
L’écosystème maritime de notre pays est un moteur de croissance, un acteur économique de premier ordre qui regorge plusieurs spécificités susceptibles de générer des milliers d’emplois directs et indirects, ce qui devrait conforter la position de Djibouti classée parmi les pays ayant une forte valeur ajoutée en la matière. Travailler dans la marine nationale comme matelot, commandant de navire, mécanicien, génie civil ou opter pour l’économie touristique pour être moniteur de plongée, voire même être marin pêcheur sont des activités qui relèvent de l’économie maritime plus particulièrement appelée «Economie bleue ».

Nous ne pouvons pas être pauvres quand on a des mers aussi riches. Jusqu’ à présent, à Djibouti, la mer constituait une richesse quand il s’agit de pêche ou de commerce maritime mais l’heure est venue d’en tirer d’autres profits alternatifs de nos océans. Elles offrent un potentiel de croissance immense et varié, une manne encore ignorée allant de la pêche à la biotechnologie bleue marine tels que de l’aquaculture, le tourisme et les énergies renouvelables maritimes.
On doit marquer un tournant majeur dans la stratégie de diversification économique de Djibouti en mettant à l’honneur les ressources maritimes, la durabilité environnementale et le potentiel de l’économie bleue comme pilier de croissance.

La mer représente l’un des grands enjeux du XXIᵉ siècle. L’exemple de la Chine est à ce titre révélateur : après avoir interdit la navigation maritime en 1434, elle s’est de nouveau ouverte à la mer un siècle plus tard, amorçant une longue histoire navale qui l’a conduite à devenir aujourd’hui une puissance maritime de premier plan. En 2024, ce secteur lui a généré une valeur ajoutée de 983 milliards.
L’économie bleue incarne la gestion des ressources halieutiques, océaniques et côtières pour promouvoir une croissance durable et inclusive, profite à la substance de l’humanité, aux emplois et respectueuse de la biodiversité des écosystèmes marins.

Djibouti couvre une surface limitée de 23.000 km avec des ressources naturelles affectées par le climat désertique et les sols volcaniques, mais avec ses ports en modernisation, ses ressources naturelles marines encore sous exploitées et ses 370 km des côtes accès à la Mer rouge lui agréent des opportunités de réserves gazières et pétrolières.
Au-delà de ses aspects financiers, l’économie bleue joue également un rôle majeur dans la préservation de l’environnement et la lutte contre le changement climatique. Les écosystèmes marins djiboutiens abritent une biodiversité exceptionnelle qui, si elle est bien protégée, peut devenir un levier d’attractivité touristique et scientifique. La gestion durable des ressources marines permettra non seulement de créer de la richesse, mais aussi de préserver ce patrimoine naturel pour les générations futures.
Promouvoir les métiers liés à la mer
Transformer la mer en moteur de développement durable est un point fort et une réalité. Pour lutter contre le chômage et l’oisiveté des jeunes avec les effets pervers que cela entraîne, il faut que les jeunes se focalisent aujourd’hui sur les perspectives de l’économie bleue et explorer la mer comme piste de solution.
Dans un pays côtier et stratégique comme la République de Djibouti, entouré d’eaux à perte de vues, les emplois liés à l’exploitation de la mer sont vastes multiples et porteurs d’avenir à commencer par les métiers traditionnels maritimes comme la pêche traditionnelle, les dockers, les ecailleurs, les mécaniciens, Garde-côtes, directeurs de port, les ingénieurs, les laborantins et chercheurs de centre scientifique, les fonctions du génie civil, les armateurs, les constructeurs ou encore le transport maritime, le tourisme maritime, la logistique portuaire, et la conservation marine qui comptent parmi nos métiers historiques liés à la mer.
Il est à noter que le développement de l’économie bleue à Djibouti ne peut se concevoir sans une coopération régionale et internationale renforcée. Situé au carrefour stratégique entre la Mer Rouge et l’océan Indien, le pays a tout intérêt à mutualiser ses expertises et ses infrastructures avec ses voisins afin de bâtir un réseau maritime intégré. Cette ouverture favoriserait l’émergence d’une zone dynamique de commerce, d’échanges technologiques et de recherche scientifique, consolidant la place de Djibouti comme hub maritime incontournable.
Quant aux métiers d’avenir de la mer, on peut dire que les mutations de la société a l’ère numérique ont fait émerger de nouvelles professions autour de la mer telles que la cybersécurité de l’écologie, les activités sur la transformation des produits halieutiques, cartographe en fonds marins, ingénierie navale et en biologie marine, Inspecteur de lutte contre la pollution des plastiques et autres, Experts en océanographie et climatologie, sans oublier les assureurs et les professions du droit maritime, indispensables à notre écosystème.
Toutefois, des formations sont nécessaires et doivent se faire admettre. Elles sont initiées par l’Institution maritime de Djibouti dénommée Centre Régional de Formation Maritime (CRFM/DRTC), qui forme les professionnels du secteur à la sécurité maritime, la lutte contre le piratage, et la gestion de la pollution. Mais pour la plupart de nos jeunes intéressés par les professions maritimes, il existe aussi des grandes Écoles privées de formations académiques, comme le Master en Management Portuaire et Maritime (MPM) proposé par l’Institut Universitaire de Technologie Tertiaire (IUTT) de l’Université de Djibouti ainsi que des formations spécialisées en logistique maritime proposées par l’Académie Arabe.
Néanmoins, les secteurs identifiés actuellement comme relevant de l’économie bleue à Djibouti sont, entre autres, les activités portuaires et maritime, la pêche, l’exploitation du sel, la Société Djibah pour l’exportation des produits halieutiques et Djibouti Telecom pour ses canaux essentiels pour le transport des flux d’informations. Avec ses 500 câbles traversant nos profondeurs maritimes pour transmettre des données, le pays grâce à son littoral et sa position stratégique devient un point de convergence pour les câbles sous-marins, reliant l’Afrique à l’Europe et à l’Asie. Le TIC de Djibouti favorise ainsi un développement économique durable et incarne désormais un acteur majeur dans le secteur du numérique et des télécommunications dans le globe.
Or, selon Ibrahim Rachid, responsable administratif au Port de Djibouti : « Dans les prochaines décennies, le pouvoir public entend développer des infrastructures portuaires, des activités de pêche, en passant par le nautisme et les flottes de commerce pour la mise en place d’un accélérateur d’initiatives en faveur d’une nouvelle génération d’entrepreneurs de la mer».
Enfin, l’économie bleue représente aussi une formidable opportunité d’innovation. Les nouvelles technologies, telles que les systèmes de suivi satellitaire des pêches, l’intelligence artificielle appliquée à l’océanographie ou encore les énergies marines renouvelables, ouvrent des perspectives inédites. En encourageant les start-up et les jeunes entrepreneurs à investir ces domaines, Djibouti peut non seulement diversifier son économie, mais également se positionner à l’avant-garde d’un secteur en pleine mutation à l’échelle mondiale.
Bref, en mer comme sur terre, il y a toujours une place pour les talents.
Saleh Ibrahim Rayaleh