Il est jeune. Un passionné de lecture et d’écriture. Mohamed Ahmed Issa  alias Aboyta vient de publier son premier recueil de poème intitulé « Salines’.  Selon lui  le titre renvoie bien sûr à la salinité, au sol du pays, à la mer et au sel “l’or blanc de Djibouti”. La mer est très présente dans ce recueil.  Interview d’un  jeune talentueux dont l’écriture promet déjà.

Dans un premier temps, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Merci de m’avoir donné  l’occasion de me présenter à vos  lecteurs. Je m’appelle Mohamed Ahmed Issa dit Aboyta. Je suis enseignant de lettres dans un lycée et je suis très actif dans le milieu associatif. Je suis né en 1986 à Wakir une localité située à quelques kilomètres du village de Randa. J’ai fait ma scolarité à Tadjourah-ville. Puis des études superieures à l’université de Djibouti. Je suis actuellement Doctorant en sciences du langage à l’université de Montpellier III sous la direction du Professeur Bruno Maurer.

Qu’est ce qui vous a poussé à l’écriture ?

L’écriture est une activité quotidiennne pour moi. J’écris chaque jour, j’écris toujours. Parmi les raisons qui m’ont poussés  à l’écriture, il y a la lecture. Lire est la porte qui mène à écrire. Les deux activités sont liées comme les deux faces d’une même page. L’écriture est aussi une affirmation de soi, une manière d’exister, de signer sa présence. L’écriture est pour moi, ce qui me caractérise. Une volonté de partager avec les autres, ma conception de l’homme et du monde. Une passion à laquelle je suis attaché depuis ma tendre enfance.

Comment devient-on écrivain ?

En s’affranchissant de toutes les contraintes. Pour écrire ou mieux encore, pour créer, il faut être soi-même. Il faut chercher à s’affirmer. A être original même si, bien sûr, on a des auteurs que l’on admire et qui nous ont poussés à écrire. Ensuite, l’écrivain a une mission qui est d’influencer ses lecteurs, ses contemporains. Il peut être un modèle de référence, un guide comme le disait Hugo.

Mais, ce qui le caractérise le plus c’est la liberté de penser et d’exprimer ses pensées. Devenir écrivain est un acte, une décision qui engage celui qui s’y met, à s’exposer au public présent et à venir. On devient alors atemporel, universel. On s’intègre dans la continuité des écrivains qui avaient écrit avant nous et ceux qui écriront plus tard.

Parlez-nous de votre recueil Salines. Pourquoi le choix de ce titre ?

Salines est un recueil de poèmes qui se divise en deux sections: Airs marins et Nostalgies. Le titre renvoie bien sûr à la salinité, au sol du pays, à la mer et au sel “l’or blanc du pays”. La mer est très présente dans ce recueil. C’est ce qui fait notre grandeur. La mer symbolise l’ouverture, l’échange et la poésie en elle-même. Salines c’est aussi un hommage à mes artistes préférés, plus particulièrement à Abdallah Lee et ses créations artistiques et musicales au Théâtre des Salines. C’est donc un hommage à l’art en général.

Quel accueil, le public djiboutien a t il réservé à votre œuvre ?

L’œuvre a été publiée au Canada par une très jeune maison d’édition Soleil Levant. L’accueil réservé a été bon. Des encouragements et des mots de soutien me sont parvenus de partout. Je peux dire que pour un début ce fut un grand succès. J’ai pu profiter de l’occasion pour prendre parole en public et me frayer un chemin dans ce sentier. J’ai aimé l’attention que les jeunes accordent à la lecture et aux livres surtout par le biais des réseaux sociaux. Un vrai régal pour le tout début et l’entrée dans ce monde passionnant de la littérature. Quels sont les thèmes qui sont dominants dans votre recueil ?

Je traite de plusieurs thématiques, mais j’ai centré mon œuvre autour des thèmes comme le pays, l’oralité, la culture nationale, l’attachement à la patrie, l’amour ect…. Pour moi, la poésie est une arme contre toutes formes d’oppression, toutes formes d’ignorance et d’obscurantisme. Le poète est investi d’une mission, il doit se faire le porte-voix des plus jeunes, de leurs aspirations, de leurs rêves, de leurs volontés. La poésie est aussi une voie privilégiée d’expression des sentiments dans nos cultures. Les Royans, kassow et gabay doivent être revus, reinterpretés sous d’autres formes et langues. Le fonds de la poésie d’expression française reste les langues et cultures nationales.

Qu’attendez vous des instances étatiques en matière de promotion du Livre et de l’auteur ?

Je crois que la première de chose est de permettre aux auteurs, surtout jeunes de pouvoir publier, d’être édités et lus. Pour ce qui est de la publication, une nouvelle et jeune maison d’édition vient d’être lancée ici à Djibouti, il s’agit de l’édition Le Francolin dont il faudra appuyer les initiatives.

Ensuite, il y a la question de la taxation des livres. Quand mes livres sont envoyés vers Djibouti, je dois payer la taxe et cela fait que les livres deviennent chers. Nous demandons à ce que les livres soient exonérés et que la promotion des auteurs soit instituée dans la politique culturelle du ministère de la Culture. Le livre est un véritable outil pour lutter contre l’illettrisme, la baisse du niveau des élèves qui est annoncée partout. On doit en faire aussi une passerelle entre nos cultures, nos peuples et le monde qui nous entoure. Promouvoir le livre c’est promouvoir les savoirs et c’est la voie du salut pour un monde apaisé. Nous nous attachons à ce que l’objet-livre

Nous nous attachons à ce que l’objet-livre soit valorisé, partagé et échangé même dans l’arrière pays. Les écoles rurales et les centres de développement communautaire doivent être dotés des vraies bibliothèques. Le vrai combat de l’écrivain est contre l’illettrisme et l’ignorance. Des bibliothèques pour tous et des savoirs pour tous.

Quels conseils donneriez-vous à la jeune génération?

Je conseille aux jeunes de lire. C’est la seule manière de s’épanouir, de se former et se forger. La lecture doit être une activité quotidienne et quasi régulière. Celle-ci est une injonction divine “Lis” est le premier verbe du Coran. Alors, on doit influencer les jeunes générations à lire, sur internet comme dans les livres et selon leurs préférences et leurs goûts.