Le Ministre de l’Energie, chargé des Ressources Naturelles, M. Yonis Ali Guedi a inauguré deux nouvelles stations-service dans la capitale, le Mercredi 21 Décembre 2022. Nous avons sauté sur l’occasion pour solliciter une interview qu’il a bien voulu nous accorder pour examiner en profondeur le secteur des Hydrocarbures et son développement dans notre pays. Entretien…

‘’Avec l’inauguration de ces deux nouvelles stations-service, NOC et UCIG, ajoutées à celles ouvertes dans les régions de l’intérieur par RUBIS, nous sommes à ce jour, à plus d’une dizaine de nouvelles stations-service construites ou rénovées dans tout le pays, en moins de 5 ans, ce qui démontre la vitalité et le dynamisme de ce secteur des hydrocarbures et témoigne plus globalement de son essor et de son développement dans notre pays’’

dixit le Ministre de l’Energie, chargé des Ressources Naturelles, Yonis Ali Guedi.

Monsieur le Ministre, quelles sont les missions régaliennes de votre Département en matière d’hydrocarbures ?

Yonis Ali Guedi : J’aimerais tout d’abord vous remercier pour cette rencontre qui me donne l’occasion de présenter le secteur des hydrocarbures dans notre pays et plus généralement les missions régaliennes de mon Ministère en matière de développement de ce secteur et de dresser les nombreuses réalisations dans ce domaine ainsi que les perspectives d’avenir. Conformément à la Loi N°163/AN/22/8ème Ldu 21 Juillet 2022 portant réorganisation du Ministère de l’Energie, chargé des Ressources Naturelles, le MERN élabore et met en œuvre des politiques sectorielles dans les domaines de l’énergie et des ressources naturelles. Il promeut également le développement de l’exploitation des ressources minières, pétrolières et des énergies renouvelables. A ce titre,ilest le maitre d’œuvre et le gendarme des politiques publiques en matière de pétrole. Le MERN assure également la coordination des activités d’exploration et de production des hydrocarbures, mais aussi l’approvisionnement, le stockage, le raffinage, le transport et la distribution des produits pétroliers.Il veille aussi à l’application de la réglementation en vigueur en matière d’hydrocarbures et assure lecontrôledu fonctionnement du marché tout en suivant l’activité des entreprises exerçant dans ce domaine. Permettez-moi d’insister sur ce point, le MERN met un point d’honneur au succès de la politique des stocks stratégiquesde sécurité en matière depétrole brut et de produits raffinés, via un approvisionnement sécurisé et fiable de produits pétroliersde qualité. Pour finir, c’est le MERN qui est à l’œuvre pour négocier des contrats, élaborer et signer des conventions ou des accords en matière d’hydrocarbures ou de produits dérivés et de gaz naturel et/ou GPL. Il est aussi le détenteur légal des autorisations de franchise d’importation ou d’exportation de matériels ou produit qu’il accorde au secteur privé conformément à la réglementation en vigueur. La direction des Hydrocarbures du MERN est le cœur battant qui assure le bon fonctionnement du secteur à travers une coordination irréprochable des politiquespubliques en matière de pétrole. Ainsi, elle assure la gestion et la mise en valeur optimale des ressources nationales en hydrocarbures et agit puis exerce un contrôle à fortiori sur les activités pétrolières en faisant respecter les prérogatives régaliennes en matière d’hydrocarbures.

Il y a quelques jours de cela, vous avez procédé, en présence de votre collègue, le Ministre délégué, chargé de la Décentralisation, à l’inauguration de deux nouvelles stations-service dans la capitale. Quelles sont les tenants et les aboutissants de cette politique de déploiement de ces infrastructures sur toute l’étendue du territoire national ?

Yonis Ali Guedi : Oui effectivement, avec mon collègue, M. Kassim Haroun Ali, le Ministre délégué, chargé de la Décentralisation, nous avonsinauguré deux nouvelles stations-service dans la capitale, l’une dans la commune de Boulaos, l’autre dans la commune de Balbala. Une station-service, ce n’est pas uniquement un offre de carburant aux automobilistes, c’est aussi un booster pour le commerce local avec les activités connexes qui s’y agrègent, comme les services d’entretien des véhicules ou la vente des produits de base. L’emplacement de ces deux nouvelles stations-service NOC et UCIG sur une routes très fréquentées de la capitaleva forcément revitaliser  le commerce dans les quartiers environnants. Pour rappel, Rubis Energie Djibouti avait inauguré des stations-services dans les régions de Tadjourah et Obock, dans le nord du pays et à Dikhil, au sud-ouest. Ce qui a mis un terme aux trafics illicites de carburants de contrebande et revigoré le tourisme dans ces régions.

A ce jour, plus d’une dizaine de nouvelles stations-service ont été construites ou rénovées en moins de 5 ans, ce qui témoigne de la vitalité du secteur des hydrocarbures. Notre objectif est de fournir aux automobilistes du carburant en quantité suffisante et de très bonne qualité et créer de la valeur ajoutée et des emplois. J’aimerais saluer  les efforts de ces sociétés pétrolières pour la construction de nouvelles stations-service et féliciter les Directions des Groupes Rubis, NOC et UCIG pour leur investissement. Le MERN poursuivra sa politique de déploiement des produits pétroliers sur l’ensemble du territoire national et nous comptons construire prochainement d’autres stations-service dans la capitale, à Ali-Sabieh, à Tadjourah et dans la région d’Arta.

Et quels sont le rôle et les missions de la Société Internationale des Hydrocarbures de Djibouti (SIHD) dans ce secteur ?

Yonis Ali Guedi : Il faut savoir que la Société Internationale des Hydrocarbures de Djibouti (SIHD)est une société publique de pétrole intégrée qui dispose de la personnalité morale et d’une autonomie de gestion. Son principal objectif est d’assurer l’importation des hydrocarbures et produits dérivés aux meilleurs prix pour accompagner ledéveloppement du secteur des hydrocarbures.Au fil du temps, elle est devenue la pièce maitresse du gouvernement qui détient l’exclusivité de l’importation des produits pétroliers et dérivés. Elle a également en charge, la promotion du pays comme Hub régional et international de la redistribution des hydrocarbures et dérivés. La SIHD joue donc un rôle déterminant en matière de développement du secteur des hydrocarbures dans notre pays.

Quel bilan faites-vous des réalisations de votre département dans le secteur des hydrocarbures ?

Yonis Ali Guedi : Les hydrocarbures représentaient 29,5 % du total du volume du trafic portuaire de notre paysen2020. Le MERN devant permettre à l’Etat d’en tirer le meilleur profit pour le financement du développement économique et social du pays,  nous avons lancé le travail d’exploration à Djibouti dès septembre 2011 avec l’entreprise canadienne Oyster Oil and Gaslimited, dont les études ont donné des résultats prometteurs et ont ouvert la voie à des recherches plus approfondies menés par la société Laurasia Energyavant d’entamer la phase d’exploitation des réserves d’hydrocarbures gisant dans le sous-sol djiboutien.

Nous avons égalementréformé le code pétrolier national afin d’anticiper les mutations dans le secteur et l’adapter aux évolutions dans les industries pétrolière et gazières internationales.A cet effet, nous avons mis en place un cadre règlementairefavorable qui fluidifie le fonctionnement du secteur des hydrocarbures.

Ainsi, nous avons réorganisé le Ministère avec l’adoption de laLoi n°163/AN/22/8ème L qui a créé une inspection générale, un service de la coopération internationale et un service de la Statistique.Notre paysdépendant des importations deproduits pétroliers, le MERN via la SIHD et la Direction des Hydrocarbures assureune disponibilité des produits pétroliers sur le territoire national et fait bénéficier les consommateurs djiboutiens deproduits compétitifs et de bonne qualité. Sur un autre plan, l’élargissement du parc automobile djiboutien a entrainé  l’augmentation de la consommationdeproduits pétroliers qui est passée de 188 183 m3 en 2020à plus de 200 090 m3 en 2021 tous produits confondus, soit une progression de la consommation annuelle de plus 6.3% par an. Aussi, nous veillonsà ce que notre pays se dote d’un stock d’urgence et d’un stock stratégique pour faire face aux crises et aux perturbations éventuelles exogènes dans le but de garantir un approvisionnement constant à prix régulé. C’est d’ailleurs ce qui a permis de stabiliser les prix à la pompe et de fournir aux consommateurs djiboutiens des produits pétroliers au même prix malgré la hausse affichée des prix au niveau FOB durant la période de la pandémie de COVID 19. Nous sommes ravis de l’augmentation du nombre de stations-service en activité sur le territoire national. Pour mieux gérer ces activités, nous avons délivré plusieurs autorisations et menons des inspections périodiques de ces installations pétrolières afin d’assurer le respect des mesures sécuritaires et environnementales.Enfin, en Septembre 2022, nous avons signé un accord-cadre de coopération pétrolière et gazière avec le Ministère du pétrole Sud-Soudanais prévoyant la construction d’un pipeline reliant le Soudan du Sud aux ports de Djibouti en passant par l’Ethiopie.

Monsieur le Ministre, comment s’annonce l’avenir du secteur des hydrocarbures à Djibouti ?

Yonis Ali Guedi : Notre pays est idéalement situé à la croisée du continent africain et de la péninsule arabique, sur le détroit de Bab El-Mandeb, qui est un passage névralgique du commerce maritime mondial surtout pour ce qui est du transport d’hydrocarbures. Sous le leadership du Président de la République, Son Excellence Monsieur Ismail Omar Guelleh, notre ambition est de faire de Djibouti un Hub énergétique en capacité de desservir l’ensemble de la région Est-Africaine à la fois sur mer et sur terre.

Cela implique la construction d’infrastructures de stockage de produits pétroliers, du gaz tels que le GPL, d’une raffinerie, mais aussi de développer le secteur de l’export. Nous comptons finaliser bientôt la construction du terminal pétrolier multi produits de Damerjog pour renforcer la sécurité énergétique et répondre aux besoins pressants des compagnies nationales. Notre but est de sécuriser les approvisionnements du pays avec la constitution d’un stock stratégique représentant 90 jours de consommation nationale (3 mois). Les importations de ces produits augmentent considérablement d’année en année et le pays manque de capacité de stockage. En construisant cette nouvelle infrastructure, la SIHD compensera cette demande croissante et notre pays s’assurera une autonomie énergétique, toute en compensant les fluctuations d’approvisionnement. Etant au cœur d’un marché régional de plus de 350 millions d’habitants, notre pays dispose d’un potentiel de développement pour devenir un acteur stratégique dans la Corne de l’Afrique dans le domaine des hydrocarbures.

Dans cette optique, la SIHD projette le développement d’une raffinerie avec une capacité de 50.000 baril/jour non seulement pour le marché national mais aussi pour desservir le marché régional (l’Ethiopie, la Somalie ainsi que les pays enclavés de l’Afrique de l’Est comme le Soudan du Sud). De plus, comme vous le savez, en Septembre 2022, nous avons signé un accord-cadre de coopération pétrolière et gazière avec le Ministère du pétrole Sud-Soudanais.

Nous espérons que ce projet de construction du pipeline qui reliera le Soudan du Sud, l’Ethiopie et Djibouti sera concrétisé rapidement afin d’exporter les produits pétroliers sud soudanais vers les marchés mondiaux via le port pétrolier de Damerjog. Nous prévoyons également la construction d’un dépôt gazier. Enfin, pour cette nouvelle année 2023, nous espérons le démarrage du projet de connexion du rail à Horizon Djibouti Terminal Limited (HDTL) et son extension afin d’accroître ses capacités de stockage des produits pétroliers. Nous travaillons également à la mise en route du Mégaprojet de construction du gazoduc qui permettra le transport du gaz naturel éthiopien vers les ports de Djibouti en vue de son exportation vers les marchés mondiaux.

Il s’agit là de deux projets qui revêtent une importance capitale pour les deux pays frères et amis, Djibouti et l’Ethiopie car ils sont porteurs d’un potentiel de croissance économique considérable, de création d’emplois directs et indirects induits et renforceront notre développement socio-économique.

De plus, la concrétisation de ces projets va accroître davantage le niveau de complémentarité économique entre nos deux pays. Vous l’aurez compris, les perspectives d’avenir dans le secteur des hydrocarbures de notre pays sont rayonnantes et prometteuses.