La Cour des Comptes, réunie en Audience Solennelle, a tenu une prestation de serment des comptables public hier  matin dans ses locaux situés au centre ville. Ont participé à cet évènement, le secrétaire général du ministère du budget M.Simon Mibratu, le Médiateur de la République Dr Kassim Issak la première Présidente de la Cour des Comptes Mme Ismahan Mahamoud, Mme Madiba Ismael Aouled, procureur Général près de la Cour des Comptes ainsi qu’un parterre d’autres invités. Cette prestation s’inscrit dans le cadre de la relation que la Loi a institué entre la Juridiction Financière et les comptables publics.

Il s’agit d’une obligation légale que le comptable public doit s’acquitter dès sa nomination à cette fonction exceptionnelle ouvrant à son récipiendaire la possibilité exclusive du maniement des deniers publics.

 Ce maniement est bien encadré par la loi, car, celui qui touche les deniers publics, se brûle aux doigts et doit se conformer aux exigences établies pour la gestion de l’argent de l’Etat.

Aussi, les principaux textes qui organisent les finances publiques et la reddition des comptes se situent à un triple niveau.

Au niveau le plus élevé des normes juridiques, nous avons la constitution, avant la loi et les règlements.

La constitution de 1992 consacre, non seulement, le principe de séparation des pouvoirs entre les différents pouvoirs (Art.7), mais également une organisation des finances publiques (des lois budgétaires) qui énonce dans son article 63 « Les lois de Finances déterminent les recettes et les dépenses de l’Etat.

 Les lois de règlement contrôlent l’exécution des lois de Finances, sous réserve de l’apurement ultérieur des comptes de la nation par la Cour des Comptes ».

 Concernant le cadre législatif,  la loi n°107 relative aux lois des finances cite, dans son art.45 sur l’exécution du budget, les exécuteurs des opérations y afférentes, tout en les enjoignant à tenir une comptabilité, avant de relater dans ses art.67 et 68, sur le contrôle du budget, les procédures et les modalités de la reddition des comptes des entités et institutions publiques, ainsi que les concours qu’elle apporte à l’exécutif et au législatif au niveau du contrôle des lois budgétaires.

Ainsi que la loi n°140 portant sur 1’organisation, le fonctionnement et les missions de la Cour de Comptes qui retrace d’une part ses missions de jugement des comptes, art.35 et 36, et d’autre part, de contrôle de gestion (art.69).

Dans un dernier niveau, le décret n°2001-0012/PR/MEFPCP du 15 janvier 2001 portant règlement général sur la comptabilité publique s’inscrit dans cet ensemble des textes cités plus haut.

Donc, le comptable public  est tenu de venir prêter serment devant l’Institution Supérieure de Contrôle des finances publiques, réunion en Audience Solennelle, comme c’était le cas ce matin à la Cour des Comptes.

Parmi les responsabilités du comptable public vis-à-vis de la Cour des Comptes, il faut citer la production de ses comptes à cette dernière au 31 Juillet de chaque année pour la gestion de l’année précédente. Le rendez-vous est annuel et il revêt d’un caractère primordial pour la Cour des Comptes pour laquelle la reddition des comptes constitue le point de départ de ses activités de contrôle.

C’est pourquoi le législatif a prévu pour les comptables publics qui ne respectent pas à cette obligation de dépôt des comptes à la Juridiction Financière, des amendes qui peuvent leur être infligés soit pour l’absence totale de dépôt des comptes, soit pour retard de dépôt des comptes. Concernant 1’obligation de la production et du dépôt des informations exigées à la Cour des Comptes, elle est inscrite dans la loi n°140 relative à 1’organisation et le fonctionnement de la Cour des Comptes,  à travers l’article 36 pour le jugement des comptes.

En cas de non-respect dans 1’exécution de ces prescriptions légales, des sanctions sont  pour les agents comptables par le biais des articles 36 et 52. Or, l’une des principales contraintes dans l’exécution des activités juridictionnelles et non juridictionnelles de la Cour des Comptes se situe, non seulement, dans 1’absence de communication de données, mais également dans la transmission d’informations ne respectant pas les prescriptions de formes exigées.

Ces contraintes sont aussi bien  présentes dans les dépôts des comptes des comptables publics pour jugement, que dans le contrôle de la gestion de performance des services des entités et organismes, ainsi que le contrôle de l’exécution des lois de finances qui doit donner lieu à un certificat de conformité avant son envoi à l’exécutif et au parlement.

Dans la même relation, la Cour peut mettre en jeu les responsabilités du Comptable Public qui sont lourdes et dérogent du droit commun, car, le comptable public est personnellement et pécuniairement responsable de ses actes, dans la gestion des deniers publics. A cet égard, l’exigence de la constitution de cautions, à l’endroit du comptable public n’est pas anodine.

Cette situation est survient à l’occasion de l’apurement des comptes du comptable public, par la Cour qui établit par un arrêt,  que le comptable est mis en débet pour une recette non recouvrée ou une dépense payée irrégulièrement.

« Les autorités publiques affirment et réaffirment leur attachement au contrôle des deniers publics » Ismahan Mahamoud, première présidente de la Cour des Comptes 

La récente nomination des comptables publics est une affirmation claire des autorités publiques, dans l’évènement de l’effectivité du droit pluriséculaire du citoyen à recevoir compte de l’utilisation des ressources publiques. En effet, depuis la création de la Cour des Comptes, un nombre aussi important de comptables publics n’a pas fait l’objet d’un seul acte de nomination. C’est dire combien les autorités publiques affirment et réaffirment leur attachement au contrôle des deniers publics ;

Ressource rare ou ressource limitée ; la sauvegarde de la chose publique, la responsabilité des gestionnaires de deniers publics, l’équité, la diligence, la bonne utilisation, ne sont pas des vains mots. Si les faiblesses liées à l’immixtion de la fonction de comptable public est levée, la responsabilité de la Cour est de donner un plein effet à cette évolution positive des procédures de jugements des comptes. C’est dans ce contexte que la cérémonie d’aujourd’hui prend tout son sens.

• Elle est d’une importance capitale pour la Cour des Comptes, puisqu’elle fera date dans la nouvelle ère du contrôle juridictionnel des comptes publics,

• Pour les comptables publics ; elle permet de sceller solennellement le pacte de probité, d’intégrité et de responsabilité dans l’exercice de leurs fonctions pleines de servitude.

Dans cette perspective, l’engagement du Ministre du Budget ; supérieur hiérarchique des Comptables publics, qui donne des gages rassurants sur les dispositifs de protection et de sauvegarde du bien public est manifeste. En effet, Messieurs les représentants du Ministre du Budget ; la cérémonie d’aujourd’hui est, à bien des égards, le résultat de cet engagement ; en décembre 2019, le Ministre du Budget affirmait sa volonté d’ancrer davantage la fonction de comptable public dans les respects des lois et des règlements de notre Nation.

C’est dire combien cette cérémonie est déjà un premier résultant tangible, enregistré dans un laps de temps d’une année ; elle présage à bien des égards, une observation de la loi dans toute sa rigueur.  Messieurs les représentations du Ministre, les efforts engagés par votre département sont connues par La Cour des Comptes ; ils posent les bases d’une reddition des comptes plus assumée.  Elle y sera attentive.  Je ne manquerais pas de saluer aussi l’action et l’implication du Ministre de la Justice qui œuvre, chaque jour, pour que le respect de la loi demeure le fondement de l’efficacité des institutions publiques;

Tout en tenant compte du contexte de la crise sanitaire liée à l’épidémie de la Covid-19 et de la capacité limitée de sa salle d’audience habituelle ; la COUR n’a pas hésité à aménager une salle de circonstance, faisant le choix de ne pas délocaliser cet évènement. Parce qu’elle permet de sceller la relation de travail, jadis brisé, entre le comptable public et la Cour des Comptes.

Pour respecter le caractère public de l’audience, notre cérémonie est en streaming ; je salue tous ceux qui nous suivent de façon virtuelle.

« Le but ultime des vos missions s’inscrit dans la logique  indéniable de préserver les deniers publics »

Mme Madiba Ismael Aouled, procureur Général près de la Cour des Comptes

Les missions que vous exercerez reposent sur le sacro saint principe portant séparation des deux  fonctions essentielles dans le système de gestion des ressources publiques de notre pays. Il se base sur la distinction d’une part le comptable public, et d’autre part l’ordonnateur (et ou administrateur de crédit), qui disposent tous les deux des attributions suffisamment différenciées et à partir de lesquelles découlent des régimes de responsabilité naturellement propre à chaque fonction.  Aussi la législation en vigueur décrit  largement vos prérogatives, vos droits, vos obligations, vos responsabilités. Et à ce dernier sujet au même titre que tout agent public vous êtes soumis au régime disciplinaire de droit commun, et vos responsabilités civiles comme pénales peuvent être engagées à l’occasion de l’exercice des vos fonctions.

Vous avez cependant en plus Mesdames et  Messieurs les comptables publics, une responsabilité personnelle et pécuniaire dont je ne peux passer sous silence à cette occasion. Elle est édictée notamment au regard de votre rôle centrale dans la comptabilité publique. Les modalités de mise en jeu de celle-ci ainsi que les conséquences qui en découlent sont également prévues par la réglementation.  Sans m’attarder et exposer ici les aspects techniques qui vont structurer vos taches quotidiennes, il me semble toutefois opportun de m’arrêter sur les finalités, et les objectifs qui sous-tendent vos compétences.

Il s’impose de rappeler à cet effet que le but ultime des vos missions s’inscrit dans la logique  indéniable de préserver les deniers publics. De cet esprit du législateur résultent l’ensemble de contrôles auxquels vous êtes tenus dans l’exercice de vos fonctions,  l’ensemble des états qu’il vous appartient d’établir selon des périodicités bien déterminées, l’ensemble des obligations qui caractérisent votre statut, et enfin l’ensemble des pièces et documents que vous devez conserver dans des conditions fixées également par la Loi.

Notons également  qu’ en rapport  avec ce même objectif de protéger les biens publics, un processus de reddition des comptes vous est prévu par les textes juridiques applicables.

Il apparaît dés lors clair qu’exercer cette noble fonction de “comptable public”, exigera systématiquement de votre part Mesdames & messieurs  des valeurs propres. Des valeurs qui sont de nature à assurer une sauvegarde pertinente des fonds des structures publiques. A cette fin, et en vue de garantir l’inviolabilité des fonds & valeurs qui vous sont confiés, il vous appartiendra Mesdames & Messieurs les comptables publics, de conduire vos missions avec probité, en vous conformant scrupuleusement aux lois, règlements & principes se rattachant à votre statut. C’est donc bien au regard de la singularité de vos attributions, que seules la rectitude, la régularité et l’intégrité doivent avoir leur place en vous.