Ce jeudi 20 mars, plus de 300 millions d’habitants de la planète ayant le français en partage célèbrent la Journée internationale de la Francophonie. Pour les Djiboutiens, qui en font partie, cela offre l’occasion d’une réflexion sur la place de Djibouti au sein de cette vaste communauté linguistique et culturelle. Plus qu’une simple adhésion symbolique, la présence de Djibouti dans la Francophonie s’inscrit dans une trajectoire historique et géopolitique singulière, qui mérite d’être analysée avec lucidité.

Ancien territoire colonisé par la France, Djibouti a conservé le français comme l’une de ses langues officielles, aux côtés de l’arabe, après son accession à l’Indépendance en 1977.

Ce bilinguisme institutionnel, marque de l’identité nationale djiboutienne, témoigne d’un héritage complexe où la langue de Molière continue d’être un vecteur essentiel de l’administration et des affaires. Mais la Francophonie ne saurait se réduire à un simple legs colonial : elle représente un espace de coopération économique et d’influence diplomatique dont Djibouti a su tirer parti jusque-là.

Situé au croisement de l’Afrique, du Moyen-Orient et de l’Asie, Djibouti occupe une position névralgique dans la géopolitique régionale. Sa participation active au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) lui permet d’élargir son champ diplomatique bien au-delà de son environnement immédiat. En tant que porte d’entrée de la Corne et d’une partie de l’Est de l’Afrique, notre pays joue un rôle clé dans les processus de médiation régionale et de développement. La Francophonie lui offre ainsi un cadre où il peut faire entendre sa voix sur les grandes questions internationales.

Cependant, force est de constater que la place de Djibouti dans l’espace francophone reste encore à consolider. Si la langue française demeure un outil incontournable de formation et de communication, elle est progressivement mise sur la défensive par l’essor de l’anglais, notamment dans les échanges économiques et technologiques. La vitalité de la Francophonie djiboutienne passe donc par une redynamisation de son enseignement et une adaptation aux réalités d’aujourd’hui. A moins de renforcer sa présence dans l’éducation et dans la production culturelle locale, la langue française est vouée à se cantonner aux cercles élitistes.

La Francophonie doit également être perçue comme un levier économique et technologique. Djibouti, en tant que hub logistique international, peut exploiter les opportunités offertes par cette vaste communauté de locuteurs répartis sur cinq continents. Au-delà du seul usage administratif, les secteurs du numérique, de l’entrepreneuriat et de l’innovation doivent être investis pour faire du français un atout compétitif.

En cette Journée internationale de la Francophonie, Djibouti doit affirmer avec force son engagement dans cet espace pluriel et dynamique. Regardons la francophonie, non pas comme un vestige du passé, mais comme une chance : celle d’un dialogue interculturel fécond et d’une ouverture sur le monde.