaliens se souviennent encore des positions du président Ismail Omar Guelleh et de son très fort attachement à la reconstruction de la Somalie en s’adressant à eux avec raison, logique et affection, jusqu’à ce que  ses yeux versent des larmes dans l’une des sessions tenues pour le bien des Somaliens, leur sûreté, leur sécurité et leur nécessaire renaissance.

En liant le dernier sommet consultatif aux précédents rounds réussis qui se sont tenus à Djibouti, en particulier la conférence d’Arta, beaucoup sont optimistes quant aux résultats du sommet, en espérant qu’il conduira au bien du peuple somalien.

D’autre part, l’instabilité au Yémen et l’incapacité de mettre un terme aux résultats du coup d’État contre les institutions gouvernementales légitimes font du Yémen un foyer d’insécurité, sachant que Djibouti est lié au Yémen, comme il est lié à la Somalie, géographiquement, humainement et culturellement. Cela nécessite, plus que jamais, la convergence de vues entre le gouvernement fédéral somalien et le gouvernement du Somaliland dans le Nord adjacent à Djibouti, afin de fermer la porte à tout différend qui pourrait attirer des ingérences extérieures non souhaitables risquant d’affecter négativement la stabilité de la région.

Les Observateurs mentionnent que, se fondant sur son rôle de pionnier dans le maintien de la paix dans la Corne de l’Afrique, la République de Djibouti a parrainé pendant plus de deux décennies de nombreuses initiatives et conférences pour aider la république sœur de Somalie à retrouver sa place. Djibouti a parrainé également des initiatives de réconciliation et des réunions non-somaliennes, telles que la Conférence des parties soudanaises qui a réuni l’ancien président soudanais Omar al-Bashir, et le chef du parti d’opposition Umma, Sadiq al-Mahdi fin 1999.

Par conséquent, la distinction de « pays de paix pour l’année 2018 » décernée par “Peace without Borders Global” à la République de Djibouti n’était que le couronnement de ses efforts et de son bilan honorable dans ce domaine et de son intérêt pour la paix, le secours aux réfugiés et leur accueil. Ceci est une ancienne coutume dont les racines remontent à il y a 40 ans.

En effet, la guerre d’Ogaden entre la Somalie voisine et l’Éthiopie en 1977 a coïncidé avec l’indépendance de Djibouti, mais cela n’a pas empêché l’État naissant de faire face à la crise et de recevoir ceux qui fuyaient le brasier de la guerre, malgré la rareté des ressources et la courte durée de vie de l’État à l’époque ; etDjibouti a réussi à maintenir la neutralité entre les deux pays voisins.

Aujourd’hui, les organisations internationales concernées ne peuvent ne pas voir les grands efforts déployés –et qui continuent de l’être- par Djibouti pour accueillir et héberger des réfugiés yéménites fuyant les guerres dans leur pays ; alors qu’il ouvrait ses bras aux frères affectés et les accueillait dans la capitale et les provinces, portant le fardeau de dizaines de milliers de personnes déplacées.

Étant donné la situation géographique unique de la République de Djibouti, qui surplombe le détroit de Bab al-Mandab, qui est extrêmement important sur le plan politique et économique, elle joue un rôle très important dans la protection de la sécurité et de l’économie internationales. Elle joue ce rôle grâce à sa coopération avec les grandes puissances les plus importantes du monde et à son appartenance à plus d’une organisation régionale importante, tels que l’”IGAD”, le “COMESA” et le Conseil des États arabes et africains bordant la mer Rouge et le golfe d’Aden, dont la charte a été signée au début de cette année à Riyad sous le gracieux patronage du Serviteur des deux saintes mosquées, le roi Salman bin Abdulaziz. C’est là l’une des idées ambitieuses de Son Altesse le Prince héritier Mohammed bin Salman, pour créer une organisation de développement politique au service de la paix, de la sécurité et de la prospérité dans la région, dans le cadre des efforts saoudiens appréciés et en parfaite harmonie avec le rôle de premier plan que joue Djibouti dans le maintien de la paix et la sauvegarde de la sécurité internationale dans un environnement instable. En plus de cela, les relations historiques solides entre les deux pays frères se répercutent positivement sur tous les domaines de coopération, sur la base d’un consensus dans les visions politiques des dirigeants des deux pays à propos de nombreux dossiers politiques.