
Au fil des années, le centre de formation de l’Église protestante évangélique de Djibouti est devenu un véritable lieu de rencontre, de dialogue et de solidarité pour des milliers de personnes venues de tous horizons. Fidèle à sa mission, l’EPED s’investit aujourd’hui dans l’éducation, la formation professionnelle et l’accompagnement social des jeunes en situation de vulnérabilité. Dans un entretien qu’il nous a accordé, l’administrateur de cette institution, M. Pierre Tshimanga Mukendi, revient sur l’histoire et les objectifs qui ont façonné le centre depuis sa création. ENTRETIEN.

La Nation : M. l’administrateur de l’EPEP, pourriez-vous vous présenter et nous parler en quelques mots du Centre de Formation de l’Église Protestante Évangélique de Djibouti ?
M. Pierre Tshimanga Mukendi : Je suis d’origine congolaise et je vis à Djibouti depuis plus de vingt ans. Depuis 2005, j’exerce en tant qu’administrateur et coordinateur des projets éducatifs au sein du Centre de Formation de l’Église Protestante Évangélique de Djibouti (EPED). L’Église Protestante Évangélique de Djibouti est une association étrangère, reconnue officiellement par l’arrêté n°84/1027 PR/SAGR suite à sa création et homologation le 10 juillet 1984. Depuis les années 1980, l’EPED s’est imposée comme un espace de dialogue interculturel et d’entraide sociale, rassemblant des personnes de divers horizons ethniques, sociaux et professionnels dans un esprit d’ouverture et de solidarité.
L’EPED se compose de deux entités :
1. La paroisse, qui se réunit pour le culte et les activités spirituelles ;
2. Le Centre de Formation et de Service Social, dédié à l’enseignement, à la formation professionnelle des jeunes, et aux actions sociales en faveur des personnes vulnérables.
Notre centre est un lieu d’apprentissage, de formation, et d’inclusion socioculturelle et économique. Convaincus que le développement passe par l’autonomisation de la jeunesse, nous accueillons, depuis plus de 35 ans, des jeunes en situation d’échec scolaire pour leur offrir une seconde chance. Et Depuis 2014, nous avons également élargi notre action en accueillant des personnes en situation de handicap, en partenariat avec l’Agence Nationale des Personnes Handicapées (ANPH), afin de leur proposer des formations professionnalisantes dans des domaines porteurs d’emploi.
Depuis la création du centre, combien de personnes ont été formées ?
Le nombre de jeunes formés varie en fonction des projets et partenariats avec les bailleurs de fonds. Ces cinq dernières années, nous formons en moyenne 50 jeunes par an. En considérant qu’au moins 25 jeunes obtiennent chaque année un certificat ou un diplôme de fin de formation, nous estimons avoir formé environ 1 200 jeunes filles et garçons à ce jour.
Quels sont les profils des bénéficiaires et les critères d’âge ?
Nos bénéficiaires sont principalement des jeunes déscolarisés, des jeunes issus de milieux socio-économiques précaires, des enfants de la rue ; des femmes affectées par un handicap et des personnes vulnérables vivant avec un handicap (PVH). L’âge requis pour la majorité de nos formations est de 15 à 30 ans, mais pour certaines filières comme la coupe et couture, nous accueillons également des femmes âgées de plus de 35 ans.
Comment vos programmes sont-ils adaptés aux jeunes déscolarisés et aux personnes à besoins spécifiques ?
Nos programmes sont conçus en fonction des opportunités du marché de l’emploi. Avant de lancer une nouvelle formation, nous analysons la faisabilité de l’insertion professionnelle post-formation. Nous consultons également des entreprises pour identifier leurs besoins en main-d’œuvre.
Chaque formation est suivie d’un stage obligatoire de 45 jours en entreprise, ce qui permet d’évaluer les compétences des stagiaires et de faciliter leur intégration professionnelle, en particulier pour les personnes vivant avec un handicap.
Disposez-vous de méthodes ou d’outils pédagogiques inclusifs ?
Oui. Notre centre est équipé : D’une centrale photovoltaïque pédagogique ; De deux salles informatiques (capacité de 20 personnes chacune) ; D’un atelier d’audiovisuel et d’infographie ; D’une salle de couture équipée de machines manuelles et électriques, pouvant accueillir jusqu’à 15 apprenants par session.
Qui sont vos formateurs ? Sont-ils qualifiés pour travailler avec des personnes à besoins spéciaux ?
Nous collaborons étroitement avec le MENFOP (Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle). Certains formateurs sont issus du MENFOP, d’autres sont des volontaires envoyés par notre réseau mondial d’églises partenaires. Ces derniers accompagnent et forment nos équipes locales sur une période de trois ans, assurant un transfert de compétences.
Bénéficiez-vous de partenariats publics ou internationaux ?
Oui. Le Centre de Formation est homologué par le MENFOP depuis 1985. Nous collaborons actuellement avec :
l’ANPH (Agence Nationale des Personnes Handicapées), le MASS (Ministère des Affaires Sociales), et prochainement avec l’ANEFIP (Agence nationale pour l’emploi).
À l’international, nous avons des partenariats solides avec : Le Service Protestant de Mission de France, la Communauté des Églises Francophones, La Conférence des Églises de toute l’Afrique (CETA), l’Union Européenne, les Nations Unies, et de nombreuses autres ONG locales et internationales.
Quel est l’impact du centre sur l’insertion socioprofessionnelle ?
Malgré la taille modeste de notre institution, l’impact social du Centre est significatif. Nous nous engageons activement dans un travail de plaidoyer auprès des entreprises, afin de favoriser l’intégration professionnelle de nos diplômés, notamment à l’issue de leurs stages.
Cette année, grâce à l’Agence Nationale des Personnes Handicapées (ANPH), nous avons observé des avancées concrètes dans l’insertion des personnes vivant avec un handicap, formées au sein de notre centre. Nous tenons à saluer l’engagement personnel du Directeur Général de l’ANPH, M. Doualeh Said Mahamoud, pour ses efforts constants en faveur de cette cause.
Nous souhaitons également exprimer notre reconnaissance au Président de la République de Djibouti, Son Excellence Monsieur Ismaël Omar Guelleh, pour sa politique et sa vision sur l’insertion des jeunes handicapés dans le milieu du travail.Notre centre bénéficie d’un soutien inconditionnel de l’État, qui nous permet de mettre en œuvre nos projets éducatifs et sociaux dans des conditions favorables. À ce titre, nous remercions vivement Son Excellence M. le Président de la République pour son appui personnel à notre institution, aujourd’hui reconnue comme l’un des partenaires actifs de la mise en œuvre des projets éducatifs et d’insertion professionnelle à l’échelle nationale.
Quels sont les projets futurs du centre ?
À partir d’octobre 2025, nous prévoyons de lancer de nouvelles formations en pâtisserie à destination des personnes vivant avec un handicap, ainsi que des formations en maçonnerie de finition (pose de carrelage, traitement des surfaces contre le salpêtre, peinture, etc.).
Propos recueillis par Souber