Dans la recherche de la modernisation et de l’efficacité pour servir le pays dans ses ambitions de devenir un hub logistique et commercial de renom, à la porte de l’Afrique, la douane djiboutienne a lancé l’initiative de refonte de son système pour non seulement être à la pointe des nouvelles technologies mais aussi accompagner la vision d’avenir des autorités gouvernementales du pays. Car, chacun doit apporter sa pierre à l’édifice, selon le charismatique DG de l’institution douanière. Dans cette optique, un plan stratégique de la douane est en cours de finalisation. Le document est réalisé avec l’assistance technique du FMI METAC (Middle East Technical Assistance Center). Pour en savoir plus, nous sommes allés à la rencontre de l’expert en affaires fiscales mandaté par le Fonds monétaire international pour prêter main forte à la douane djiboutienne.

M. Richard Chopra en est à sa troisième mission à Djibouti dans le cadre du soutien apporté par le centre d’assistance technique pour le Moyen-Orient (FMI METAC).

L’entrevue avec la presse s’est déroulée en présence du Directeur général de la douane, M. Gouled Ahmed Youssouf, et son conseiller, M. Abdourahman Awad Izzi.

– Interview réalisé par Fahim Ibrahim Ali –

La Nation : Vous êtes à Djibouti pour accompagner la douane dans l’élaboration de son plan stratégique. Pouvez-vous nous en donner un bref aperçu ?

M. Richard Chopra : Au fait, le plan stratégique de la douane djiboutienne se décline en quatre axes.

En premier lieu, la mission primaire de la douane se rapporte à la collecte des recettes. Donc, le plan stratégique a identifié le 1er axe qui s’appelle « Administration fiscale » avec un objectif stratégique très clair : comment optimiser la collecte de la recette ? Quand on parle d’optimisation, on ne parle pas juste de faire plus de recettes mais aussi de l’efficacité des efforts et de l’efficience des efforts de collecte de recettes. Donc, comment limiter les déperditions fiscales et comment augmenter la recette en même temps ? Tout cet axe là se focalise sur la collecte des recettes.

L’axe 2 du plan stratégique, lui, se focalise sur la facilitation des échanges, le civisme fiscal et le partenariat. En un mot, c’est comment aider le secteur privé à mieux se conformer à la réglementation douanière, comment faciliter les échanges au niveau des autres pays limitrophes… Sous cet axe là, nous avons plusieurs objectifs. Ce sont des objectifs de civisme fiscal, de partenariat, de prévisibilité et d’accélération de tout ce qui est transit. Cela passe aussi par une digitalisation des procédures. 

A savoir que l’axe 2 du plan stratégique a son importance, du fait que pour être un hub régional, Djibouti a ratifié de nombreux accords et conventions dont l’accord de facilitation des échanges de l’Organisation mondiale du commerce, la zone de libre échange continental africaine et Djibouti fait aussi partie de la COMESA et de  l’IGAD. Donc, au regard de tout cela, il y a une obligation à faciliter les échanges, notamment en transit. Cela concerne également la transparence et la visibilité des échanges.

L’axe 3 du plan stratégique est consacré au contrôle des frontières. C’est-à-dire le contrôle des produits illicites (drogues, produits de contrebande de khat, alcool, cigarettes…). En partenariat avec les autres agences à la frontière, la douane a un rôle très important à jouer ici.

Ainsi, l’axe 3 est focalisé sur la sûreté et la sécurité. Et sous cet axe, on se rend compte qu’il y a des efforts supplémentaires à faire. Notamment, il faut mobiliser les bailleurs de fonds pour avoir du meilleur équipement. La douane est certes bien équipée, mais on peut encore renforcer les équipements des brigades mobiles notamment. Et il faut renforcer le système de gestion des risques pour un ciblage encore plus efficace.

Enfin, l’axe 4 se rapporte au capital humain. Comment la douane peut mieux valoriser son capital humain. Comment la douane peut avoir un développement organisationnel encore plus important. Dans l’axe 4, il s’agit d’audit interne, de digitalisation des processus,  de la communication de la douane…

En parlant de digitalisation, doit-on comprendre que le numérique figure en bonne et due place dans ce plan stratégique de la douane ?

La part du numérique est très importante. La douane djiboutienne est une douane leader au niveau même de la région, en ce qui concerne la numérisation.

La douane a fait d’énormes progrès en ce qui concerne le transit. C’est-à-dire le passage de la marchandise, notamment de Djibouti vers l’Ethiopie. Au fait, la déclaration en douane de transit, via Djibouti et vers l’Ethiopie,  met 5 secondes pour être répercutée dans le système éthiopien.

En fin de compte, concernant la digitalisation, les efforts seront encore accentués car il y a la continuité  des développements au sein du Sydonia Word, qui est le système d’information de dédouanement. Il s’agira ici de rajouter des modules, de continuer les inter-passages tant avec les agences maritimes et aériennes qu’avec les autres partenaires de la douane et d’intégrer dans les prochaines années tout ce qui est intelligence artificielle et apprentissage de la machine.

Dans l’élaboration de ce plan stratégique, quelles sont les avancées ? Concrètement.

Nous sommes presque à la finalisation du plan stratégique, je pense que c’est une question de semaines. On a pu décliner ce plan stratégique en programme de modernisation. C’est-à-dire que dans le plan stratégique, c’est la vision du futur finalement. Le programme de réforme c’est ce qui va permettre à la douane d’atteindre cette vision. Aussi, dans ce plan stratégique décliné en programme de modernisation, il y a déjà des projets prioritaires qui ont été identifiés et qui ont déjà commencé. C’est-à-dire que la douane djiboutienne est dans une logique de refonte du Code des douanes, le FMI METAC va la soutenir dans les prochaines semaines sur cet axe. Aussi, il y a ce qu’on appelle la transposition  SH. C’est tout ce qui est classement tarifaire.

Grâce à ce plan stratégique et ce programme de modernisation, la douane djiboutienne a pu mobiliser l’organisation mondiale des douanes pour la soutenir dans ce travail de transposition SH.

Le soutien du FMI METAC s’arrête-t-il seulement à l’assistance technique apportée à la douane dans l’élaboration du document ou va-t-il aussi se poursuivre dans la mise en œuvre de ce plan stratégique ?

Effectivement, le FMI METAC soutiendra encore la douane djiboutienne sur plusieurs éléments du plan stratégique. C’est une douane qui est assez performante et qui peut voler de ses propres ailes, certes. Mais, elle aura sûrement besoin d’une assistance technique, surtout pour organiser une table ronde des donateurs à l’automne prochain afin de mobiliser tous les partenaires techniques et financiers sur ce programme de modernisation. Il y a aussi deux projets sur lesquels le FMI METAC va continuer à soutenir la douane, en plus de la réforme de gouvernance stratégique : c’est la refonte du Code des douanes et l’optimisation du cadre organique de la douane. Quand on parle de cadre organique, c’est l’organigramme de la douane.

Le mot de la fin ?

Oui, et c’est peut-être le mot du début, si je me permets.  Dans ce qu’on appelle la conduite du changement, il y a deux citations dont je voudrai vous faire part. Churchill disait : il vaut mieux prendre le changement par la main qu’attendre qu’il nous prenne par la gorge. Et l’autre citation dit : il vaut mieux penser le changement que changer le pansement.  Le changement est là. Le changement arrive.

Et j’adresse mes félicitations au ministre, au secrétaire général et au directeur général de la douane et à son équipe pour avoir cette volonté de préparer le futur à travers ce plan stratégique et ce programme de réforme.

C’est juste des mots de félicitations au DG de la douane et son équipe pour avoir eu l’initiative d’approcher le FMI METAC afin de consolider cette vision stratégique et avoir toute l’assistance technique nécessaire pour vraiment réaliser ces ambitions.