Le plaidoyer de l’ambassadeur Ayeid Mousseid Yahya, délégué permanent de la république de Djibouti, à la tribune de la 219eme session du conseil exécutif de l’UNESCO

L’utilité de l’Unesco n’est plus à démontrer face aux nombreux conflits qui gangrènent le monde et  causent des souffrances incommensurables à des millions de personnes, ou les tensions géopolitiques et les guerres en Syrie, au Yémen, en Ukraine,  au Soudan, et dans les territoires arabes occupées et en particulier sur la bande de Gaza persistent, entraînant ainsi des violences, des déplacements forcés et des pertes de vies humaines, notamment parmi les civils, principalement les femmes et les enfants.

Face à ces tragédies qui nous ont été imposées, la Communauté Internationale, c’est-à-dire nous les Etats et les Organisations Internationales que nous avons créées et qui sont dépositaires de notre confiance devons agir de manière décisive, en favorisant des solutions pacifiques, renforçant la diplomatie et en promouvant les droits de l’Homme et la justice sociale. Nous devons unir nos forces et éviter les querelles stériles car nous sommes investis d’une responsabilité collective. Il est donc, de notre devoir d’épauler notre Organisation pour qu’elle puisse jouer son rôle noble et faire face à ces défis. Le décor est ainsi planté, et nous sommes dans le même bateau, notre avenir est commun, que nous le voulions ou pas, nous devons agir ensemble.

A l’orée du prochain Sommet de l’Avenir et des conférences passées telles que le Sommet sur la transformation de l’éducation, le Sommet sur l’Eau, je souhaite que nous mutualisions nos efforts pour permettre à notre Organisation de relever les défis et a cet égard je tiens à saluer le rapport de la Directrice Générale, surtout pour les efforts déployés et les résultats obtenus jusqu’à présent en poursuivant les quatre Objectifs qui nous permettent de mieux appréhender l’Organisation et ses différents secteurs de programmes. En particulier les actions menées pour atteler et mettre en œuvre les cinq programmes phares dans le cadre de l’appui de la priorité Afrique. L’augmentation budgétaire substantielle et programmatique nous réconforte pour la mise en œuvre rapide des projets et programmes surtout pour la Priorité Afrique.

Malgré un contexte difficile et une polarisation à la fois exogène mais également endogène, notre Organisation a vu une augmentation de 8% des contributions volontaires, ceci démontre si besoin en était, de son ancrage dans l’univers des Organisations qui comptent. Ma Délégation prend note de l’augmentation des dépenses au titre du budget intégré 2022-2023 qui est due à l’inflation et à la dépréciation de l’Euro et nous sommes convaincus que le Secrétariat traitera rapidement cette question en affinant les indicateurs relatifs aux effets, d’une manière plus rigoureuse et complète pour éviter de nouveau une telle situation.

Nous sommes heureux de savoir et de relever par ailleurs que l’Organisation a pu faire un bénéfice énorme en termes d’intérêt sur un autre compte de l’Unesco sans que cela n’attire notre attention outre-mesure. Il ne faut pas laisser la polarisation nous détourner et nous devons traiter ces questions avec sérieux, doigté, justesse et équilibre en prodiguant des mesures correctives.

A la veille des Olympiades de Paris et de ce qui aurait dû et pu être un moment de paix partagé dans le monde entier, la triste actualité nous ramène à la dure et amère réalité de ce qu’endure depuis cinq mois le peuple palestinien à Gaza et dans les territoires occupés.

Tous les forums sont bons pour dénoncés la brutalité de l’occupation, le refus d’un cessez-le-feu par la force d’occupation qui fait fi de sa propre Histoire, de son passé et de grâce que l’on arrête de nous ressasser avec le soi-disant droit à l’auto-défense car il s’agit avant chose d’une occupation et ce droit est plutôt le Droit consacré a celui qui est occupé et non le contraire.

Nous ne sommes pas à la Tribune des Nations-Unies mais à l’Unesco et nous ne devons pas nous résoudre à un silence complice et à l’inaction de la Communauté Internationale à savoir nous-mêmes en égrenant le nombre d’enfants tués, le nombre de Journalistes qu’on a fait taire à  jamais, les écoles et les universités, les lieux culturels et cultuels détruits au vu et au su du monde entier et une armée d’occupation qui fait subir au peuple palestinien la plus grande punition collective jamais égalée à  laquelle il faut ajouter maintenant la famine comme arme de guerre.

Mon pays épris de paix, condamne dans les termes les plus fermes ces massacres et ces violations du Droit International et du Droit International Humanitaire qui continuent à tuer des milliers d’enfants et de femmes tous les jours et cela depuis plus de cinq mois. Nous appelons à un cessez le feu immédiat et à une reprise d’un processus politique sérieux qui conduirait à la fin de l’occupation et à l’accession de la Palestine à un État souverain et indépendant.

L’Unesco doit trouver sa place et jouer son rôle dans les domaines ou son avantage comparatif le permet, dans les domaines de l’éducation, de la culture, de la protection des journalistes et nous voulons ici remercier le secrétariat pour nous avoir tenu informé des dispositions prises en amont pour assister le peuple palestinien. Cette guerre qui touche en premier lieu les enfants, les écoles, la culture nous poussent à la réflexion de la culture de la paix et de semer la Paix dans l’Esprit   des Hommes et des Femmes.

Ma délégation a fait sienne et a coparrainé le projet de résolution intitulée :« protection de l’éducation contre les attaques » qui nous semble s’inscrire dans une dynamique d’actualité, car on ne doit pas baisser les bras mais utiliser tous les moyens intellectuels catalyseurs pour dissuader les attaques contre les écoles. C’est une thématique qui doit trouver écho y compris aux Nations Unies pour sanctuariser ces lieux en temps de guerre.

Nous savons pertinemment que l’Unesco n’a pas de casques blancs ou de casques bleus à déployer mais elle a l’expertise incommensurable pour cartographier, répertorier comme on le fait pour le Patrimoine Mondial toutes les écoles et les centres éducatives et universitaires surtout pour les pays ou les conflits sont plus à même de surgir. Nous devons être partout et en tout lieu être une vigie y compris en proposant un texte normatif ou proposer une résolution thématique, et à la porter devant le Conseil de Sécurité comme cela s’est fait par le passé comme pour la résolution du Conseil de sécurité 1325 sur les femmes ou la résolution du Conseil de Sécurité sur les enfants soldats.

Tout est possible y compris réfléchir à une “Conférence internationale consacrée à la sanctuarisation des écoles face aux attaques” qui permettra éventuellement d’élaborer des « Principes et un code de conduite » qui incitera les belligérants à redoubler de vigilance. Pour ainsi paraphraser Victor Hugo qui disait « Ouvrir une école, c’est fermer une prison » or « détruire une école c’est ouvrir une prison ». Si la situation persiste, à Gaza ceux qui ne sont pas morts aujourd’hui dans les bombardements de leurs écoles rempliront demain les prisons israéliennes.