Dans son mandat de promotion et de protection des droits humains dans tous ses aspects, la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH),

• Attachant une importance particulière aux liens de coopération qu’elle entretient avec lesinstitutions internationales, l’organisation des Nations Unies et les institutions régionales compétentes en la matière ;

• Veillant au respect et à la mise en œuvre des instruments internationaux et régionaux en matière des Droits de l’Homme que la République de Djibouti a ratifié ;

• S’appuyant sur ses attributions que lui confère l’article 3 des Principes de Paris auxquelles fait référence la Loi n°59/AN/14/7ème L du 20 juillet 2014 dans ses articles 5,6 et 7 ;

• Faisant usage de son droit de mener des enquêtes et d’auto-saisine sur toute allégation de violations des droits de l’Homme conformément aux articles 11 et 12 de la Loi n°59/AN/14/7ème L et aux articles 5,6 et 7 du Décret n° 2015-210/PR/MJDH du 11 juillet 2015;

A mené plusieurs actions sur le terrain depuis le 09 juin 2020.

Ainsi, elle  a effectué une visite à la prison civile de Gabode, le 09 juin 2020, pour s’enquérir des conditions de détention et de traitement des prisonniers et en particulier de M. Fouad Youssouf Ali, le 09 juin 2020.

La CNDH a fait un communiqué et tenu une conférence de presse à ce sujet le 10 juin 2020.  Toutes ces informations sont disponibles sur notre site web (cndhd.dj) et sur notre page facebook (cndhdjibouti).

Le 17 juin 2020, elle a visité le Commissariat de Police du Héron et la Brigade de Gendarmerie d’Ambouli. Un communiqué et un point de presse ont été diffusés par la même voie.

Le 21 juin 2020, une délégation de la CNDH composée de MM. Saleban Omar Oudin Président,  Mohamed FarahKairdon Commissaire-Rapporteur et Djibril Osman Houffaneh Secrétaire Général, s’est rendue dans la ville d’Ali Sabieh.

La délégation a mené sur les lieux de manière objective, indépendante et impartiale une enquête pour faire la lumière sur les allégations de violations de droits de l’Homme.

Elle s’est entretenue avec les chefs traditionnels (Okals), les organisations de la société civile, le Préfet, le Vice Président du Conseil Régional, le Commandant de Compagnie de la Police celui de la Gendarmerie, le Directeur Général de l’Hôpital Régional et le Responsable de l’Agence de la banque BCIMR.

Sur l’ensemble de toutes ces visites et enquêtes, la Commission tire les conclusions suivantes :

1. Conditions générales de détention à Gabode

Y étaient incarcérés à la prison civile de Gabode 487 détenus dont 183 prévenus. Le taux d’incarcération est de 54 pour 100 000 habitants. Cela place la République de Djibouti parmi les pays où le taux de détention est le plus faible. Le taux moyen mondial est de 144 pour 100 000 habitants.

On peut noter une surpopulation de l’ordre de 139% compte tenu de la capacité d’accueil de la prison.

Les prévenus représentent 38% de la population carcérale, ce qui constitue une frange importante.

Par ailleurs, les femmes et les mineurs(es) représentent respectivement 03% et 04% des détenus. 71% des prisonniers sont des Djiboutiens(nes).

La séparation hommes, femmes et mineurs est scrupuleusement respectée.

Aucun cas de traitement inhumain, cruel ou dégradant n’est à signaler.

Dans le cadre du COVID-19, des cellules de mise en quarantaine sont mises en place pour les nouveaux entrants.

Il y’a une absence cruelle de formation professionnelle pour les adultes.

En conclusion, les conditions générales de détention à la prison civile de Gabode sont globalement acceptables.

2. Respect des délais de garde à vue

Le 17 juin 2020, sur la base des registres de détention ténus dans les deux lieux de détention visités (Commissariat du Héron, Brigade de Gendarmerie d’Ambouli) les délais de garde à vue sont respectés.

3. Cas de M. Fouad Youssouf Ali

Lors d’un entretien que la CNDH a eu avec M. Fouad Youssouf Ali le 09 juin 2020 dans la cour de la prison de Gabode, ce dernier a déclaré que:

• Son état de santé était satisfaisant ;

• Il souffre d’allergie cutanée depuis août 2019 et que ses plaies aux jambes sont dues à cela ;

• Il n’a fait l’objet d’aucun mauvais traitement ;

• Il est assisté d’un avocat en la personne de Me Zakaria Abdillahi ;

• Il reçoit la visite de ses proches depuis le 07 juin 2020.

4. Monitoring à Ali Sabieh le 21 juin 2020.

• La manifestation a eu lieu de manière spontanée le 05 juin 2020 à Ali Sabieh à la sortie de la prière du Vendredi vers 13h30. Elle a réuni 400 à 500 manifestants ;

• Des gens malintentionnés dont des anciens militaires s’y sont immiscés et ont profité pour saccager des biens publics ;

• Des dégâts matériels importants ont été occasionnés notamment l’Agence BCIMR a été incendiée et les locaux du Cadi ont été saccagés : Des registres et des documents importants y ont été brulés ;

• Les forces de l’ordre qui sont intervenues étaient au nombre de 57 agents. Ils ont fait usage de gaz lacrymogène et des balles caoutchouc

• Aucun mort n’est à déplorer ;

• 09 personnes civiles ont été blessées dont les 04 les plus graves ont reçu des projectiles non létaux ;

• A ce jour, tous les 04 sont guéris. Le cas le plus grave d’entre eux qui est le Responsable de l’Agence BCIMR a repris son travail depuis le 29 juin 2020 ;

• Sur les 24 manifestants déferrés au parquet, aucune femme ni aucun mineur n’y figure. Seuls 08 sont détenus à la prison de Gabode pour ouverture d’information devant le juge d’instruction et 08 autres sont en appel. Tous les autres sont relaxés.

La Commission Nationale des Droits de l’Homme poursuit ses investigations sur les manifestations du 04 et 05 juin 2020 à Djibouti et Balbala. Elle fera un point de presse en temps voulu.

En outre, elle rappelle qu’elle tient à la disposition du public et de toute organisation qui s’intéresse de près ou de loin aux droits humains, deux bureaux chargé de la réception et du traitement de toute plainte sur des violations de droits de l’Homme. Elle envisage également d’ouvrir dès le 1er août 2020, un bureau similaire dans chaque chef lieu des régions de l’intérieur.

Saleban Omar Oudin

Président de la CNDH