Les formes de coopération, dans le domaine de l’éducation, instaurées après l’accession de notre pays à la souveraineté internationale, favorisaient-elles une réelle indépendance et un réel développement des valeurs et des besoins qui nous sont propres ? La réponse est tout simplement non ! L’éducation doit absolument être le fruit d’une création nationale pour justement représenter nos propres valeurs et répondre à nos propres besoins. Pour qu’elle soit réellement  adaptées aux réalités de notre pays mais aussi, refléter nos cultures et notre histoire. Car, c’est en transmettant des valeurs et une histoire communes, que nos concitoyens peuvent se reconnaitre comme appartenant à une même société et s’y identifier. Les responsables du pays savaient que l’éducation était le fondement de toute société et qu’elle joue un rôle déterminant dans le processus de développement économique et social ainsi que dans l’émancipation intellectuelle d’un peuple. C’est la raison pour laquelle ils décidèrent, très tôt, de libérer l’éducation nationale de toute tutelle extérieure et de jeter les bases d’un système éducatif propre à la République de Djibouti. Lorsqu’on sait que l’Afrique francophone a toujours du mal  à développer un système libre de toute tutelle, nous pouvons évaluer le courage et la détermination que les autorités djiboutiennes ont fait preuve pour mener à bien ce projet. Jugez-en vous-même !

C’est en 1983 et 1984, que le processus de lancement démarra avec la création de deux Bureaux Pédagogiques. L’un pour l’enseignement du second degré et l’autre pour le primaire. Ces deux bureaux furent chargés d’étudier les voies et moyens pour transformer le système éducatif et de l’adapter à la réalité sociale et culturelle du pays d’une part ; et de l’autre, produire des documents pédagogiques et didactiques qui soient en mesure de prodiguer la formation nécessaire aux enseignants.

 De cette volonté d’indépendance naquît, en 1990, le CRIPEN.

Le 08 Avril 1990, par Décret N° 90-041/PR/EN, le Gouvernement de la République de Djibouti  décide de doter le pays d’un Institut Pédagogique National : le CRIPEN (Centre de Recherche, d’Information et de Production de l’Éducation Nationale).

Avec l’assistance financière de la Banque Mondiale, le CRIPEN se met petit-à-petit à l’œuvre et entame un développement progressif en ressources humaines, en matériels et en  équipements. Il lance un projet de formations à l’étranger  en faveur des premiers cadres, pour assurer la parfaite gestion du centre. Il entame un programme de recherche approfondi sur le système éducatif et effectue les évaluations nécessaires pour mener à bien ses travaux.

Suivant les grands axes de son action pédagogique, il réforme l’enseignement du Premier et du Second Degré, met sur pied un système éducatif adapté au contexte djiboutien en réformant l’enseignement du français et en assurant la mise en place d’une nouvelle méthode pédagogique appelée « l’Approche Communicative ». Les premiers manuels du primaire, conçus entièrement par des enseignants djiboutiens, voient le jour.

Un bâtiment digne des ambitions de l’Etat, en matière de recherche et de pédagogie, est construit au quartier du Héron. Et, au mois de juin 1996, c’est-à-dire six ans après sa création, le CRIPEN aménage dans des locaux flambants neufs qui vont très rapidement devenir de véritables laboratoires au service de l’éducation nationale.

Ce nouvel espace va améliorer le travail de recherche et faire exploser la créativité. A l’image de la Radio Scolaire Éducative qui a multiplié sa production et le volume horaire des émissions d’éducation dont la diffusion est destinée à un large public.

Encouragé par les nouveaux locaux et les moyens mis à sa disposition, le CRIPEN accélère sa productivité et lance de multiples projets pédagogiques et éducatifs pour améliorer la qualité des apprentissages.

L’édition et la production des manuels didactiques et des guides pédagogiques disciplinaires se poursuivent. L’Imprimerie, encore dans les locaux de l’Inspection primaire, fonctionne à un rythme soutenu.

Tournant important de l’histoire du CRIPEN : les Etats Généraux de 1999

En 1999, le CRIPEN souffle ses 9 bougies de son existence. L’institut est bien structuré, équipé et possède les compétences et les moyens nécessaires pour mettre en pratique les valeurs acquises ce temps durant. Et les États généraux de l’Éducation nationale tombent à pic. Pour que l’organisation de cet événement unique devienne une véritable réussite, le CRIPEN s’atèle à la tâche. Il produit et édite toutes les brochures ainsi que les documents écrits et audio-visuels qui ont servi aux débats préliminaires et qui ont assuré le bon déroulement des assises. A l’issue de ces États généraux, le CRIPEN fut chargé de réaliser une réforme en profondeur des programmes scolaires et d’éditer les manuels nécessaires à tous les niveaux de l’enseignement.

En 2000, lancement de l’Enseignement Fondamental

Dès la fin des Etats Généraux, le CRIPEN va donc engager une profonde réforme et révolutionner l’enseignement du Premier Degré par la mise en place d’une nouvelle méthode pédagogique : l’Enseignement Fondamental. Cette réforme est destinée à faciliter l’apprentissage et la compréhension des élèves tout en les aidant à évoluer dans un environnement économique et social propre à la République de Djibouti et porteur de ses propres valeurs culturelles. Le but étant de former les élèves à construire leur propre personnalité, à devenir de véritables agents de développement et à participer efficacement au progrès social et économique du pays.  Cette méthode se caractérise par la souplesse dans ses contenus et par l’ouverture sur le monde environnant des élèves.

Soucieux de répondre au mieux au contexte économique et aux réels besoins du pays, cette méthode  va instaurer un modèle linguistique plus pertinent : le multilinguisme. L’école primaire change dès lors de configuration et devient une école fondamentale de 9 années d’études obligatoires de 6 à 16 ans. 

En République de Djibouti, l’enseignement est obligatoire et gratuit. Le gouvernement, sous la houlette du Président de la République, M. Ismaïl Omar Guelleh, s’est engagé très tôt à améliorer la qualité de l’éducation dispensée dans les écoles du pays où qu’elles soient, d’augmenter le taux de scolarisation et de réduire toutes formes de disparités. L’école pour tous, prôné par le chef de l’Etat dès son accession à la magistrature suprême, fut une véritable stratégie politique qui avait pour but d’offrir la scolarisation nécessaire aux enfants du pays, filles et garçons, vivant sur l’ensemble du territoire national.

En clair, accroître la capacité d’accueil du pays, assurer une meilleure équité et garantir la qualité de l’enseignement. Pour réussir ce pari, le gouvernement a engagé des investissements sans précédent pour construire des écoles et les équiper afin qu’elles soient en mesure d’accueillir les élèves dans les meilleures conditions. Le budget alloué à l’Éducation nationale reste depuis, en constante augmentation et témoigne de cette volonté politique. Malgré tout, il y a encore du chemin à faire ; mais cependant, l’effort accompli dans tous les domaines de l’enseignement, est tout simplement considérable.

 18 ans ou l’âge de la maturité 

Le 29 janvier 2008, le CRIPEN entame sa 18ème année d’existence et c’est le moment choisi par les autorités de le mettre sur de meilleurs rails et de l’engager sur la voie de la maturité. En effet, par décret présidentiel, le CRIPEN devient autonome. Il quitte ainsi son statut d’établissement scolaire et devient un établissement à caractère scientifique, pédagogique et technologique avec à sa tête : un Directeur Général et un Conseil d’Administration. Désormais, le CRIPEN  dispose d’une autonomie financière qui lui permet de mieux gérer sa politique éditoriale et sa production. L’institut peut acheter et vendre. Bénéficier de financements publics ou ceux provenant des partenaires techniques et financiers du Ministère.

Pour mener à termes ses missions, le CRIPEN a donc mis en place un plan éditorial très ambitieux pour assurer la production des 47 titres destinés à couvrir les 9 niveaux de l’Enseignement Fondamental et ce, dans toutes les disciplines.

D’autant plus que la réforme du Secondaire et du Baccalauréat était toujours en chantier malgré les importantes modifications du profil du collégien djiboutien. Le projet d’organisation national du baccalauréat était sur les tablettes et cette réforme est non seulement ambitieuse mais, elle est également historique puisqu’elle finalise la volonté d’indépendance de l’enseignement que le pays nourrit depuis les premières réformes de l’éducation nationale.

La réforme de l’enseignement secondaire doit adapter le lycée djiboutien pour qu’il réponde à son tour aux besoins réels et épouser parfaitement la situation économique, sociale et culturelle du pays.

Il a fallu prendre en compte les réformes des niveaux précédents ; préparer les élèves aux exigences de l’Université et  aux  différents marchés du travail.

Pour assurer l’aptitude à briguer des emplois à l’étranger, outre le français, les langues anglaise et arabe sont renforcées et l’enseignement du secondaire djiboutien est garanti pour qu’il acquière une reconnaissance internationale.

Les contours de la réforme ont été fixés par la circulaire ministérielle du 25 juillet 2009. Sa coordination générale est confiée à l’Inspection Générale qui rend compte au Ministre de l’avancement des travaux. Des Groupes de Travail Disciplinaires (GTD) ont été institués. Ils sont présidés par les Inspecteurs de la discipline. L’équipe nationale composée d’inspecteurs, de conseillers pédagogiques et d’enseignants s’est mise au travail pour rédiger les curricula et les supports pédagogiques (manuels, CD/DVD et guides de l’enseignant).

Ces supports pédagogiques du Secondaire parachèvent les réformes successives qui ont touché l’Enseignement Fondamental et restent le reflet de l’énorme parcours qui a permis à notre système éducatif d’acquérir une totale indépendance éditoriale. En plus, la numérisation de l’école avance à grand pas. Depuis la construction du premier bâtiment, un second a vu le jour à l’arrière plan de la cour et abrite en son sein la direction de la communication, les studios de la télé-scolaire, le service du numérique etc…. Aujourd’hui, les fondations d’un troisième bâtiment ultra-moderne sont lancées. Et, très bientôt, un bâtiment futuriste, à l’image de cette institution de troisième type qu’est le CRIPEN, va briller de toute sa splendeur et marquer le point d’exclamation d’un fabuleux parcours qui n’a pas fini de valoriser notre système éducatif.

Ces grands projets ambitieux, mandatés par le Ministère de l’Éducation Nationale et confiés au CRIPEN, témoignent de la volonté du Président de la République de pérenniser cet acquis et de le consolider à jamais pour que le système soit toujours au service des générations futures.

L’éducation est liée à la vie et tant qu’il y aura la vie, le CRIPEN recherchera les meilleures méthodes pour améliorer la qualité cette éducation.

 A.A.-MAHE