Par A.A.-MAHE

Situé sur un axe maritime stratégique au trafic très abondant, la République de Djibouti s’est, très vite, mise au diapason du vent nouveau de la globalisation. Un vent  qui s’annonçait comme étant l’incontournable donne qui orientera désormais les politiques économiques de ce troisième millénaire qui démarra quelques mois après l’avènement d’un nouveau président : Ismaïl Omar Guelleh. Et celui-ci ne passera pas à côté de l’évènement que représente cette globalisation. Très vite, il mettra en place un plan de réforme titanesque et un programme de développement adéquat capable de doter le pays en infrastructures portuaires et maritimes de dernière génération ; avec le souci permanent de moderniser les services pour améliorer la qualité et la performance. Cette nouvelle vision politique sera d’ailleurs payante. Sans une administration efficace et performante, point de développement. C’est une réalité universelle. Et, dès les premières années d’indépendance, le besoin se fît sentir. Mais à cette époque l’Etat n’avait pas beaucoup de moyens. D’autant plus que la formation, à l’étranger, des cadres de l’Etat devenait de plus en plus coûteux et ne pouvait profiter qu’à un nombre très limité de bénéficiaires. Ainsi, l’idée de créer une structure nationale capable d’assurer les formations administratives nécessaires naquît. Et, à force de volonté et d’abnégation, un Centre de Formation Administratif (CFA), placé sous la tutelle  du Ministère du Travail chargé de la réforme de l’Administration, émergea d’une première gestation en 1988. L’effort ne s’arrêta pas là puisqu’à peine sept années plus tard, le Centre donna naissance à l’Institut National d’Administration Public (INAP) qui voit le jour le 11 octobre 1995. Bénéficiant, en 2015, d’un changement de statut modifiant son fonctionnement et son organisation, pour devenir désormais l’établissement public que nous connaissons aujourd’hui. Un établissement public à caractère administratif, doté de la personnalité morale, avec une totale autonomie financière. Dans cet article, nous allons vous faire découvrir le parcours et la progression de cette glorieuse institution qui fit des émules ; ses missions, son bilan et ses ambitions. Nous allons voir, si oui ou non, les principaux objectifs qui lui furent fixés dès sa création sont aujourd’hui atteints et découvrir quelles sont les perspectives à l’horizon.

Dès l’indépendance en 1977, les responsables de la jeune République nourrissaient  déjà un brûlant désir d’émancipation administrative pour s’affranchir du lourd héritage colonial, L’État se devait d’améliorer le niveau des compétences techniques et managériales de ses agents. Et, en dépit des innombrables  difficultés financières de l’époque, l’idée de création d’une structure de formation efficace naquît très vite et devînt l’une des priorités du gouvernement. Avec la naissance en 1988, du Centre de Formation Administrative (CFA), le rêve de l’Etat fut ainsi transformé en réalité. Le Centre démarra ses activités dans une période certes financièrement difficile répétons-le mais, incontestablement favorisée par une extraordinaire ferveur nationaliste et une très forte envie de consolider la liberté. Deux éléments qui avaient la capacité de booster toute volonté créatrice. Les différents  gouvernements de l’époque ayant consenti d’énormes efforts et fait preuve de courage pour préparer et assurer la relève. Plantant ainsi, les premiers jalons qui conduiront à transformer l’héritage colonial en un appareil au service du développement économique et social de la jeune Nation.

L’apprentissage ne contribue pas une grande réussite. seulement au développement et à la satisfaction professionnelle de l’employé. Il garantit la meilleure qualité de travail qui soit, tout en lui offrant un environnement convivial, stimulant et créatif.

Le Centre de Formation Administrative (CFA) est, comme son nom l’indique, un centre de formation et de perfectionnement en administration publique. Et sa principale mission fut, dès sa création, de former les fonctionnaires nouvellement promus ou recrutés de l’administration.

Le Centre fut donc le principal instrument que l’Etat s’était doté pour renforcer et développer la formation continue de ses agents et de ses cadres, quel que soit le niveau. Il aura par ailleurs, les moyens de jouer un grand rôle dans la nouvelle stratégie administrative animée par la compétence, la performance et la culture afin d’accompagner parfaitement les premières réformes lancées par le Gouvernement. En 1995, le Centre sera réorganisé et transformé de fond en comble pour donner naissance à une nouvelle structure portant une nouvelle dénomination : l’Institut National d’Administration Publique (INAP). Un Institut destiné à jouer désormais un grand rôle dans toutes les stratégies à venir. Pour rehausser ses capacités et améliorer la qualité de sa formation, l’INAP devînt en 2016, un établissement public autonome. Ses missions sont redéfinies pour que ses offres de formation soient en mesure de répondre aux demandes spécifiques de l’administration publique et des établissements de l’Etat ; mais aussi, des sociétés privées et des organismes de la société civile. L’apprentissage, la formation et le perfectionnement professionnel constituent des éléments clés pour répondre aux défis de ce 21ème siècle. De nos jours, acquérir les connaissances et les compétences nécessaires est primordial pour réussir et assurer la gestion efficace d’une administration publique qui doit refléter l’image d’un Etat responsable, novateur et attentif à l’attente non seulement de ses citoyens ; mais également, des investisseurs et des partenaires économiques du pays.

L’INAP et le vent des grandes réformes

Pour faire face à une demande croissante de plus en plus exigeante et être en mesure de suivre l’élan de cette nouvelle ère de développement économique et sociale que le pays avait entamé, le gouvernement de la République de Djibouti avait lancé, dès le début des années 2000, un important dispositif de réforme de l’administration publique. Tout au long des années qui vont suivre, un nombre incalculable de réformes sera engagé et accompli avec succès, transformant considérablement le paysage administratif de l’Etat. Dans le but bien sûr, d’améliorer la qualité des services et accroître leurs rendements. Et, en cette période où le vent de la globalisation tourbillonne partout dans le monde, l’aptitude et la performance se sont avérées incontournables. Les réformes vont donc se succéder à un rythme soutenu pour moderniser l’administration, rehausser sa performance et accompagner convenablement tous les projets de développement en cour ou à venir.

Pour relever le défi de cette nouvelle donne, l’Etat s’est donc mis à moderniser également son système administratif par la voie, non seulement d’un vaste programme de numérisation de ses outils ; mais également, par la voie de la formation. Se donnant les moyens de faire bénéficier à ses agents d’une formation digne de l’attente des usagers ou de la clientèle. C’est dans ce sens que l’Etat a mis en place un secrétariat exécutif, plus connu sous l’acronyme  «SECRA », spécialement chargé de réguler cette réforme.  L’objectif étant de transformer radicalement la fonction publique pour la rendre beaucoup plus professionnelle, compétente et performante.

Vu le résultat, cette volonté sans faille, affichée par le Président Ismaïl Omar Guelleh, pour accomplir son vaste programme de réforme tous azimuts, a aujourd’hui donné ses fruits et s’avère être une grande réussite.

Dans ce domaine, l’INAP n’a pas d’égal dans le pays et reste de loin le leader absolu de la formation administrative, de la gestion des ressources humaines et du management des organisations. Depuis l’année 2013 à ce jour, l’Institut a formé plus de 5824 cadres et agents réparties dans les catégories de formations dispensées par l’Institut dans les différentes cessions pour répondre aux besoins de l’administration publique, des établissements, des agences de l’Etat, ainsi que des collectivités locales et même du secteur privés. Des formations assignées à la qualité, à la performance  et à l’excellence dans le rendement des services tout long de la carrière des agents.

En cours, un programme de formation, d’une durée de 8 mois, au profit des contrôleurs de l’Inspection du Travail et de la CNSS. Les animateurs et les responsables des CDC de la capitale et des régions ont été également formés avec succès par une équipe de l’INAP aux mois de février et mars 2020. En faveur des Collectivités Locales, agents et élus bénéficient d’un programme de renforcement des capacités et suivent une session de formation à la carte dans les domaines de la décentralisation et de la gestion administrative et financière. Un accompagnement de grande qualité rendu possible grâce à un excellent partenariat avec la Mairie de Djibouti et l’AIMF.

L’Institut a assuré également des séminaires, des ateliers d’amélioration des connaissances ou des stages de suivi et d’évaluation ; sans oublier les stages d’apprentissage ou de perfectionnement  des langues telles que l’arabe, le français et l’anglais.

En collaboration avec le SESRIC et l’Organisation Arabe du Travail, l’INAP a également abrité durant  l’année 2019, des sessions de formation en Droit du Travail et en entreprenariat. 

Tous les modules de formation sont flexibles, souples et très bien adaptés aux besoins de tous les secteurs de l’administration publique, parapublique et privé. La durée et la dotation allouée restent cependant insuffisantes pour certaines  formations. Et selon les responsables de l’INAP, le manque de professeurs permanents et de cadres qualifiés en ingénierie de formation se fait sentir.

Cependant, l’arrivée d’un nouveau ministre du Travail a impulsé une nouvelle dynamique à l’institution. Un cadre d’orientation pour la période 2019-2022 a été élaboré. C’est dans cet esprit, que les programmes de formations continues et initiales planifiés pour les cinq prochaines années 2019-2023, sont basés sur des modules de management public assez variés et ciblés pour des catégories d’acteurs de l’administration. Notamment des formations professionnelles  avec diplômes à la clef grâce au soutien du Ministre du Travail chargé de la réforme de l’Administration, SEM Isman Ibrahim Robleh et la coopération avec une Institution française.

D’autant plus que l’Institut National d’Administration Publique, parallèlement aux programmes de formation qui lui sont propre, assure l’hébergement de certains centres de formation  appartenant à d’autres départements ministériels, tout en leur apportant la meilleure collaboration et assistance qui soit. A l’image du Centre d’Application Financière (CAF) créé par le Ministère du Budget, il y a presque deux ans, et qui a clôturé avec brio sa première session de formation. De l’avis de tous, la dualité INAP-CAF a été un énorme succès et doit servir d’exemple à tous les autres départements ministériels. Surtout, ceux qui continuent d’envoyer leurs agents à l’étranger sans se demander, si oui ou non, il est possible d’assurer les formations souhaitées à l’INAP. Ce choix réduirait des dépenses inutiles et empêcherait d’éparpiller les ressources que l’Etat alloue à la formation. D’ailleurs, ce dernier a tout intérêt à réduire les dépenses inutiles et à renforcer l’Institut dans tous les domaines, pour que celui-ci soit en mesure de former la totalité de ses agents. Cela ne pourra-être que bénéfique. L’Institut  proposera également des sessions de formations conjointes avec des institutions étrangères pour assurer sur place des sessions de formation destinée aux fonctionnaires des différents ministères.

L’INAP à l’heure du COVID-19

Face à la pandémie du COVID-19 et dans le cadre des initiatives prisent par le Gouvernement pour organiser un déconfinement progressive et la mise en place d’une méthode de rotation des effectifs, l’INAP a organisé mercredi 19 juin 2020, un atelier de présentation sur l’utilisation d’une plateforme de visioconférence performante, capable d’assurer et de faciliter le télétravail au sein de l’administration de l’Etat. Tous les responsables présents ont pu suivre avec succès toute la démonstration technique et tester la fiabilité du système à la fois sur PC et sur Smartphone. L’INAP est donc prêt et met à disposition une salle de visioconférence pour programmer des sessions de téléformation en faveurs des agents de l’administration. Les sessions de formation, suspendu depuis trois mois à cause du confinement, reprendront à partir de la dernière semaine de juin. Ces sessions se dérouleront sur place, par groupe, dans les salles de cours de l’INAP en respectant toutes les règles de sécurité ; mais aussi, et c’est une nouveauté, en visioconférence.

Compte tenu de toutes ces activités et des ambitions futures, l’Institut aura besoin d’une profonde révision, tant dans son organisation que dans son fonctionnement, pour s’améliorer et mieux réussir tous les programmes planifiés d’ici à l’horizon 2023. Une nouvelle loi est actuellement en préparation en ce sens au niveau du Secrétariat général du Ministère du Travail et de la Réforme de l’Administration et sera soumise pour approbation en conseil des ministres au cours de cette année 2020. Une année qui sera certainement déterminante pour dessiner les contours d’un nouvel Institut d’Administration Publique.

Avec le recul, le parcours fut long à se dessiner et parfois chaotique. Mais, c’est en le survolant à nouveau  que l’on peut constater à quel point le travail accompli est énorme. L’Institut Nationale de l’Administration Publique a aujourd’hui le potentiel d’assurer réellement toutes les formations nécessaires  à l’ensemble de l’administration de l’Etat. Cependant, il a besoin d’être renforcé pour que son rendement soit optimal et qu’il puisse viser un horizon encore plus lointain et laisser un héritage digne de ce nom aux générations futures. L’Etat a incontestablement beaucoup investi pour faire de l’Institut  ce haut lieu de la formation qu’il est devenu. Néanmoins, il a besoin encore de grandir, de s’élargir et de se développer pour atteindre tous ses objectifs et réussir parfaitement sa vocation de pépinière des commis de l’administration public.  Il mérite donc davantage d’égards de la part de l’Etat.