Dans la sous-préfecture de Dorra, au nord de la région de Tadjourah, la sécheresse n’est plus un mot mais une réalité âpre, visible sur les visages, palpable dans le sol. Tandis que les aides d’urgence s’organisent, une autre bataille, plus silencieuse, se mène au quotidien : celle de la santé. Là, des équipes médicales veillent sur les corps éprouvés, tentent d’endiguer l’effondrement, et maintiennent, contre l’aridité, la dignité des plus vulnérables.

Dans les paysages austères et sublimes de Dorra, entre rochers fendus et villages accablés par la chaleur, la vie tente de tenir encore. Ce n’est pas la sécheresse seule qui menace, mais ce qu’elle entraîne : l’affaiblissement, la fatigue chronique, l’invisible basculement vers la malnutrition ou la maladie. Ici, les mots prévention et présence prennent tout leur sens.

Sous l’impulsion du ministère de la Santé, une stratégie sanitaire s’est mise en place. Discrète mais déterminée. Les équipes déployées sur le terrain ont ciblé les enfants de moins de cinq ans, les femmes enceintes, les mères allaitantes — tous ces visages fragiles que la crise rend encore plus exposés. Dépistage de la malnutrition, de l’anémie, vaccination préventive, prise en charge des cas de diarrhée, sensibilisation à l’hygiène, dépistage des maladies chroniques : chaque action répond à un besoin concret, identifié au plus près du terrain.

Le Docteur Dimbio, l’un des piliers de cette réponse sanitaire à Dorra, parle d’un travail “surtout préventif”. Et ce mot, ici, n’a rien de théorique : il signifie aller à la rencontre, détecter avant que le danger ne devienne tragédie, accompagner avec humanité là où le système de santé est parfois le seul filet.

Ce travail, mené en partenariat avec les autorités locales, les agents communautaires et les structures régionales de santé, s’inscrit dans la grande chaîne du Plan national de riposte à la sécheresse, déployé à l’échelle de l’État. Mais à Dorra, cette riposte prend un visage particulier : celui des soignants qui marchent parfois des kilomètres, des consultations faites à l’ombre d’un arbre, d’un geste de pesée, d’un regard qui devine l’épuisement.

Car il ne s’agit pas simplement d’intervenir. Il s’agit de tenir, de soutenir, d’éviter que la faim ou la maladie n’ajoutent encore à la détresse. Il s’agit aussi d’écouter, d’expliquer, de rétablir des gestes d’hygiène oubliés faute d’eau. De redonner aux mères la confiance de rester actrices de la santé de leurs enfants, même dans l’adversité.

C’est là, dans ces efforts du quotidien, que se joue l’essentiel. Une forme de résistance douce. Une médecine de la proximité, du lien, du sens.

Et dans les sables de Dorra, là où la terre se fend, ce sont ces mains discrètes, ces voix tranquilles qui rassemblent la vie, une vie que la sécheresse ne fera pas taire.