Retour aux affaires sous la coupole. Dileita Mohamed Dileita, patron de l’Assemblée, a ouvert la deuxième session ordinaire de la 9e législature. Décor classique : ministres alignés, députés au complet, diplomates en habits de circonstance.

Le président de l’Assemblée nationale a planté le décor: session budgétaire oblige, cap sur la loi de finances 2026, “socle de la vitalité démocratique”. Avec, en bonus, un rappel appuyé de la solidarité indéfectible de Djibouti envers les Palestiniens, après la séquence diplomatique new-yorkaise du chef de l’État.

Le Premier ministre Abdoulkader Kamil Mohamed a sorti le grand jeu. Face aux députés, il n’a pas livré un simple relevé de comptes, encore moins une banale lecture de colonnes chiffrées. Non. Son discours sur le budget 2026 avait des airs de fresque nationale. Une partition calibrée pour montrer que Djibouti avance, que Djibouti tient le cap, que Djibouti trace sa voie.

Pas question de se limiter aux chiffres de l’année. Le chef du gouvernement a choisi de remonter quinze ans en arrière, rappelant que le PIB a doublé et que le revenu par habitant a triplé.

Un rappel lourd de sens: la transformation en cours n’est pas un hasard, mais l’œuvre d’une stratégie, un projet mûri, porté de bout en bout par une vision présidentielle qui ne s’est jamais démentie.

Le message est limpide: si la république de Djibouti aligne aujourd’hui ports ultramodernes, réseau multimodal et data centers dernier cri, c’est parce qu’une volonté politique a tenu bon, malgré les scepticismes d’hier et les doutes des experts de la finance mondiale.

Mais gouverner, ce n’est pas que gérer des infrastructures. Le Premier ministre a insisté sur l’autre versant du développement: l’humain.

Éducation, santé, logement… Les chiffres avancés sont parlants : un taux de scolarisation primaire flirtant avec les 100 %, plus de 50 000 logements construits, une espérance de vie rallongée de dix années. Autant de preuves que l’État n’a pas seulement coulé du béton, mais qu’il a aussi investi dans la dignité sociale et le capital humain.

Toutefois, derrière la fresque, une ombre se profile : la soutenabilité. Les financements extérieurs se raréfient.

Djibouti doit apprendre à « vivre de ses propres moyens ».

En clair : cure d’austérité. Rationalisation des entreprises publiques, gel des recrutements, coupe sombre dans le train de vie de l’État.

Une discipline budgétaire qui, si elle est nécessaire, risque d’être douloureuse pour les uns et frustrante pour les autres.

Un mot a traversé le discours comme un fil rouge : la confiance. Confiance des citoyens envers leurs institutions.

Confiance des investisseurs dans la place financière. Confiance, enfin, de la jeunesse dans son avenir. Le premier ministre Abdoulkader Kamil Mohamed l’a présentée comme le socle invisible de toute réforme. Idée juste, mais fragile.

Car la confiance ne s’impose pas, elle se mérite. Elle se gagne jour après jour, par la transparence et l’équité.

Et comme un final en apothéose, le Premier ministre a convoqué l’horizon 2035. Énergies renouvelables, richesses du lac Assal, transformation industrielle, centre financier régional… Autant de promesses inscrites dans une Vision nationale.

En vérité, ce discours n’était pas qu’une reddition de comptes. C’était une démonstration de style, un exercice de persuasion grandeur nature.

Reste la grande interrogation : au-delà des belles intentions et des promesses, ce contrat implicite entre l’État et les citoyens tiendra-t-il ? Car le budget, aussi équilibré qu’il paraisse, n’est pas qu’une mécanique de chiffres. C’est une affaire de confiance.

Said Mohamed Halato