Pour bien cerner l’idée qui sous tend la création du Fonds Souverain de Djibouti, voici les réponses à onze questions essentielles.

1. Quelle est la logique à l’origine de la création du Fonds ?

La République de Djibouti a défini son ambition : se positionner comme un hub commercial, logistique, portuaire et numérique incontournable. Et assurer le développement d’une économie diversifiée et compétitive, appuyée sur le secteur privé. C’est le projet porté par la vision 2035 qui guide l’action gouvernementale sur le long terme. Depuis deux décennies, sous la direction du président Ismaël Omar Guelleh, des éléments essentiels ont déjà été mis en place : un cadre légal et financier, une monnaie stable et convertible, des structures portuaires et ferroviaires de classe mondiale, une coopération régionale approfondie. Ces évolutions majeures ont été soulignées par les classements de la Banque Mondiale (Doing Business), l’augmentation continue de notre Produit National Brut, l’attractivité du pays, le décollage des investissements privés. La vision 2035 prévoit également de grandes réformes structurelles pour accélerer, « booster » la modernisation économique du pays et sa compétitivité. La création du Fonds souverain s’inscrit pleinement dans cette démarche. Il s’agit d’impulser une nouvelle phase de l’émergence en se dotant d’un instrument d’action efficace et souple, mobilisateur de moyens. Un outil qui mise sur les partenariats, nationaux et internationaux, ainsi que sur les forces du secteur privé. Le Fonds propose un nouveau paradigme de développement. Nous libérer, en partie, des méthodes anciennes et traditionnelles de croissance par l’endettement. Mutualiser nos ressources pour créer un effet de levier, attirer de nouveaux financements, favoriser la création d’entreprises et des emplois, de la richesse globale. Le Fonds est un acteur financier, mais il répond avant tout à un objectif d’accélération du développement. C’est sa raison d’être. Le Fonds n’est pas un « capital-risqueur ». C’est un outil de création de richesses nationales à long terme. Son ambition ultime est claire : le développement de Djibouti. Et la création d’emplois pérennes pour les Djiboutiens.

2. Comment le Fonds va-t-il concrètement soutenir le développement de Djibouti ?

Par la création de richesse, de valeur ajoutée, d’entreprises, d’emplois. Le premier objectif du FSD est d’accélérer la mise en œuvre de la vision 2035, en investissant ou en co-investissant dans des projets structurants et stratégiques, porteurs d’une réelle « plus-value » pour le pays. Et créateur d’emplois. Le FSD participera aussi à la modernisation des entreprises publiques nationales en vue d’en améliorer la rentabilité et la productivité. Djibouti a su maintenir dans le domaine public la plupart des entreprises stratégiques du pays. Ces entreprises publiques font partie du patrimoine national. C’est un exemple rare de souveraineté en Afrique. Il s’agit maintenant de maximiser leurs opportunités de croissance afin de les voir participer davantage au développement de notre nation. L’idée par ailleurs n’est pas d’aller investir en terres lointaines. Les engagements du Fonds ciblent prioritairement la République de Djibouti, les pays ayant un lien économique avec notre pays et la région de la Corne de l’Afrique.

3. Investir et co-investir : avec quels moyens ?

 Quels « fonds » justement ? Le FSD s’inspire d’autres modèles de fonds souverains qui ont fait leur preuve dans le monde, en particulier à Singapour. En adaptant ces mécanismes aux réalités socioéconomiques et aux objectifs de développement de notre pays. Le Fonds sera doté à sa création de 30 milliards de francs djiboutiens. Il s’agit ensuite de « mutualiser » les actifs de certaines entreprises stratégiques nationales afin de pouvoir mobiliser des ressources complémentaires venant de partenaires extérieurs afin de créer un effet de levier. Pour assumer cette mission, les actifs suivants sont transférés par la loi à la dotation du Fonds : • 40% des actions de Great Horn Investment Holdings • La totalité des actions de Djibouti Télécom • La totalité des actions de la société de Gestion de la Jetée du Terminal Pétrolier de Doraleh • La totalité des titres au capital de la société nationale appelée à devenir Electricité de Djibouti. Le Fonds aura la responsabilité de maximiser la gestion et à la stratégie de ces entreprises, d’accroitre leurs compétitivité, de représenter efficacement l’État actionnaire. Et de défendre les intérêts stratégiques de la nation. Le Fonds s’appuie enfin sur un mécanisme « d’épargne publique », en utilisant les flux de revenus récurrents issus des activités stratégiques de la république pour les affecter à la création de richesse à long terme. Dans ce cadre, la loi prévoit des ressources récurrentes et stables : • Dotation de 20% des revenus issus des contrats de coopération militaire perçus par l’État. • Dotation issue des prélèvements effectués dans le cadre des zones franches. • Dotation issue de la redevance variable due au titre de l’accord de développement portant sur la réalisation et l’exploitation du gazoduc Éthiopie-Djibouti. • Dotation provenant de la rémunération de marché prévue dans le contrat de mandat de gestion entre le FSD et la Caisse Nationale de la Sécurité Sociale. • Dotation égale à la rémunération de marché prévue dans tout contrat de mandat de gestion des actifs publics conclu entre le FSD et l’État au titre de l’année précédente • À terme les produits et plus-values dégagés par ses participations et placements.

” Le Fonds propose un nouveau paradigme de développement. Nous libérer, en partie, des méthodes anciennes et traditionnelles de croissance par l’endettement. “

4. Les fonds souverains sont censés investir le « surplus », la marge nette de l’activité économique d’un pays. Djibouti n’a pas de surplus. Par contre le pays à d’immenses besoins sociaux (éducation, formation, emploi, lutte contre la pauvreté, etc.). En quoi le Fonds va-t-il permettre de répondre à ces urgences ?

 Djibouti n’est pas démuni. Un travail important a été effectué depuis deux décennies, le pays possède des actifs significatifs : participations, foncier, droits et redevances. Ces actifs doivent être gérés de façon optimisée pour en augmenter la capacité de génération de revenues et donc, in fine, la contribution aux ressources de l’État. Nous ne sommes pas à la recherche de crédits ou d’aide pour répondre à nos exigences de développement. Avec le Fonds, nous sommes à la recherche de projets rentables, de création de valeur, d’activités qui tirent un bénéfice maximum de notre position stratégique et de nos actifs. Il s’agit de créer des entreprises et des emplois, de soutenir des projets structurants, de créer de la richesse globale. Cette mobilisation de nos actifs, leur utilisation judicieuse et optimale permettra de dégager ces marges et ces surplus, d’accentuer la capacité de l’État à répondre aux défis du développement. Tout en privilégiant la constitution de réserves importantes pour les générations à venir. Le Fonds est un instrument intergénérationnel qui rapproche les nécessités du court terme avec exigences du long terme

5. Le Fonds risque-t-il d’accentuer la dette du pays ?

 L’objectif est, au contraire, de créer des espaces budgétaires supplémentaires, et non d’alourdir la dette publique de l’État. Le Fonds est un investisseur de long terme, sur des projets rentables. Ces projets seront structurés sans recours systématique à de la dette publique.

Aux côtés du Fonds souverain, des partenaires co-investisseurs viendront apporter leur savoir-faire et leur capacité financière. Les plans de financement pourront avoir recours en priorité à la « dette projet » avec ou sans garantie de l’État. C’est un modèle qui a fait ses preuves et abouti à réduire la dette publique et à augmenter les ressources de l’État. Le Fonds, une fois pleinement en activité, avec un bilan solide sera, dans un futur proche, également en mesure de faire appel directement aux marchés sans la garanti de l’État. Ce qui donnera à notre pays des options de financements complémentaires.

6. Comment s’assurer de la qualité des investissements décidés par le Fonds ? Pourquoi le DG est étranger, comme la plupart des membres du CA ? Comment le processus de sélection –t-il été opérée ? Comment s’assurer que le FSD reste sous « souveraineté Djiboutienne ? » Le Fond Souverain de Djibouti est une société Anonyme de droit Djiboutien dont l’État est et demeurera le seul et unique actionnaire. Le Fonds appartient à Djibouti et aux Djiboutiens. Il est placé sous la tutelle de la Présidence de la République. Le conseil d’administration qui contrôle et oriente l’activité du Fonds est composé des principaux acteurs économiques souverains de Djibouti : -Le Ministre de l’économie et des finances ; -Le Ministre du budget ; -Le Gouverneur de la Banque Centrale ; -Le Président des Autorités du Port et de ZF ; -Le conseiller économique du Président. Le Président du Conseil d’administration est une personnalité Djiboutienne de qualité et d’expérience. Le directeur général a été nommé par décret présidentiel au regard de ses compétences reconnues dans la gestion de ce type d’instrument. Djibouti a fait appel à des personnalités africaines, dirigeant ou administrateurs, des spécialistes en investissements internationaux, des entrepreneurs, pour apporter leurs expériences, leur regard externe, leur indépendance, afin que les décisions stratégiques les plus adéquates soient prises. Le Fonds pourra également s’appuyer sur les meilleures structures de conseils internationales pour éclairer et préparer ces décisions. Ce qui compte, c’est l’efficacité du Fonds, au service de tous les Djiboutiens. D’agir de manière autonome, souveraine. D’opérer plus vite, de manière fluide pour répondre aux besoins et aux opportunités.

“Avec le Fonds, nous sommes à la recherche de projets rentables, de création de valeur, d’activités qui tirent un bénéfice maximum de notre position stratégique et de nos actifs.”

7. Avez-vous déjà des exemples précis de projets sur lesquelles le fonds va investir ou coinvestir ? Quand le Fonds sera-t-il réellement opérationnel ?

Le FSD est opérationnel. Les décrets de mise en œuvre ont été signés. L’équipe est en place. L’activité va monter en puissance. Nous comptons investir sur des projets  long  terme entrant dans la stratégie de développement de Djibouti – Vision 2035. L’objectif consiste à investir et à co-investir dans des secteurs clé de l’économie : les télécommunications, les nouvelles technologies, l’énergie, les infrastructures, les services financiers, la logistique, l’industrie, l’immobilier, le tourisme, la santé, l’agriculture, la pêche, les activités minières, etc.. Il s’agit aussi de privilégier les projets qui favorisent une croissance durable et la mise en œuvre de la transition énergétique. Tous les projets phares de notre plan de développement national ayant un caractère de génération de revenu et de rentabilité pourront faire l’objet d’une analyse approfondie dans le cadre d’une réflexion plus large sur les partenariats publics privés. Cette réflexion pourra englober l’optimisation du financement de projets déjà en phase opérationnelle, en cours de remboursement. Nous ferons une série d’annonces complémentaires dans ce sens.

8. En rassemblant les actifs du pays sous une même gestion ne prend-t-on pas le risque de les mettre en danger collectivement ?

En aucune manière. Le FSD bénéficie d’un pilotage en adéquation avec la législation nationale, sous le contrôle de l’Inspection Générale d’État. Le Fonds s’inscrit dans les standards internationaux, avec l’application des règles de gouvernance édictés par les principes de Santiago qui ont permis à la plupart des grands fonds internationaux de se développer de façon significative et structurée.

 9. Quelle est la logique de l’inclusion de la CNSS dans les actifs du Fonds ? Est-ce légal de « gager » ainsi la retraite des épargnants ? Il ne s’agit ni de transférer les fonds de la CNSS, ni de les gager. Les Fonds de la CNSS restent la propriété de la caisse et des cotisants. Le FSD appuie la CNSS dans la mise en place d’une gestion diversifiée et à faible risque. Le Fonds a rassemblé des compétences en termes de gestion d’actifs. Ces compétences seront apportées à la CNSS dans le cadre d’un mandat de gestion. Ceci afin de renforcer les capacités de cette grande institution nationale.

10. Le fonds se fixe un objectif d’actifs sous gestion de 1,5 milliards dans dix ans. Pourtant les actifs transférés par la loi doivent déjà représenter ce montant. Pourquoi sous évaluer le fonds ? (Valeur Great Horn ?)

Nous avons adopté une approche raisonnable. Une évaluation précise des actifs transférés est en cours. Une analyse initiale avait abouti à une estimation de la valeur des transferts potentiels à horizon dix ans qui se trouve effectivement entre 1,5 et 2 milliards de dollars US. Des éléments de valorisation globaux vous seront communiquées dans les mois qui viennent, mais au regard du caractère stratégique des actifs transférés, il n’est pas possible pour le moment de communiquer sur les montants exacts de valorisation.

11. Le projet du fonds envisage-t-il en fait des privatisations pour créer de la plus-value ? Électricité de Djibouti ? Djibouti Télécoms ? (Vente des actifs de l’État ?)

Le Fonds n’est pas l’État djiboutien. Une décision de ce type relève des plus hautes autorités de notre pays. À ce stade, aucune opération de privatisation n’est à l’étude au sein du Fonds. L’objectif que nous nous fixons sera de rester en contrôle de l’ensemble des actifs stratégiques transférés et de mettre en place les partenariats opérationnels nécessaires à leur développement. Ces partenariats ne nécessitent pas nécessairement d’ouverture de capital.