Un grand commis de l’Etat vient de nous quitter. Ali Ismail Yabeh alias Ali Maraykane, ancien maire de la ville de Djibouti coulait depuis quelques années une retraite paisible à Djibouti. Il se rendait parfois en France pour des suivis médicaux, mais à chaque fois il écourtait son séjour, car il était très attaché à son pays et à sa famille. J’ai connu pour la première fois ce grand monsieur en 1998 alors que j’étais jeune reporter de notre journal qui était à l’époque un hebdomadaire. Il était secrétaire général du ministère de l’intérieur après avoir été longtemps commissaire des districts de l’intérieur. Il a été notamment en poste à Dikhil et à Obock et chef du premier arrondissement de la capitale. Partout où il a officié, il a laissé le souvenir d’un responsable intègre et dévoué à son pays. Un homme d’une droiture exceptionnelle et qui forçait le respect.
J’ai eu l’occasion de travailler avec lui durant son mandat de maire de la ville de Djibouti de 2006 à 2012, et j’étais subjugué par sa grande stature d’un homme d’Etat. Une force tranquille. Un fin politique qui faisait consensus autour de sa personne. Il nourrissait de grande ambition pour la ville de Djibouti dont il avait révolutionné un peu la gestion en instaurant une implication de la société civile à la chose publique, tout en associant les habitants des quartiers à la préservation de la propreté et l’embellissement de la ville. Je me souviens aussi de cette mission que j’ai eu l’honneur de l’accompagner à Paris en septembre 2009 à l’occasion de la conférence annuelle de l’AIMF (Association des Maires Francophones).
Un moment où j’ai eu l’occasion de discuter beaucoup avec lui. Il m’avait parlé de cette mauvaise habitude des djiboutiens à vouloir tout et tout de suite. « Notre esprit nomade est parfois incompatible avec la notion d’Etat vu le comportement de certains de nos compatriotes. » me rappelait –il. Il me racontait beaucoup d’anecdotes qui ont jalonné sa longue carrière d’administrateur. Les unes plus drôles que les autres. Ali Ismail Yabeh était un républicain, un homme très attaché à sa patrie.
Son fils Omar Ali nous a confié qu’il tenait beaucoup à deux choses : « la légalité et la paix». Chaque décision qu’il prenait, chaque initiative s’inscrivait dans cette légalité qu’il chérissait beaucoup. Pour ce qui est de la paix, il a beaucoup œuvré pour la concorde et la cohésion au sein des différentes communautés. Les populations de Dikhil et d’Obock ont dans ce sens un très bon souvenir. Il faisait l’unanimité au sein des djiboutiens, qui tous saluaient sa droiture, son patriotisme et son sens de l’organisation.
Pour moi Ali Ismail Yabeh était un père, un parrain mais aussi un confident auquel j’avouais mes peines. Ses conseils avisés, sa sagesse m’ont été d’une grande utilité à une période charnière de mon existence. Il était aussi un exemple de générosité. Toujours prêt à aider son prochain. Il n’hésitait pas à mettre la main à la poche à chaque fois qu’il rencontrait des personnes démunies. Je garderai le souvenir d’un homme qui a marqué son temps et qui servira d’exemple à la nouvelle génération.
A sa femme éplorée, à ses enfants, à sa famille mais aussi à ses nombreux amis, je tiens à leur présenter mes sincères condoléances, en priant le Très Haut de l’accueillir en son paradis éternel. Amin.
Kenedid Ibrahim