
Le directeur général de l’ANPI, Mahdi Darar Obsieh, nous a accordé hier une interview.
Une rencontre au cours de laquelle il a répondu sans ambages à nos interrogations sur de multiples aspects inhérents au climat djiboutien des affaires. Entretien.
« L’AMELIORATION DU CLIMAT DES AFAFIRES : UN LEVIER POUR LA CROISSANCE ECONOMIQUE ET LA BONNE GOUVERNANCE »
Un mot sur la performance réalisée par notre pays dans la compétitivité mondiale en matière de facilité de faire affaires et d’attractivité des investissements.

Dans le cadre de l’amélioration du climat des affaires et des investissements, notre pays a mis en œuvre une stratégie ambitieuse de réforme.Le résultat est bien à la hauteur de l’engagement des autorités nationales et des efforts consentis par les institutions nationales concernées, sous la coordination de l’Agence Nationale pour la Promotion des Investissements. Les reformes réalisées ont assuré une meilleure performance de notre environnement des affaires par son classement parmi les 10 meilleurs pays réformateurs; avec de gain de points significatifs aux différents critères. Entre 2017 et 2019, notre pays est ainsi passé d’un classement général de la 171ème à la 99ème position sur 183 économies évaluées, d’où un gain de 72 places.
Au niveau d’un certain nombre de critères stratégiques, Djibouti a gagné des points variant de 36 à 92 points, ce qui constitue un phénomène rarissime pour ne pas dire unique depuis l’instauration du système de notation dit Doing Business de la Banque Mondiale en 2003. Le rapport Doing Business 2019, publié au 31 Octobre 2018, a mis en relief la sécurité juridique et judiciaire des investisseurs en République de Djibouti par son classement à la deuxième place du monde en matière de protection des investisseurs. Djibouti s’est également caractérisé, avec l’Inde, par être cité parmi les deux seuls pays au monde à apparaitre dans le peloton de dix meilleurs pays réformateurs du monde sur deux années consécutives.
Quelles sont les grandes axes de ce processus de réforme qui a valu a notre pays ce progrès considérables en matière de climat des affaires et qui ont amélioré sa compétitivité ?
La création et le développement des entreprises a été facilitée par la mise en place d’une plateforme de guichet unique. Djibouti a facilité et rendu plus transparent le transfert de propriété, en réduisant les frais d’enregistrement, en fixant des délais stricts pour l’enregistrement du contrat de vente auprès des autorités fiscales et en scannant la majorité des titres fonciers de Djibouti-Ville et en exigeant par la loi que toute transaction immobilière soit enregistrée au cadastre afin de devenir opposable aux tiers.
Il a été créé une instance consultative paritaire et indépendante dite « Commission Nationale de Conciliation » destinée à résoudre les litiges entre les contribuables et les administrations fiscales et domaniales
L’Etat a volontiers adopté une batterie de mesures fiscales de réduction et/ou d’exonération pour l’essor du secteur privé qui demeure le moteur du développement économique et de création de richesses.
Djibouti a renforcé l’accès au crédit en élargissant l’éventail des actifs pouvant être utilisés en garantie, en permettant l’utilisation d’actifs futurs en garantie, en permettant une description générale des dettes et obligations et en accordant aux créanciers garantis une priorité absolue en dehors de la faillite.
Djibouti a consolidé les mesures de protection des investisseurs minoritaires en exigeant une plus grande divulgation des transactions avec les parties intéressées, en renforçant les recours contre les administrateurs intéressés, en élargissant l’accès à l’information sur les sociétés avant le procès, en renforçant les droits des actionnaires et leurs rôles dans les principales décisions des sociétés, en clarifiant les structures de propriété et de contrôle et en exigeant plus de transparence de la part des sociétés.
La réforme modifiant et complétant la législation en matière commerciale a institué les dispositions sur les suretés mobilières qui sont constituées dès lors qu’il existe un contrat de garantie entre le créancier et le débiteur après que le créancier ait donné une valeur au bien grevé de sûreté et que le débiteur continue de garder ses droits sur ce bien. C’est une garantie mobilière sans dépossession.
Djibouti a facilité l’exécution des contrats en créant une division spécialisée au sein du tribunal de première instance pour régler les différends commerciaux et en adoptant un nouveau Code de Procédure Civile qui réglemente les procédures de conciliation et de médiation volontaires, ainsi que les normes de délais pour les principaux événements judiciaires.
L’activation d’un tribunal commercial a permis d’instaurer plus de transparence et de célérité du règlement des litiges commerciaux. Cette séparation permet également de désengorger ces instances qui étaient confrontés à une forte augmentation des litiges civils et commerciaux suite à l’expansion économique que notre pays a connue durant ces 20 dernières années.
Djibouti a facilité le règlement de l’insolvabilité en rendant la procédure d’insolvabilité plus accessible aux créanciers et en leur permettant de participer davantage à la procédure.
La mise en place d’un système d’Automatisation du Tribunal de Première Instance de Djibouti a aussi contribué à faciliter le suivi du traitement des affaires notamment devant la juridiction civile et commerciale du Tribunal de Première Instance, en incluant le rôle respectif des intervenants dans la chaine judiciaire.
En ce qui concerne l’Indicateur Raccordement à l’électricité, désormais, l’ensemble des formalités de demande de raccordement sont disponible sur le site de l’EDD. L’EDD a mis en place la plateforme Fast-scan destinée à faciliter les procédures de raccordement au réseau électrique en réduisant significativement les délais. Les demandes de raccordement pouvant ainsi être effectuées en ligne.
L’EDD a consenti aux entreprises la faculté de payer l’Avance sur Consommation trois mois après la mise en service du nouveau raccordement. Cette mesure phare a permis de diminuer considérablement les coûts de raccordement et soulagé la trésorerie des jeunes entreprises au démarrage de leurs activités.
En 2018, le fournisseur d’électricité a amélioré la fiabilité de l’approvisionnement à travers la mise en place du système SCADA pour mieux mesurer les indices SAIDI (Indice de durée moyenne des interruptions) et SAIFI (Indice de fréquence moyenne des interruptions de services).
Le train des reformes poursuivant son chemin, déclinez-nous la matrice retenue pour l’édition 2020 du rapport Doing Business ?
Effectivement, le processus de réformes est conduit de plus belle pour consolider les acquis et la compétitivité de la place de Djibouti. Le rapport préliminaire de la Banque Mondiale a retenu Djibouti dans sa présélection des 20 meilleures économies réformatrices mondiales au cours de ces 12 derniers mois. Outre Djibouti, quatre autres pays africains, le Togo, le Nigeria, le Kenya et le Zimbabwe, figurent sur cette liste.
Cette liste restreinte sera réduite à 10 le 24 octobre prochain, lors du lancement officiel du rapport Doing Business 2020. Les réformes pour l’amélioration de l’environnement des affaires réalisées cette année justifient pleinement cette consécration de Djibouti pour la troisième année consécutive.
Les réformes procèdent, entre autres, de l’adoption d’un important amendement modifiant la législation commerciale afin de faciliter l’accès au crédit ainsi que la mise en place d’un système de transactions sécurisées fonctionnel et un registre unifié des sûretés.
Le Code de commerce a été encore une fois réajusté pour renforcer d’avantage la protection des investisseurs minoritaires, simplifier l’ouverture de procédures judiciaires et en améliorer l’efficacité, réduisant ainsi le délai de résolution des cas d’insolvabilité.
A moins de 24 heures de la publication du rapport Doing Business 2020, quel est votre sentiment en votre qualité de Coordinateur du programme national de ces réformes ?
Ma foi, je suis habité par un sentiment à la fois de sérénité et d’anxiété. De sérénité, au vu de la détermination des autorités nationales de faire bouger les lignes pour doter Djibouti d’un environnement des affaires optimum et de l’engagement et des efforts consentis par les acteurs nationaux des administrations publiques et parapubliques, du secteur privé et des partenaires au développement à la tête desquels la Banque Mondiale. D’anxiété car le défi pour cette année est plus grand et consiste à consolider et renforcer la performance tangiblement réalisée contrairement aux deux années précédentes. D’autant plus que le cas d’école désormais constitué par Djibouti en matière d’amélioration globale et figurante du climat des affaires a fait des émules au niveau international et continental; voire régional à l’instar de l’Ethiopie voisine qui semble nous emboîter le pas par la mise en place d’une unité chargé du Doing Business au sein de leur Agence Nationale pour les Investissements et placée sous l’égide du Premier Ministre.
Je ne saurai finir mon propos sans souligner le rôle aussi déterminant des organes nationaux de communication et leur formuler nos vifs félicitations et remerciements.