En 2017, les Africains de la diaspora ont transféré plus de 65 milliards $ de fonds vers leurs pays d’origine, d’après des chiffres de l’African Institute for Remittances (AIR). Ce montant représente plus du double de l’aide publique au développement reçue par le continent au cours de la même année et qui se chiffrait à 29 milliards $. Pourtant peu de pays africains développent une vraie politique de mobilisation des moyens financiers de la diaspora. Tour d’horizon.

D’après un rapport de la CNUCED, d’ici 2030, les objectifs de développement durable nécessiteront des investissements à hauteur de 40,9 milliards $ par an. A titre comparatif, la Banque mondiale estime qu’en 2019, 48 milliards $ de transferts de fonds devraient être effectuées par la diaspora africaine, rien qu’à destination de l’Afrique subsaharienne. Un chiffre prévu pour monter à 51 milliards $ en 2020 mais qui reste largement sous-évalué en raison des flux financiers informels.

Profiter de la nouvelle manne financière. D’après Dilip Ratha, économiste à la Banque mondiale, « si l’on pouvait convaincre un membre de la diaspora sur dix d’investir 1000 dollars dans son pays d’origine, l’Afrique collecterait ainsi 3 milliards de dollars par an pour financer le développement ».

Malheureusement, la plupart des pays africains ne parviennent pas encore à mettre en place une véritable stratégie pour associer leur diaspora au développement économique de leurs pays d’origine.

Plus d’une trentaine de pays africains ont mis en place des services ou des ministères chargés de susciter l’intérêt de la diaspora, mais ceux-ci manquent souvent de moyens.

Cependant certains pays sortent du lot en adoptant de véritables politiques de mobilisation de financement ciblant leurs diasporas. Les « diasporas bonds », ces emprunts obligataires ciblant les membres de la diaspora, font lentement leur chemin comme méthode de financement de certains gouvernements africains. Depuis les années 2000, des pays comme l’Ethiopie, le Ghana, le Kenya, le Rwanda et le Nigeria font partie des pays ayant déjà réalisé une telle opération. En mai dernier, le Sénégal devenait le premier pays d’Afrique francophone à lancer ce type d’émission obligataire.

Le Nigeria est d’ailleurs l’un des exemples les plus frappants de la capacité des membres de la diaspora africaine à se mobiliser pour financer des projets de développement dans leurs pays. En 2017, le pays d’Afrique de l’ouest réussissait l’exploit de mobiliser en un seul jour, plus de 300 millions $, grâce à une émission de diaspora bonds, visant à réaliser des projets d’infrastructure.

Développer de nouvelles politiques attractives. Au regard des possibilités nouvelles de financement qu’offre la diaspora africaine au continent, il devient de plus en plus important que les pays africains développent de nouvelles politiques attractives. Celles-ci doivent viser à augmenter les transferts de fonds de la diaspora afin de renforcer le « filet de sécurité » que représentent ces financements pour les familles africaines. Elles doivent également mieux orienter ces envois de fonds vers des investissements rentables et nécessaires pour accélérer le processus de développement de l’Afrique.

Ceci passera, entre autres, par la baisse des coûts des transferts de fonds à 3% du montant, objectif fixé par l’Union africaine.

Pour l’économiste Dilip Ratha, « renégocier des partenariats exclusifs, par exemple entre les services postaux et un prestataire de services de transfert, et laisser de nouveaux concurrents entrer en lice à travers les bureaux de poste, les banques et les compagnies de télécommunications va accroître la concurrence et diminuer le prix des transferts. » Il s’agira également de renforcer la confiance des membres de la diaspora africaine dans les économies de leurs pays d’origine à travers la lutte contre la corruption, des mesures incitatives pour l’investissement et la création d’entreprise.

Source : Ecofin Hebdo