Économiquement, le secteur informel représente pour l’État un manque à gagner en impôts et en taxes car c’est un domaine qui regroupe un ensemble diversifié d’activités économiques, d’entreprises, d’emplois et de travailleurs(ses) qui ne sont pas réglementées ou protégées par l’État. Le concept s’appliquait à l’origine au travail indépendant dans les petites entreprises non enregistrées. Il a été élargi pour inclure l’emploi salarié dans les emplois non protégés.

A Djibouti, l’économie informelle se développe dans de nombreux contextes, apparaissant dans de nouveaux endroits et sous de nouvelles formes. Elle joue un rôle important dans l’économie du pays et plus particulièrement dans la réduction de la pauvreté et des inégalités. Les domaines d’activité eux-mêmes sont très variés: bâtiment, agro-alimentaire, transport, vendeuses de khat, réparation automobile (auto-garage, réparation pneus) écrivain public, coiffure, réparation chaussures..etc. L’activité informelle la plus répandue et visible dans nos rues est la vente du Khat et l’alimentation sous toutes ses formes (légal ou illégal), la restauration, et la vente au détail de produits frais ou préparés.

Auparavant, dans les années 80 et 90, en termes de structure, le commerce était concentré dans les centres commerciaux et les deux marchés publics uniques du pays (Marché de Q6 et celui de la Place Mahmoud Harbi).Or, ce n’est qu’en 2000 qu’elles se sont déplacées vers les quartiers périphériques de la capitale et encore plus dans les quartiers de Balbala.

A Djibouti comme bon nombre de pays émergents, le nombre des commerçantes de rues abonde et s’approprie l’espace public provoquant un encombrement complexe à la circulation des piétons et automobiles. Ils représentent une gêne pour les riverains et accélèrent la détérioration des chaussées et trottoirs et par conséquent accentuent la fragilité des structures de la voirie. C’est le cas des vendeuses ambulantes siégeant en face de l’Hôpital Peltier et celles de la ruelle se situant entre les trois organismes autonomes de l’Etat dont l’EDD, la CNSS et l’ONEAD. Et pourtant, la police a entamé maintes fois contre ces commerçantes ambulantes des chasses énergiques, mais en vain, elles reviennent toujours envahir de nouveau les trottoirs de cette petite ruelle stratégique et fructueuse.

Aussi, le gouvernement prend rapidement toutes les mesures d’accompagnement pour formaliser ces informels et solutionner leur problème en leur procurant le moyen d’exercer leurs activités sans gêner la circulation.

Et cela entre dans le cadre de la politique de l’Etat de lutter contre la pauvreté généralisée et de favoriser la permutation du commerce informel dans une économie structurée et formelle. Ainsi, l’Etat met à la disposition de ces commerçants une édification d’infrastructures appropriées à leurs tâches spécifiques où ils sont transférés, conformément à la Loi 

N° 162/AN/16/7ème L  relative à l’application de la politique de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale. Par conséquent, ils seront assujettis au contrôle administratif de l’Hôtel des Impôts et celui du service hygiène pour la question sanitaire. Le secteur informel se caractérise par leurs conditions d’activité très précaire : locaux inadaptés, non accès aux principaux services publics (eau, électricité, téléphone). De plus, les emplois informels souffrent d’une faible rémunération et de l’absence de protection sociale. Les normes légales qui régissent la durée du travail n’existent pas dans le secteur informel. Selon Amina Ahmed, une femme d’un âge avancé qui détient un commerce de restaurant près de la CNSS/EDD depuis plus de 15 ans, elle nous a informe que la vente de repas sur la voie publique est un moyen important de se procurer un revenu minimum qui leur permet de nourrir à coût réduit leur famille.

Or, le secteur informel offre un emploi et un revenu à beaucoup de personnes et englobe un nombre particulièrement élevé de femmes, de jeunes et d’autres catégories défavorisées. On estime par exemple, selon le Ministère de commerce que l’emploi informel représente 74 % de l’emploi des femmes.

Impact sur le développement économique. Le taux de productivité est faible pour un niveau élevé d’informalité c’est-à-dire que dans les entreprises informelles, la rémunération des travailleurs est inférieure de 19% en moyenne à celle des salariés du secteur formel, les disparités des salaires deviennent négligeables en raison de faible niveau d’éducation, du manque d’expérience des travailleurs informels.

On distingue également dans le secteur informel, d’énormes difficultés de développement comme par exemple une plus grande pauvreté accrue, des revenus par habitant plus faibles, des progrès plus lents sur les objectifs de développement durable, des inégalités plus prononcées et des investissements moins importants. Environ un quart (26 %) de la population informelle vit dans l’extrême pauvreté avec un taux de pourcentage inférieur  à 1,90 dollar par jour (200 FD).

Transition vers une économie formelle. Le gouvernement par le biais de son Ministère de Commerce à pleine connaissance qu’à long terme, l’activité informelle n’est pas la solution pour éliminer la pauvreté. Les pays dont le revenu par habitant est le plus élevé sont aussi ceux où le secteur informel est le plus réduit. Autrement dit, le commerce informel peut apporter des réponses de court terme aux ménages djiboutiens mais ne contribue pas à l’éradication et à la réduction de pauvreté.

Pour promouvoir et formaliser toutes les activités informelles, l’Etat a pris toutes les dispositions nécessaires en adoptant plusieurs projets dont :

–  La Microfinance

–  La constitution d’une société commerciale

– .etc..

La Microfinance

L’approche novatrice des institutions des Microfinances constitue avec ses crédits et ses dépôts  un des éléments cruciaux de l’économie formelle.

La microfinance s’adresse à un public spécifique, en situation plus ou moins nette d’exclusion. L’Etat la défini ainsi comme un accès au financement de petits projets, portés par des personnes marginalisées qui aspirent à créer leur propre emploi. Elle regroupe plusieurs types d’outils, tels que le microcrédit, la garantie bancaire, le prêt d’honneur.

A Djibouti, la microfinance est apparue dans les années 2000, et s’adresse essentiellement à l’ensemble des personnes exclues du système bancaire, aux chômeurs et plus généralement aux commerçantes informelles des rues . L’attribution du microfinancement, assortie d’un accompagnement est censée assurer une réinsertion dans l’économie, et garantir un accès au crédit bancaire classique. Cet outil est rapidement devenu un instrument de politique publique pour la lutte contre le chômage et la promotion de l’auto-emploi et contre l’impact du travail non déclaré.          

La création d’une société à forme juridique. Selon Mr HIBA directeur du Ministère de Commerce impose à tout entrepreneur ou homme, femme d’affaires de formaliser  leurs activités dans la création d’une société commerciale (SARL, SA..etc..) certifié et authentifié par le service public ODPIC, car l’entrepreneur évoluant dans l’informel est un risque pour tout le monde.

Personne ne voudrait traiter avec un partenaire qui du jour au lendemain va disparaître dans la nature ! Il est donc temps que les entrepreneurs de l’informel migrent vers le secteur formel afin de bénéficier des avantages liés au secteur formel reconnu par les administrations et les organismes de financement.

La politique innovante du gouvernement est de faciliter la transition des travailleurs et des unités économiques de l’économie informelle vers l’économie formelle, promouvoir la création d’entreprises et de cibler les catégories difficiles à atteindre, comme les travailleurs indépendants, le micro et petites entreprises, pour faciliter leur transition vers l’économie formelle.

Il existe une corrélation entre le pouvoir de l’État et l’importance du secteur informel. Un État fort et stable doit être un État capable de pouvoir étendre son contrôle sur l’ensemble du territoire, et l’ensemble des secteurs. Il doit être omniprésent par ses différentes structures administratives, techniques, policières, douanières, fiscales et ces structures sont parfois impliquées dans le maintien du secteur informel.

Toutefois, le développement du commerce d’un pays est le reflet de sa croissance économique et humaine, acheminant notre Etat vers la voie de l’intégration à l’économie mondiale.

Saleh Ibrahim