Avec les changements d’orientation politico-économique opérés par le Gouvernement cette dernière décennie, le marché national du travail s’est ouvert considérablement aux investissements et prestations de service internationales dans différentes activités. Cette évolution n’a pas manqué bien sûr de favoriser l’installation de nouvelles entreprises (nationales et internationales) aux pratiques managériales parfois controversées.  Ces nombreuses mutations de l’environnement du travail ont aggravé la méconnaissance plus ou moins générale des textes déjà constatée tant chez les travailleurs que chez les employeurs. Elles ont mis en évidence la nécessité notamment d’élaborer et d’éditer un ouvrage pratique sur le droit social djiboutien destiné à combler ces déficits de connaissance juridique, sources potentielles d’insécurité juridique.  C’est le défi qu’a réussi à  relever l’auteur  de l’ouvrage intitulé  « Droit du travail et de la sécurité sociale en République de Djibouti», Ilyas Said Wais, maître de conférences à la Faculté de Droit et d’Economie Gestion de l’Université de Djibouti où il enseigne actuellement. 

Les autorités publiques djiboutiennes ont entrepris ces dernières années d’importants efforts législatifs visant d’une part à « corriger » certaines mesures de flexibilisation, sources de précarité, prises à la fin des années 90 sous l’injonction des bailleurs internationaux et d’autre part à mettre en conformité la réglementation du travail avec les conventions internationales ratifiées, notamment celles de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). On pourrait citer, à titre de mémoire, la révision en 2011 et 2018 du Code du travail dans sa mouture initiale (simplification de la procédure de création des syndicats, allègement des conditions d’accès aux fonctions de dirigeants syndicaux, réintroduction du salaire minimum interprofessionnelle, limitation des conditions de renouvellement du CDD etc.) et les récentes réformes intervenues en matière de sécurité sociale (mise en place de l’Assurance maladie universelle, rapprochement des régimes de retraite dans un souci d’équité, extension des prestations familiales etc.).

Cet ouvrage  poursuit, en réalité, deux objectifs précis. Tout d’abord, il vise à contribuer à la diffusion et à la connaissance des nouveaux instruments juridiques intervenus en Droit social djiboutien sans omettre ceux déjà existants. Il tend à répondre modestement à des besoins urgents de documentation maintes fois exprimés, depuis longtemps déjà, non seulement par l’Administration du travail, en l’occurrence, par les inspecteurs et contrôleurs du travail, les organisations syndicales, tant ouvrières que patronales, et certainement par les magistrats, les avocats et autres auxiliaires de la justice. L’expérience que nous avons du monde du travail montre que la satisfaction de ces besoins de documentation constitue les conditions nécessaires pour une meilleure gestion équilibrée des relations de travail et pour l’éclosion d’un environnement national de travail caractérisé par la diminution des conflits et l’accroissement des rendements.   Ensuite, cet ouvrage s’inscrit pleinement dans le cadre de l’amélioration de la sécurité juridique, et partant du climat des affaires en République de Djibouti (RDD) visé par les documents stratégiques du Gouvernement. En effet, de tels documents font régulièrement la corrélation entre sécurité juridique, impératif de protection contre les risques résultant des difficultés d’accès au droit et la qualité de l’environnement des affaires. Ce faisant, ils s’inscrivent dans le sillage de nombres études, nationales et internationales qui ont pu démontrer que le défaut de sécurité juridique influe sur l’état de droit, ce qui a pour conséquence de freiner les investissements, et partant le développement socio-économique d’un pays.

Enfin, dans un autre registre, cet ouvrage répond à la contextualisation des enseignements prônée  par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche même si, dans ce domaine, les progrès accomplis demeurent largement insuffisants, notamment du fait de l’indigence des moyens alloués. 

Pour atteindre ces divers objectifs, une méthodologie fondée sur deux axes a été choisie par l’auteur : tout d’abord, en sus d’un rappel quasi exhaustif des références législatives et réglementaires, il est fait appel à l’appui et au concours de la jurisprudence nationale, notamment à cause du rôle déterminant de celle-ci dans la compréhension des multiples interprétations possibles desdites références. Ensuite, un grand nombre d’analyse ou de questions soulevées dans le présent ouvrage ont pu trouver réponses grâce au concours des praticiens du droit (magistrats, avocats, inspecteurs et contrôleurs de travail, etc.) et sur la base des rares rapports d’activité émis par les organes de contrôle des droits des travailleurs. Vous l’aurez compris, le droit social ne se résume pas à la connaissance des textes. Encore faut-il être capable de constater, au-delà des textes et du contrat formel, la réalité concrète vécue par les acteurs du marché du travail. 

Sachons gré à Dr Ilyas Said Wais de publier le présent ouvrage, qui nous laisse entrer de la meilleure des façons dans une compréhension à la fois approfondie et concrète du droit social djiboutien.