Dans un monde en constante mutation, où la culture devient un levier essentiel de cohésion sociale, d’identité et de développement durable, la République de Djibouti affirme sa détermination à valoriser son patrimoine et à encourager la créativité de sa jeunesse. Créée en 2023, l’Agence Nationale pour la Promotion de la Culture (ANPC) incarne cette ambition. En regroupant les institutions clés du secteur culturel, de la Bibliothèque nationale au Théâtre des Salines, elle devient un acteur stratégique central chargé de préserver la mémoire collective, de promouvoir les arts et d’accompagner l’innovation culturelle. À travers ses missions multiples et sa gouvernance renforcée, l’ANPC joue un rôle fondamental dans la construction d’une société djiboutienne plus éclairée, inclusive et tournée vers l’avenir.

Dans un contexte mondial caractérisé par l’accélération des mutations technologiques, la mondialisation des flux culturels et la montée en puissance des industries créatives, de nombreux États ont pris conscience du rôle central que joue la culture dans la préservation des identités, la cohésion sociale, la construction d’un imaginaire collectif et l’essor du développement durable. La République de Djibouti n’échappe pas à cette dynamique. Consciente de la richesse et de la diversité de son patrimoine, des potentialités créatives de sa jeunesse et des défis liés à la transmission des savoirs, elle a procédé à une profonde refonte de son paysage institutionnel en matière culturelle. Cette volonté s’est concrétisée par la création,

le 2 janvier 2023, de l’Agence Nationale pour la Promotion de la Culture, en abrégé ANPC, par la loi n°173/AN/22/8ème L.

Érigée en établissement public administratif à caractère artistique et culturel, l’ANPC est dotée de la personnalité morale ainsi que d’une autonomie administrative et financière. Elle incarne désormais l’instrument stratégique de l’État en matière de gouvernance culturelle. Cette agence est née de la fusion de plusieurs institutions embryonnaires qui, depuis des décennies pour certaines, portaient les missions de sauvegarde, de création et de diffusion culturelles : le Théâtre des Salines (60 ans en cette année 2025), le Mémorial du Barrage de Djibouti, la Bibliothèque et les Archives Nationales, ainsi que l’Institut djiboutien des Arts et de la Cinématographie. À ces entités s’ajoute également un projet de Musée national, éclaté en musée thématique et musée national, actuellement en cours d’élaboration, qui viendra compléter ce paysage institutionnel et renforcer le dispositif de collecte, de conservation et de valorisation du patrimoine culturel matériel et immatériel.

Ce regroupement institutionnel, mûrement réfléchi, répond à un double objectif : renforcer la coordination entre les différents segments du secteur culturel et assurer une meilleure lisibilité et efficacité de l’action publique dans ce domaine. En réunissant sous une même autorité l’ensemble des composantes majeures de la vie culturelle, le gouvernement djiboutien dote le pays d’un outil à la hauteur des enjeux du XXIe siècle.

L’ANPC se distingue non seulement par son statut administratif, mais surtout par l’ampleur et la profondeur de ses missions. Elle a pour vocation de développer, promouvoir et préserver la culture djiboutienne dans toutes ses dimensions, à travers ses sept départements fusionnés. Son action s’étend de la conservation patrimoniale à la formation des artistes, en passant par la gestion des archives, l’organisation de l’espace et la production cinématographiques, la création scénique et l’éducation culturelle. L’agence élabore un cadre stratégique commun au développement culturel, tout en accompagnant la recherche, les études, la coopération interinstitutionnelle et l’émergence de nouveaux talents.

Conformément aux dispositions légales régissant les établissements publics administratifs à Djibouti, l’ANPC repose sur une gouvernance tripartite constituée d’une direction générale, d’un conseil d’administration et d’une agence comptable. Elle s’articule également autour de trois directions opérationnelles : la direction des départements, la direction scientifique et d’appui, et la direction des services communs.

Au sein de cette architecture, deux composantes méritent une attention particulière tant leur rôle est fondamental : la Bibliothèque nationale et les Archives nationales. Elles incarnent l’ossature documentaire et mémorielle de l’État, assurant la sauvegarde du patrimoine intellectuel, la structuration de la mémoire nationale et la mise à disposition du savoir au plus grand nombre.

La Bibliothèque nationale assume une mission de service public essentielle : collecter, cataloguer, conserver, enrichir et diffuser le patrimoine documentaire djiboutien, ainsi que les publications étrangères ayant trait à Djibouti. À cet effet, elle est responsable de la mise en œuvre du Dépôt légal, mécanisme obligatoire qui garantit la réception systématique de tout document imprimé, publié ou diffusé sur le territoire. Cette mesure vise à constituer un corpus national exhaustif de la production éditoriale, utile tant pour la mémoire collective que pour la recherche scientifique et l’enseignement supérieur. La bibliothèque nationale est également chargée du contrôle bibliographique national, de la production de la bibliographie officielle et de la normalisation des pratiques documentaires dans le pays. Elle travaille activement à l’enrichissement de ses collections en mettant en place des politiques d’acquisition, de don et d’échange avec des bibliothèques et institutions partenaires, tant au niveau national qu’international. En parallèle, elle s’investit dans la coopération documentaire régionale et dans les réseaux de bibliothèques nationales et numériques africaines, ce qui permet une meilleure visibilité du patrimoine documentaire djiboutien sur la scène internationale.

Espace de savoir et de citoyenneté, la Bibliothèque nationale est également un centre vivant de médiation culturelle. Elle organise régulièrement des conférences, des lectures publiques, des expositions thématiques, des rencontres avec des écrivains et des chercheurs. Elle accueille les élèves et les étudiants dans le cadre de visites pédagogiques, et contribue ainsi à la formation du jugement critique et à la promotion de la lecture. Elle entend développer une politique d’inclusion numérique et de bibliothèques mobiles pour toucher les populations rurales et les publics éloignés de l’offre culturelle. À cela s’ajoute un projet ambitieux de numérisation des collections anciennes, incluant des manuscrits, cartes, photographies, affiches, journaux anciens, qui seront progressivement mis en ligne pour un accès élargi.

Les Archives nationales : mémoire administrative, sociale et historique de de la RDD

Les Archives nationales, quant à elles, constituent le sanctuaire de la mémoire administrative, sociale et historique de la République de Djibouti. Leur mission consiste à organiser la collecte, la conservation, le tri, le classement et la mise à disposition des documents produits et/ou reçus par les administrations centrales, les institutions publiques, les collectivités locales, mais aussi par des entités privées ou des individus dont les documents présentent un intérêt historique ou patrimonial. À travers cette activité, les Archives permettent non seulement de garantir la transparence de la gestion publique, mais aussi de restituer l’histoire du pays dans sa diversité et sa complexité.

Les Archives nationales contribuent de manière active à la reconstruction de la mémoire nationale, à travers la valorisation des documents d’époque, des correspondances officielles, des textes juridiques, des photographies, des récits oraux, ou encore des archives sonores et audiovisuelles. Elles collaborent avec les chercheurs, les enseignants, les journalistes, les étudiants et les historiens pour offrir un accès rigoureux et organisé à cette matière documentaire. Elles encouragent également la conservation des archives privées, notamment les archives familiales, les fonds de personnalités publiques, les récits autobiographiques, les témoignages communautaires, qui viennent enrichir et nuancer le récit national.

Elles jouent aussi un rôle crucial dans l’accompagnement des administrations pour une meilleure gestion de leurs documents courants et intermédiaires, en les conseillant sur les procédures d’élimination, de versement et d’archivage. À l’ère de la transformation numérique, les Archives nationales se préparent à la mise en place d’un système d’archivage électronique (SAE), qui permettra une conservation pérenne, sécurisée et accessible des documents numériques produits par les institutions publiques.

L’ANPC ne se limite pas au patrimoine écrit. Elle s’illustre également par ses actions dans les domaines des arts vivants, de la formation artistique, de la mémoire collective et du cinéma. Le Théâtre des Salines, intégré à l’agence, est une plateforme incontournable de la scène artistique djiboutienne. Il contribue à la diffusion du théâtre, de la danse, de la musique et des arts de la scène en général, tout en soutenant la création locale, la formation des jeunes comédiens et la mise en réseau des artistes. Il favorise l’accès du public à un répertoire varié, allant des œuvres classiques aux créations contemporaines, et participe activement à la vie culturelle de la capitale et des régions.

Le Mémorial du Barrage de Djibouti, de son côté, constitue un espace de mémoire nationale, dédié à l’histoire du développement du pays et aux grands chantiers d’intérêt public. Par ses expositions permanentes, ses documents d’archives, ses maquettes, ses témoignages et ses programmes éducatifs, il propose une approche vivante de l’histoire, destinée notamment aux scolaires et aux jeunes publics.

Quant au Musée national, son projet est actuellement en cours d’élaboration. Conçu comme une future institution phare, ce musée aura pour vocation de rechercher, collecter, conserver, interpréter et exposer le patrimoine matériel et immatériel du pays. Il entend refléter la diversité culturelle djiboutienne à travers des expositions ethnographiques, historiques, artistiques et scientifiques, tout en impliquant les communautés locales dans une démarche inclusive et participative. Une fois achevé, il viendra combler un vide et s’imposer comme un outil pédagogique, scientifique et touristique de premier plan, inscrit dans les standards muséaux internationaux.

Le volet cinématographique encadré par l’ANPC accompagne les projets de jeunes réalisateurs, et encourage à l’heure actuelle la création de courts métrages nationaux.

Dans toutes ses composantes, l’ANPC œuvre à faire de la culture un droit fondamental, un levier de cohésion nationale et un moteur de développement durable. Elle place l’art, la mémoire, le savoir et la créativité au cœur du projet républicain. Elle contribue à bâtir une société plus éclairée, plus inclusive et plus confiante dans son avenir. À travers l’ANPC, Djibouti affirme avec clarté et conviction sa volonté de faire de la culture un pilier de son développement et un marqueur de son identité. En conciliant héritage et innovation, en valorisant les traditions tout en accompagnant les pratiques contemporaines, l’agence se place à la croisée des temps, comme un pont entre hier et demain, au service de tous les Djiboutiens.

MOHAMED ADEN DJAMA

Mohamed Houssein Doualeh, Directeur Général de l’ANPC

“L’ANPC œuvre à une culture vivante, connectée et inclusive”

À la croisée des traditions et des aspirations contemporaines, l’Agence Nationale pour la Promotion de la Culture (ANPC) joue un rôle clé dans la structuration du paysage culturel djiboutien. Entretien avec son directeur général, M. Mohamed Houssein Doualeh, qui revient sur les missions de l’institution, l’importance des Archives et de la Bibliothèque nationale, les enjeux du numérique, et les projets porteurs d’avenir pour une culture accessible, vivante et fédératrice.

Monsieur le Directeur Général, pourriez-vous nous présenter l’ANPC, son mandat et ses principales missions ?

L’Agence Nationale pour la Promotion de la Culture (ANPC) est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle du Ministère de la Jeunesse et de la Culture. Créée pour structurer et impulser la politique culturelle nationale, elle a pour mandat principal de préserver, valoriser et promouvoir le patrimoine culturel djiboutien dans toute sa diversité.

L’ANPC supervise sept départements : la Bibliothèque nationale, les Archives nationales, le Mémorial du Barrage de Djibouti (EEGA), le Musée national, le Théâtre des Salines, le département des Études et de la Formation artistique et culturelle (DEFAC), et la Cinématographie. À travers ces structures, elle œuvre à la fois pour la conservation du patrimoine, la diffusion de la culture, le soutien à la création artistique et la démocratisation de l’accès à la culture.

L’ANPC supervise notamment la Bibliothèque Nationale. Quel est son rôle au sein de la vie culturelle et éducative de notre pays ?

La Bibliothèque Nationale est un pilier de la vie intellectuelle et éducative à Djibouti. Elle est à la fois un centre de ressources documentaires, un lieu de formation continue, et un espace de sensibilisation à la lecture et au savoir. Elle accueille un public varié : élèves, étudiants, chercheurs, mais aussi lecteurs curieux et amoureux des lettres.

Nous avons pour ambition de renforcer sa présence dans le tissu éducatif, notamment en développant les partenariats avec les établissements scolaires et universitaires, en modernisant ses fonds, et en encourageant la production littéraire locale. La Bibliothèque joue également un rôle crucial dans la préservation du dépôt légal et dans la valorisation du patrimoine éditorial national.

Et en ce qui concerne les Archives Nationales, quelle est leur fonction et quelle est leur importance pour la mémoire collective ?

Les Archives Nationales constituent la mémoire vivante de la République. Elles assurent la collecte, la conservation, le traitement, la communication et la valorisation des documents produits par l’administration et d’autres acteurs publics ou privés ayant une valeur historique. Au-delà de leur rôle administratif, elles permettent, une fois dépassée les premières années d’existence, aux chercheurs, historiens, citoyens et jeunes générations de mieux comprendre notre passé pour mieux penser notre avenir. La structuration actuelle des Archives répond à un double enjeu : accompagner les services publics dans la gestion de leurs documents et offrir à la Nation un socle de mémoire fiable et accessible. Aujourd’hui, un dynamisme certain est à l’œuvre, notamment avec les premiers versements structurés vers les Archives Nationales et l’engagement de la Présidence de la République à travers le Secrétariat Général du Gouvernement.

Comment l’ANPC articule-t-elle sa mission patrimoniale avec les enjeux contemporains du numérique et de l’inclusion culturelle ?

Nous sommes pleinement conscients que la culture du XXIe siècle doit s’inscrire dans les mutations numériques et les exigences d’inclusion. C’est pourquoi nous menons une politique volontariste de numérisation de nos fonds, tant pour la Bibliothèque Nationale que pour les Archives et les musées. Le numérique est à la fois un levier de préservation et de diffusion. Par ailleurs, nous avons à cœur de rendre la culture, à travers les 7 départements de l’ANPC, accessible à tous, sans distinction d’âge, de genre ou de territoire. Cela passe par des programmes de médiation, des événements hors des centres urbains, des formations, et l’implication de la jeunesse à travers des initiatives participatives, y compris sur les réseaux sociaux.  L’ANPC œuvre à une culture vivante, connectée et inclusive.

Enfin, quels sont les grands chantiers ou projets à venir que l’ANPC souhaite porter dans les prochaines années ?

Plusieurs chantiers structurants sont à l’agenda. D’abord, la construction ou la rénovation des infrastructures culturelles : bibliothèque numérique, centre d’archives des régions, musées interactifs thématiques et/ou nationale. Ensuite, le développement de programmes de formation professionnelle dans les métiers de la culture et du patrimoine, en partenariat avec des institutions régionales et internationales.

Nous travaillons également sur la mise en place d’un portail numérique culturel national pour centraliser l’accès aux ressources culturelles djiboutiennes. Enfin, nous portons des projets phares tels que le Salon du Livre de Djibouti, le Colloque sur les Archives nationales, ou encore le Concert pour la Paix, qui témoignent de notre volonté de faire de la culture un moteur du vivre-ensemble, du rayonnement international de Djibouti et du développement durable.

 PROPOS RECUEILLIS PAR MOHAMED ADEN DJAMA