Chaque pays a ses mythes fondateurs. Il serait intéressant de se pencher sur les mythes créateurs de la République de Djibouti. Et cela à la veille du 42ème anniversaire de notre indépendance nationale. Le nom de Djibouti est en lui-même surchargé de mythologie. En effet, Djibouti serait l’endroit où l’ogresse fut terrassée par des guerriers somalis. Jab bouti qui devient Djibouti. Chez les afars, c’est une marmite renversée par l’administrateur colonial qui provoque un quiproquo linguistique. Alors que la femme afar hurle « Ga Buti ! Ga Buti ! » en parlant de sa marmite, l’administrateur note sur son calepin que l’endroit s’appelle Djibouti. Et voilà comment deux des trois composantes de la communauté nationale expliquent l’appellation du pays et de sa capitale.
Cela, c’est la mythologie. La réalité fait irruption avec le choix des mots de la devise nationale. Les pères fondateurs ont choisi pour crédo trois mots qui se rapportent aux vraies valeurs de la République de Djibouti : Unité-Egalité –Paix.
Unité d’abord. Unité du pays : la République de Djibouti est une et indivisible. Toute scission, division ou amputation d’une partie du territoire national sont nulles et non avenues.
Unité du peuple. Djibouti est habité par trois communautés. L’unité et la concorde civile sont primordiales. Par ailleurs, le peuple djiboutien s’est mélangé réalisant un melting-pot avant l’heure.
Egalité ensuite. Egalité des citoyens face à la loi. En quoi l’égalité des Djiboutiens serait à affirmer ou réaffirmer? N’est-ce pas une évidence que les ressortissants d’un Etat soient égaux devant la justice ? Il faut se rappeler du contexte colonial où les habitants du territoire étaient scindés en trois groupes distincts. Il y avait les indigènes (afars et issas), les allogènes (les autres tribus somalis) et les français métropolitains.
En affirmant solennellement l’égalité des citoyens dans la République, les pères fondateurs indiquaient que cette ère coloniale était belle et bien révolue.
En ce temps présent l’égalité à réaliser est celle du genre. Finie l’époque où la femme était ségréguée, discriminée et rabaissée au rang de citoyenne de seconde zone. L’égalité de l’homme et de la femme dans l’instruction, l’emploi ainsi que dans le ménage s’est établie progressivement.
Et enfin paix. Dans une région instable où des conflits en tous genres entraînent des déplacements massifs de population, les pères fondateurs de la République de Djibouti ont très tôt désigné la paix comme dogme incontournable. Paix à l’intérieur du pays et paix dans les pays du voisinage. C’est dans cette optique que Djibouti participe en sein de l’Amisom, des forces qui ont pour mandat de restaurer la paix en Somalie.
Unité-Egalité-Paix. La triptyque est le socle de base de la politique intérieure et extérieure de la République de Djibouti.
Les leitmotivs qui décrivent les différentes facettes du pays sont signés par le défunt Moussa Robleh Awaleh, le premier directeur de l’Office National du Tourisme de Djibouti (ONTD). « Terre d’échange et de rencontres », «L’autre façon de vivre l’espace », « Djibouti, Havre de paix ».
Situé en carrefour de l’Afrique, l’Asie et l’Europe, Djibouti est depuis les temps immémoriaux une terre d’échanges et de rencontres. Aujourd’hui, avec ses différents ports, aéroports, ses voies routières et sa ligne ferroviaire, Djibouti est devenue l’espace d’échange et de trafic commercial de l’Afrique orientale. Partenaire gagnant–gagnant avec l’Ethiopie et les pays du Comesa (Marché commun des Etats de l’Afrique de l’Est), Djibouti s’est imposé comme le grand portail d’entrée et de sortie des biens et services.
« Paysage lunaire, terre minérale et pays des pleines caillouteuses… »
L’espace djiboutien ne laisse pas indifférent. Et l’homme a choisi de vivre une symbiose avec cette terre semi-désertique en optant pour le nomadisme. Ces paysages volcaniques grandioses, ce sol en papier pelure traversé par des failles, cette fragilité du physique ont façonné un peuple rugueux mais généreux.
Bordé par une mer Rouge qui charrie son pesant des mythes (elle aussi), Djibouti aspire à devenir un haut lieu du tourisme solidaire. Elle en a les moyens et a été déclarée d’ores et déjà capitale de la culture et du tourisme.
« Djibouti, havre de paix ». Dans une région secouée par intermittence des conflits, Sécheresses et famines, Djibouti a su préserver la paix à l’intérieur de son territoire et avec ses pays limitrophes. D’autre part, le pays a ouvert ses frontières pour les refugiés et déplacés des guerres de la région.
Djibouti entre mythes et réalités est loin des clichés et des stéréotypes que certains ont essayé de plaquer sur son dos. Le pays a résumé ses multiples facettes dans la triptyque de sa devise nationale.
Abdi Mohamed Farah