Des mesures pour renforcer les anciennes lois en vigueurs dans notre pays, des engagements au niveau de l’état pour non seulement prévenir les violences à temps, mais à protéger également les victimes, l’installation de structures de protection et d’assistance dans les différentes communes de la capitale et dans l’enceinte des conseils régionaux,…etc, notre gouvernement a mis en place tout un arsenal juridique pour mieux protéger les femmes et les enfants à toutes formes de violences et une stratégie nationale pour prendre en charge les victimes. Adoptée par l’assemblée nationale, puis promulguée par le président de la république le 13 février dernier, cette loi garantie aux femmes et aux enfants de se développer et de prospérer dans un environnement sécurisé et exempte de violence. Il s’agit ici des mesures visant à punir toutes les formes de violence et une prise en charge adéquate des victimes. 

Quatrième objectif stratégique parmi les douze identifiés dans le programme d’action de Pékin, la violence à l’égard des femmes et des enfants est reconnu par l’ensemble des pays du monde comme un champ d’action prioritaire. En effet, la femme joue un rôle primordial dans le processus de développement économique des pays. Quant à l’enfant, il représente les citoyens de demain. Cependant, les violences contre les femmes et les enfants ont des conséquences dévastatrices sur la santé et le bien-être des femmes et des enfants. Donc les protéger, permettrait à leurs épanouissement et à développer les sociétés. C’est en ce sens que notre pays a mis en place, des mesures visant non seulement à prévenir, à protéger et à prendre en charge les victimes de violence mais à poursuivre également les auteurs en justice.

Des mesures pour renforcer les lois en vigueurs. Rappelons que cette loi ne contredit pas les anciens textes existants dans notre pays en ce qui concerne la protection des femmes et des enfants mais elle la complète par un volet important de prévention et de prise en charge.

Cette loi reconnais donc comme violence à l’égard des femmes: «Toute atteinte physique, morale, sexuelle ou économique à l’égard des femmes, basée sur une discrimination fondée sur le sexe et qui entraîne pour elles, un préjudice, une souffrance ou un dommage corporel, psychologique, sexuel ou économique et comprend également la menace de porter une telle atteinte, la pression ou la privation de droits et libertés, que ce soit dans la vie publique ou privée».

Pour ce qui est de l’enfant, «tout acte de violence causant ou pouvant causer aux enfants un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles, psychologiques, morales, économiques et culturelles y compris la menace de tels actes, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée» est reconnue selon cette loi comme une violence.

A noter que cette loi n’interdit pas aux parents d’éduquer leurs enfants mais interdit seulement les châtiments corporels. Outre les agressions sexuelles, qui sont punies sévèrement, cette loi condamne aussi les comportements ou propos et attitude qui portent atteinte à la personnalité, à l’image, à l’estime de soi et à l’équilibre intérieur de la femme ou de la fille. Les pratiques néfastes, dont notamment les mutilations génitales féminines sont citées comme violence. «Toute pratique néfaste et dégradante à l’égard des femmes et des filles tirant leur justification dans les coutumes, traditions;  les actes ou les comportements qui portent atteinte à l’intégrité physique de la femme ou de la fille» est mentionné dans le texte parmi les violences qui ne seront plus tolérés.

Dans un autre volet, cette loi permet aux femmes de jouir de ses droits socio-économiques en les protégeant contre les actes pouvant ralentir ou empêcher leurs épanouissements économiques ou financiers.

«Tout acte ou négligence affectant la survie de la victime et consistant à transformer, soustraire, détruire, retenir ou détourner des objets, documents, biens et valeurs, droits patrimoniaux ou ressources économiques destinées à couvrir ses besoins et pouvant s’étendre aux dommages causés aux biens communs ou propres à la victime» est également cité pour protéger économiquement la femme.

 Des engagements pour prévenir les violences à temps et pour mieux protéger les victimes. Dans le domaine de la prévention, l’état s’engage à travers cette loi, à mettre en place des politiques et des stratégies nationales, des programmes sectoriels, de prendre toutes les mesures nécessaires dans le but d’éliminer toutes les formes de violences à l’égard des femmes et des enfants dans l’espace familial, l’environnement social, le milieu éducatif, de formation professionnelle, sanitaire, culturel, sportif et médiatique. Il est également question au niveau de l’état, d’une prise en charge adéquate de la victime mais aussi de l’agresseur en l’orientant vers un psychologue ou autres spécialiste au lieu de l’envoyer systématiquement en prison. 

Il est à souligner que les départements ministériels et autres institutions publiques concernées, sont donc chargés de prendre toutes les mesures nécessaires visant à prévenir les violences à l’égard des femmes et des enfants. Il s’agit donc pour ces départements ministériels d’élaborer une politique de formation spécifique en matière d’égalité femme/homme dans le domaine de la lutte contre ces actes néfastes en vue de les doter les connaissances et les techniques nécessaires qui leurs permettraient de mieux traiter les questions de violence dans l’espace éducatif. En ce qui concerne la protection, les victimes, en l’occurrence les femmes et les enfants bénéficient une protection juridique appropriée, l’accès à l’information dont notamment des conseils juridiques et les services disponibles, une aide judiciaire, une réparation, un suivi médical et psychologique, (l’accompagnement social approprié et le cas échéant, le bénéfice de la prise en charge publique et associative, y compris l’écoute) et l’hébergement immédiat dans la limite des moyens disponibles.

Mise en place de structures de protection et d’assistance. Une unité spécialisée chargée d’accueillir et d’écouter les femmes et des enfants victimes de violences ou menacées de violences; d’examiner rapidement les mesures urgentes que requièrent les circonstances surtout quand il s’agit de mineur; de convoquer ou de procéder à l’arrestation des auteurs, sera donc mise en place au sein de chaque poste de police et de gendarmerie. Il sera également crée, au niveau des communes et des conseils régionaux, des cellules d’écoute et d’accompagnement de proximité ou un centre de prise en charge et de protection des femmes et des filles victimes de violences. «Ces centres accueillent en urgence les victimes, leur offrent la sécurité, leur assurent des services d’appui complets, notamment une prise en charge médicale leur permettant de bénéficier de soins de santé complets et gratuits, un accompagnement psycho-social et éventuellement une orientation vers les instances judiciaires. Les femmes victimes de violences particulièrement les filles menacées de mariage forcé ou arrangé, les filles abusées sexuellement, sont prioritaires dans les centres d’accueil» précise cette loi.

Les organisations de défense des droits humains, les autorités coutumières et religieuses pourront également de leurs côtés créer des structures d’accueil à l’image de celles de l’Etat.

Rachid Bayleh

Le point avec…Cheick Abdourahman Mohamed Ali alias Cheick Abdourahman Shamsudin,

Président du haut conseil islamique de Djibouti

«Dans la religion musulmane, il est strictement interdit de détériorer le corps de la femme»

La mise en place de cette loi a trait au programme de promotion de la famille que notre gouvernement a entrepris depuis 2011. Comme vous le savez, au niveau de la famille la religion musulmane responsabilise l’homme. Il donc la responsabilité de loger, d’habiller et de nourrir sa femme. Dans le cas où il y a un différend, il incombe à l’homme de régler seul ce problème, s’il n’arrive pas c’est en ce moment qu’interviennent les deux familles, celle de l’homme et celle de la femme. Si ces derniers n’arrivent pas, l’affaire passe dans l’étape une autre étape, qui est celle des religieux.

En ce qui concerne, les violences quelque soient leurs formes, notre religion ne le permet pas. Il n’y a pas de verset dans ce sens, notre prophète (Paix et bénédiction soient en lui) n’a jamais frappé ses épouses. Et c’est donc en ce sens que nous pouvons dire qu’il est strictement interdit de détériorer le corps de la femme. Pour ce qui est des enfants, il est également prévu que les parents ont la charge de les éduquer. Vous savez comme moi, qu’ils sont fragiles et les frapper peut dans certain cas les blesser physiquement, donc ce qui nous permet de dire ici aussi que châtier n’est pas souhaité dans l’islam. Donc cette loi ne fait que protéger nos enfants et nos femmes, elle ne s’oppose pas à la religion musulmane donc c’est une bonne chose

Propos recueillis par RB