
Saïd Ismail Hassan alias Caoutchouc est le président de la fédération Djiboutienne d’Athlétisme depuis quelques années. Un homme posé et qui est passionné de sport depuis sa jeunesse. Il était connu en tant que haut cadre du ministère du Budget dont il a occupé d’importants postes Dans l’interview qui suit, il nous parle des préparatifs pour les JO de Paris et la situation de l’athlétisme djiboutien ainsi que ses perspectives d’avenir.
Monsieur le Président, une question à brûle-pourpoint : d’où vous provient le surnom “Caoutchouc” ?
Beaucoup de djiboutiens connaissent mon surnom “Caoutchouc” qui vient du sport. En fait c’est dans l’épreuve du grimper de corde que j’excellais lors de l’EPS au collège J’étais tellement collé à la corde que ce sobriquet a jailli de la bouche d’un de mes camarades de classes et depuis c’est mon surnom.
Il faut rappeler que durant ma jeunesse je pratiquaisl ’athlétisme dans les années 80, je faisais le 800m, 400m, le 1500m, et je faisais partie des meilleurs de l’équipe nationale. Après avoir décroché mon BAC, je suis partie en France et abandonné le sport.
A mon retour je suis devenu cadre de l’administration et au ministère du budget où j’ai occupé de grands postes de responsabilité. J’ai renoué avec le sport avec l’intervention d’un ami de la fédération djiboutienne de football qui s’appelle Youssouf Ahmed alias Youfto , c’est l’ actuel secrétairegénéral de la fédération djiboutienne de football. C’est lui qui est venu nous voir, moi et mes amis Mohamed Ahmed sheikho, Abdi et Saïd khairehà Balbala. Il a discuté avec nous, en nous disant que la fédérationd’athlétisme est en traind’agoniser et qu’il faut prendre le flambeau.
« Vous êtes des cadres, des anciens athlètes, pourquoi vous ne prenez pas le relais et au moins donner quelques heures de votre temps à votre pays, pas seulement en tant que directeur ou cadre dans la fonction publique, mais dans l’encadrement du sport. », nous a-t-il lancé avec insistance. On s’est mis d’ accord et on s’est présenté à l’élection au sein de la FDA. Mon ami sheikho a été élu président de la FDA en 2009 et l’a dirigé jusqu’à 2017, tandis que j’occupais le poste de vice président à l’époque et porte-parole de la fédération. En 2018, M.Sheikho est tombé malade, je me suis dit, il ne faut pas abandonner la fédération mais continuer le combat. Àl’époque on arrivait à un niveau ou on ne se qualifiait pas du tout ni aux jeux olympiques ni au championnat du monde. Chaquefois, on avait deux athlètes pris en charge par la solidarité olympique pour sauver les meubles. L’essentielle c’était de participer aux jeux.
En ce qui concerne le semi-marathon, au débutlorsque nous sommes arrivés à la tête de la FDA, on se classait à la 11ème et 9ème place. Aujourd’hui nous avons de bons athlètes capables de faire la différence et qui peuvent apporter des médailles au pays. Pour arriver à ce stade, nous avons entrepris une large campagne de détections de talents partout dans le pays. Nos efforts ont payé et nous sommes rapidement montés jusqu’à la deuxième et première place dans les différentes compétitions Nos bons résultats nous ont poussé à l’optimisme et à continuer nos efforts pour le redressement de l’athlétisme nationale Depuis 2018, je dirige cette fédération et j’ai été réélu en novembre 2022 pour un mandat de 5ans qui nous pousse moi et mon équipe à intensifier nos efforts pour hisser encore plus haut l’athlétisme djiboutien
Ces trois dernières années ont été déterminantes ?
Vu le niveau que nous avons atteint aujourd’hui, il y a une grande différence, ainsi tous les Djiboutiens peuvent constater l’évolution, rien que lorsqu’on jette un regard sur les trois dernières années, nous avons gagné plus de 100 médailles dans les différents championnats arabes. On est toujours sur le podium dans les jeux africains ainsi que les jeux de la francophonie. En terme de participation, notre problème, c’est que nous sommes un petit pays, nous n’avons pas beaucoup de licenciés à Djibouti capable de rivaliser avec les autres pays.Nous avons 300 licenciés, mais seulement 20 d’entre eux sont capables de concourir avec les grands athlètes Ethiopiens et kenyans.
À titre d’exemple les éthiopiens et le kenyan ont 60.000 licenciés, donc vous voyez la différence. Mais avec les vingt au top que nous avons, notre objectif, c’est d’arriver à un bon niveau et de monter sur le podium tout en ayant des athlètes capables de faire la différence dans les grandes rencontres.
“ Aujourd’hui nous avons de bons athlètes capables
de faire la différence et qui peuvent apporter des médailles au pays. “
Monsieur le Président sur quoi la FDA se focalise-t-elle concernant la préparation de nos athlètes aux jeux olympiques de Paris ?
Je pense qu’on a apporté énormément de choses, beaucoup de changement dans la manière de s’entrainer, la formation des entraineurs nationaux. Chaque année nous envoyons au centre de formation de Dakar des entraineurs Djiboutiens dans les disciplines du saut en longueur, du saut en hauteur et les examens de dopage.
Doncnous formons beaucoup d’athlète et des managers pour notre fédération. L’objectif pour nous c’est que nos athlètes réalisent des meilleurs temps. Pour cela nous avons organisé le semi-marathoninternational de Djibouti, donc on s’est dit dans un premier temps organiser un meeting international à la place du semi-marathon de Djibouti pour que nos athlètes puissent se mesurer avec les grands compétiteurs dans ce domaine. C’est un constant exercice pour eux. Cela a permis à nos athlètes d’avoir au moins du temps visible pour le manager et les organisateurs de compétition. Chaque meeting demande une compétence et on a continué toujours dans ce sens-là. En 2021 nos meilleurs athlètes étaient blessés à l’exception, Ayanleh et Zora qui étaient en forme. Après ce petit pépin des athlètes, la population Djiboutienne s’est posé des questions sur l’athlétisme et sur le sport en général. Aujourd’hui, on s’est dit la vérité, l’athlétisme rapporte énormément des médailles à notre pays.
Par la suite on a organisé un débat de réflexion au palais du peuple sous le leadership du comité olympique dirigé par Mme d’Aicha Garad. Après ça, on s’est posé des questions, comment progresser à l’ avenir pour trouver des managers, un budget et c’est à partir de là que le président de la République a donné l’accord à une subvention pour le sport « la subvention IOG ». Ce qui a permis aux athlètes Djiboutiens d’ atteindre, l’ excellence , non seulement , ils ont le soutien du Président de la République mais ils ont également un centre d’ entrainement , un médecin et un manager éthiopien qui entraine au quotidien. Tout ça pour vous dire qu’on a obtenu des bons résultats.
Les perspectives que nous espérons, ce que déjà on a trois athlètes qui sont qualifié pour les championnats du monde junior qui auront lieu à Lima au Pérou en mois de septembre prochain .
Nos athlètes juniors ont eu des médailles en l’occurrence Mouhyadine et Fatah, alors qu’on a du mal du côté senior. Maintenant nos juniors se sont classé 2eme et 3eme et c’est une bonne performance.
Concrètement, quels sont les résultats qu’on doit attendre avec l’équipe en place
maintenant ?
Nous avons un programme bien ficelé. Le chemin est bien balisé. Nous avons changé de manager et recruté un nouveau de nationalité française pour l’équipe nationale. Celui-ci a inscrit nos athlètesaux grandes compétitions internationales.Notre objectif est de participer au maximum de meeting durant les mois de Mai et Juin afin que le plus grand nombre de nos athlètes puissent réaliser le minima et se qualifier pour le Jeux olympiques. Pour l’instant trois d’entre eux sont qualifiés à savoir Mohamed Ismail Ibrahim Alias Fatah, Houssein Aden Alexandre pour le judo et le marathonien Ibrahim Hassan Bouh (Ogass).
Par contre Samia Hassan (5000m ) et Mouhydine Abdi Wais ne sont pas loin non plus de la qualification sur cette même distance. Quant à Kadra Mohamed Dembill, sur le 1500m, elle peut faire le minimum également. La dernière fois elle était malade à cause du froid à Paris.
Maintenant aux jeux olympiques, elle va retourner et certainement elle fera une bonne performance. Notre objectif c’est de nous qualifier dans un premier temps. Nous comptons au moins envoyer 5 athlètes aux jeux olympiques de Paris. Ogass a la chance de remporter une médaille, il peut réaliser un meilleur temps en se classant à la 2ème et 3ème place. Idem pour Fatah qui peut créer la surprise sur le 5000m aussi. L’objectif que j’ai fixé pour nos athlètes pour l’ instant c’est de participer aux jeux olympiques de Paris. Nous nous projetons aussi au-delà de Paris. Les jeux de Los Angeles de 2028 sont sur notre ligne de mire. C’est pour vous dire que c’est un travail de longue haleine.
Interview réalisée par Kenedid Ibrahim