C’est un combat que l’on pensait presque gagner. C’est des pratiques qui semblaient être vaincues. Mais qui malheureusement sévissent toujours. Les Mutilations Génitales féminines (MGF), ces pratiques d’un autre âge ont des beaux jours sous nos cieux. Malgré la campagne intense pour les éradiquer  qui avait commencé au début des années 80 et qui durant deux décennies a mobilisé tout le monde, les petites Djiboutiennes subissent toujours ces atrocités.  Jeudi dernier, à la « conférence internationale sur le changement social et évolution des relations de genre dans la corne de l’Afrique » qui s’est tenue au Centre pour le  Leadership et l’Entreprenariat (CLE), les statistiques dévoilées par le docteur Fozia Hassan Osman, pédiatre, ont fait froid dans le dos. Plus de 60% des petites filles ont connu l’excision sous sa forme la plus sévère.  Et chaque jour que Dieu fait, dans son cabinet, elle consulte des jeunes filles  qui souffrent des conséquences de ces pratiques (Infections,  kystes,  douleurs urinaires, détresse psychologique etc… ). L’assistance  est tombée des nues lorsque la pédiatre a déclaré que même des médecins et des infirmières pratiquent les MGF. Quand ceux qui étaient censés lutter contre ces barbaries sont même les principaux acteurs,  alors on n’est pas sorti de l’auberge.

Pourtant,  la lutte contre les MGF a été intense et s’est inscrite dans la durée. L’Union Nationale des  Femmes Djiboutiennes (UNFD) est pionnière dans ce combat.  C’est au début des années 80 qu’une campagne avait commencé afin de conscientiser les Djiboutiens sur la dangerosité de ces pratiques qui ne sont point fondées sur notre religion et la sunna.   Les leaders communautaires, les religieux et la population toute entière  ont été sensibilisés. Ateliers, conférences internationales sur notre sol, spots à la radio et télévision, tous les moyens ont été utilisés. Le ministère de la santé, à travers sa direction de la santé de la reproduction,  avait mobilisé les gros moyens. Pour dissuader  la population contre ces pratiques un arsenal législatif a été élaboré  dont entre autres  le fameux article 333  du Code pénal stipulant que : « Les violences ayant entrainé une mutilation génitale sont punies de cinq ans d’emprisonnement et de 1.000.000 FD d’amende. ».  Des cérémonies  publiques de dépôt  de lames, couteux et  ciseaux des exciseuses étaient organisées. Il fallait organiser des stages de réorientation  vers d’autres métiers pour  ces femmes qui faisaient de ces pratiques leur gagne-pain.

La société civile a fait aussi sienne ce combat contre les MGF. L’ADEPF, Solidarité Féminine,  Atu Yo Fan, les associations nationales  s’étaient toutes  mobilisées pour dire que nos petites filles ont droit à un corps complet.

Mais ce n’est que peine perdue, malgré tous ces efforts,  la pratique des MGF perdurent. Pour réaliser leur  forfait, certaines familles optaient pour les pays limitrophes où  ces pratiques ne sont nullement interdites.  D’autres les  pratiquent toujours sous nos cieux dans l’indifférence la plus totale et ne sont nullement inquiétées.

Il est temps de crever l’abcès pour amorcer des changements de comportement vis-à-vis de ces pratiques néfastes.  La lutte contre les MGF : un combat qui n’en finit pas ! Il faut rectifier le tir et remobiliser les troupes. 

Kenedid Ibrahim