La République de Djibouti figure désormais, parmi les pays restreints qui ont embrassé le Système Général de Diffusion des Données amélioré (SGDD-a) du FMI. Pour s’arrimer à cette plateforme internationale de transparence macroéconomique, elle  a lancé le jeudi 12 juin dernier, dans la salle de conférence de la Banque Centrale de Djibouti (BCD), sa Page Nationale Récapitulative de Données (PNRD) et s’est engagée à publier régulièrement les données vitales permettant d’améliorer la gouvernance économique et de répondre aux exigences des partenaires techniques et financiers.

Une lumière tamisée éclaire les visages concentrés d’une assistance triée sur le volet, réunis depuis le 8 juin dernier dans la salle de conférence de la Banque Centrale de Djibouti. Dirigée par le directeur des Statistiques de  la Banque Centrale de Djibouti, Abdirahman Robleh, cette équipe composée ingénieurs statisticiens de l’Institut Nationale de la Statistique de Djibouti (INSTAD), des hauts responsables du Ministère du Budget d’économistes, de statisticiens, et d’experts en data du FMI et de la BAD, avait pour mission de mettre en œuvre le Système Général de Diffusion des Données amélioré (SGDD-a) à travers l’élaboration d’une page nationale récapitulative de données (PNRD).

Il s’agit pour les 76 pays du monde qui ont adopté ce système dont notre pays, de publier régulièrement dans son PNRD, les données macroéconomiques jugées vitales pour suivre la santé d’un État : croissance, inflation, dette publique, finances extérieures, production industrielle, statistiques monétaires, démographie…Autant d’indicateurs cruciaux pour les investisseurs, les bailleurs de fonds, les agences de notation, ou tout simplement les citoyens.

A l’issue de plusieurs jours d’intenses travaux d’élaboration du PNRD de Djibouti, jeudi passé, les regards des techniciens réunis depuis le dimanche 8 juin, convergeaient vers un écran posé en face d’eux. Lorsque la Page Nationale Récapitulative de Données (PNRD) s’affiche finalement, une salve d’applaudissements retentit dans la salle. Signe que Djibouti vient de franchir la porte du club restreint des nations qui ont opté pour la transparence économique. La ligne est, en effet, accessible au public mondial. Le Gouverneur de la Banque Centrale de Djibouti, Ahmed Osman Ali, a assisté à la cérémonie de lancement de la page djiboutienne de ce système dont sa mise en place est le fruit d’une collaboration entre les autorités djiboutiennes, le FMI et la Banque Africaine de Développement (BAD). Il est à noter que cette dernière, a permis à l’équipe conjointe d’accéder à la Plateforme Open Data de Djibouti, qui héberge la PNRD.

Un travail de fourmi

Pendant cinq jours, ateliers techniques, tests de formats normalisés (SDMX), vérifications croisées, et harmonisation des métadonnées ont rythmé les journées au cours du processus. Un travail de fourmi, à cheval entre rigueur scientifique et maîtrise des outils numériques, pour compiler, fiabiliser et structurer les données de notre pays. La mise en place de ce programme à Djibouti est intervenue dans le cadre d’un séjour sous nos cieux, d’une mission conjointe du FMI et de la BAD. Accueillie par les plus hautes autorités du secteur de la gestion des finances djiboutiennes  à savoir le ministre du Budget, Isman Ibrahim Robleh, le ministre l’économie et des Finances, chargé de l’industrie, Ilyas Moussa Dawaleh et le Gouverneur de la Banque Centrale, Ahmed Osman Ali. — la mission a travaillé main dans la main avec une équipe djiboutienne aguerrie. En première ligne, le directeur des statistiques à la Banque Centrale, Abdirahman Robleh Bouraleh, qui entouré de statisticiens de l’Institut national et de cadres du ministère du Budget, coordonnera dorénavant les activités de mise à jour régulière du PNRD de Djibouti.

Le site, sobre, intuitif et trilingue, affiche des séries temporelles sur l’ensemble des secteurs vitaux de l’économie djiboutienne. À titre d’exemple : l’indice des prix à la consommation, régulièrement scruté en cette période d’inflation mondiale ; les finances publiques, pour suivre les engagements budgétaires de l’État ; ou encore les comptes extérieurs, qui reflètent l’insertion régionale de Djibouti dans la Corne de l’Afrique. Mais au-delà des chiffres, c’est un nouveau pacte de confiance que le pays scelle avec ses partenaires. À court terme, l’adhésion au SGDD-a pourrait faire grimper d’un cran la note souveraine de Djibouti, facilitant ainsi l’accès aux marchés financiers internationaux à des taux plus compétitifs.

Mais les effets les plus durables sont ailleurs. Ils résident dans la capacité du pays à piloter lui-même sa trajectoire économique à partir d’indicateurs clairs, actualisés, cohérents — et donc fiables pour les décideurs.

L’économie djiboutienne, portée par ses infrastructures portuaires stratégiques, un positionnement géopolitique de plus en plus convoité, et une jeunesse en quête d’opportunités, entre en effet dans une nouvelle phase. Celle d’attirer des investisseurs, de séduire les banques de développement, et de rassurer les bailleurs.

En adoptant le SGDD-a, Djibouti emboîte le pas à quelques 76 autres pays dans le monde, dont 34 États africains, qui ont compris que le développement économique commence par la transparence des données statistiques. Le continent africain, souvent pointé du doigt pour son déficit de données, renverse peu à peu la tendance. L’Union africaine elle-même en a fait une priorité dans son Agenda 2063.

Rappelons que le SGDD-a a été créé par le Conseil d’administration du FMI en mai 2015, en remplacement du SGDD de 1997, pour renforcer la transparence des données macroéconomiques, encourager le développement statistique, et permettre des synergies entre la diffusion des données et la surveillance. Bien que volontaire, l’adhésion à cette norme implique un engagement du pays à s’y conformer et à publier des informations (métadonnées) sur ses pratiques de diffusion des données.

Dans les mois à venir, la PNRD pourrait devenir une ressource incontournable pour les chercheurs, les journalistes économiques, les ONG ou les institutions financières cherchant à mieux comprendre la trajectoire du pays.

RACHID BAYLEH