Sur cette page consacrée au social, nous relançons aujourd’hui la rubrique Santé « ALLO DOCTEUR »  qui sera hebdomadairement animée, chaque jeudi, par le médecin pédiatre Dr Ahmed Robleh Abdilleh. Un nouveau thème pour chaque édition et des réponses à vos questions  sur le thème précédent.

 Il suffit à cet effet d’envoyer vos questions à l’adresse mail suivante :

allo.docteur.lanation@gmail.com

Pour un départ, le thème d’aujourd’hui est d’actualité. Bonne lecture.

La maladie Chikungunya. Le chikungunya est une maladie virale transmise par des moustiques. Elle a été décrite pour la première fois à l’occasion d’une flambée dans le sud de la Tanzanie en 1952. La cause de cette maladie est due à un virus, un alphavirus de la famille des togaviridés. Le nom de «chikungunya» vient du Swahili qui signifie «devenir tordu». Ceci décrit l’apparence voûtée de ceux qui souffrent de douleurs articulaires.

La transmission de la maladie. Le virus est transmis d’un être humain à l’autre par les piqûres de moustiques femelles infectées. Ce sont uniquement les femelles qui piquent car les protéines contenues dans le sang sont nécessaires à la maturation de leurs œufs.

Les moustiques incriminés sont le plus souvent Aedes aegypti et Aedes albopictus (Moustique tigré), 2 espèces qui peuvent également transmettre d’autres virus, notamment la dengue. Ces moustiques sont susceptibles de piquer pendant la journée, bien que leur activité maximale se situe en fin d’après-midi. Les deux espèces piquent à l’extérieur, mais Ae. aegypti le fait aussi volontiers à l’intérieur des habitations. Les personnes atteintes du chikungunya ne sont donc contagieuses ni par contact, ni par la salive. La transmission se fait uniquement par le biais du moustique vecteur.

Comment suspecter la maladie ?

La maladie se manifeste généralement entre 4 et 8 jours après la piqure par un moustique infecté, mais la fourchette peut aller jusqu’à 14 jours.

Le chikungunya se caractérise par l’apparition brutale de fièvre souvent accompagnée d’arthralgies (douleurs articulaires). On retrouve souvent des myalgies (douleurs musculaires), des maux de tête, nausée, fatigue et une éruption cutanée. Les douleurs articulaires sont souvent invalidantes, mais elles disparaissent généralement au bout de quelques jours ou de quelques semaines.

Chikungunya et grossesse. Dans le cas d’une femme enceinte qui est infectée par le virus, la contamination du bébé se produit directement au cours de l’accouchement dans un cas sur deux. Elle engendre des troubles neurologiques et/ou cardiaques chez la moitié des nourrissons.

Chikungunya et enfant. Le risque chez l’enfant est celui des complications d’une forte fièvre ou d’une encéphalite.

Tous ces signes ne sont pas singuliers au chikungunya. D’autres fièvres virales peuvent donner les mêmes symptômes. D’où la nécessité de confirmer le diagnostic.

Comment confirmer le diagnostic ?

Plusieurs méthodes de diagnostic peuvent être mises en œuvre. Des tests sérologiques, tels que les tests immuno-enzymatiques simples (ELISA), peuvent permettre de confirmer la présence d’anticorps anti-chikungunya IgM et IgG.

Les niveaux d’anticorps IgM sont les plus élevés trois à cinq semaines après l’apparition de la maladie et persistent pendant environ deux mois.

Egalement, le virus peut être isolé à partir du sang au cours des premiers jours de l’infection.

Evolution de la maladie. L’évolution de la maladie se fait souvent vers la guérison, mais elle peut évoluer vers une forme chronique, avec pendant plusieurs mois une fatigue prolongée et/ou la persistance de douleurs articulaires (dans 20% des cas) pendant des mois ou des années parfois très gênantes dans la vie quotidienne.

Les complications sont possibles :

– atteintes neurologiques de type syndrome de Guillain-Barré. Parfois, une méningo-encéphalite.

– atteintes des yeux : conjonctivite guérissant spontanément, baisse de la vision.

– les complications au niveau du rein, du foie ou du cœur sont exceptionnelles.

Chez les personnes âgées, la maladie peut contribuer à la cause du décès.

Le traitement de la maladie

Il n’existe pas de médicament spécifique qui permette de guérir la maladie.

Le traitement a essentiellement pour but d’atténuer les symptômes, notamment les douleurs articulaires, au moyen d’antipyrétiques, d’analgésiques comme le paracétamol, d’un apport optimal de liquides et de séances chez le kinésithérapeute peut améliorer la qualité de vie et atténuer les douleurs des plus souffrants.  

La prévention de la maladie

La présence de lieux de prolifération du moustique vecteur à proximité des lieux d’habitations constitue un sérieux facteur de risque de chikungunya ainsi que d’autres maladies transmises par ces espèces (paludisme, dingue, etc.).

La prévention et la lutte reposent dans une grande mesure sur la réduction du nombre des récipients ou contenants naturels et artificiels contenant de l’eau qui favorisent la reproduction des moustiques. Cela passe par la mobilisation des communautés mais aussi l’amélioration de l’assainissement par les pouvoirs publics.

Lors de flambées épidémiques, on peut pulvériser des insecticides pour tuer les moustiques, en les appliquant sur les surfaces à l’intérieur et autour des récipients où les moustiques se posent, et en traitant l’eau contenue dans ces récipients afin de tuer les larves.

En particulier Les femmes enceintes, les jeunes enfants, les personnes malades ou âgées doivent dormir sous des moustiquaires imprégnées d’insecticide pour assurer une bonne protection.  Le Ministère de la santé de Djibouti, par le biais de l’Institut National de Santé Publique, dispose d’un pole de veille sanitaire et d’un plan de riposte contre les maladies à potentiel épidémique. Il peut à tout moment activer ce dispositif en cas de nécessité.

Etant donné que l’épidémie sévit à Dire Dawa (Ethiopie), nous devons activer les unités de contrôles sanitaires qui sont pré-positionnées au niveau des postes frontaliers, de l’aéroport et des ports. Il est impératif de ne pas relâcher la vigilance.

Dr Ahmed Robleh est un médecin pédiatre qui a été formé à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar du Sénégal. Il est également titulaire d’un Master en santé publique de la Faculté de Médecine de l’Université Henry Poincaré de Nancy en France.

Il a été cadre du Ministère de la santé durant 20 ans. Il a occupé tour à tour le poste de médecinchef des régions sanitaires de Dikhil et de Tadjourah puis médecin-chef de la pédiatrie de l’Hôpital Général Peltier. Ensuite, il glisse vers le niveau central en devenant Directeur du programme national de Nutrition et enfin secrétaire général du Ministère de la santé.

Actuellement, Dr Ahmed Robleh est un parlementaire de la 8e législature de l’Assemblée Nationale et le Président de la Commission du développement Sociale et de l’Environnement.