
Lors de la Conférence Mondiale des Ports IAPH 2023, auquel a pris part le Directeur Général de Djibouti Port Community Systems (DPCS), M. Warsama Mouhoumed Bouh, la Banque Mondiale et l’IAPH ont lancé un rapport offrant un guide étape par étape pour la mise en œuvre des Systèmes Communautaires Portuaires (PCS), intitulé ‘’ Port Community Systems – Lessons from Global Experience’’.

Le fruit de deux ans de collaboration étroite impliquant 88 experts internationaux, dont la direction du DPCS, l’édition spéciale du rapport approfondit les caractéristiques techniques et les bénéfices opérationnels des PCS.
Il met en lumière, à travers dix études de cas sélectionnées, les « success stories » de pays où l’implémentation des PCS a été particulièrement fructueuse, soulignant le cas emblématique du Système Communautaire Portuaire de Djibouti comme une référence en la matière.

Pays choisis pour figurer dans la publication PCS
Les chapitres thématiques de l’étude plongent dans le concept, l’évolution et l’impact des PCS dans le commerce mondial contemporain. Ils proposent des stratégies et des meilleures pratiques pour l’implémentation d’un PCS, tout en abordant les aspects financiers, de gouvernance et légaux de leur déploiement. La gestion du changement et l’aspect humain de la mise en place des PCS sont également examinés, ces éléments étant cruciaux pour le succès de leur déploiement en pratique.
Le rapport s’inscrit dans la continuité des efforts de la Banque Mondiale et de l’IAPH dans le but de combler les écarts numériques dans les secteurs du maritime, de la logistique et du commerce mondial. Il propose des perspectives aux décideurs politiques, aux autorités portuaires et aux fournisseurs de logistique sur la manière d’améliorer l’adoption des PCS et de tirer parti de leurs avantages.

L’étude identifie les lacunes en matière d’adoption, en examinant la mise en œuvre des PCS dans plus de 897 ports basés sur les ports en tête de l’Index de Connectivité Linéaire des Navires de l’UNCTAD listés pour le quatrième trimestre de 2022, couvrant 201 pays et territoires. La répartition actuelle des PCS est mise en perspective, révélant qu’à peine 10 % des ports dans les pays à faible et moyen revenus ont mis en place ces plateformes, contre 80 % dans les nations à revenu élevé. Le rapport clarifie également les chevauchements entre un PCS, un Guichet Unique Maritime et des systèmes de Guichet Unique du commerce. Sur la figure ci-après, extraite de la publication, le rapport illustre que le PCS assure une couverture intégrale des domaines d’application de tous les systèmes associés à l’importation et à l’exportation, offrant ainsi un véritable guichet unique pour les parties prenantes.
Patrick Verhoeven, directeur général de l’IAPH, conclut : « En intégrant un PCS dans l’infrastructure portuaire numérique existante, les acteurs portuaires peuvent obtenir de nombreux avantages, allant de l’efficience accrue à la contribution aux programmes de facilitation du commerce national. L’objectif de cette publication est de partager les leçons tirées de l’expérience mondiale pour atteindre ces bénéfices avérés, que l’on soit un petit État insulaire en développement ou un pays industrialisé. »
L’étude de cas sur le DPCS a été menée à Djibouti par des experts de la Banque mondiale qui ont visité la communauté portuaire et recueilli leurs témoignages et expériences relatifs au système.
Extrait de l’Étude de Cas sur le Système Communautaire Portuaire de Djibouti (DPCS)
L’importance de la modernisation des infrastructures portuaires
Djibouti, petit pays de la Corne de l’Afrique, a connu ces dernières années une transformation majeure de ses infrastructures portuaires. Cette modernisation a été largement médiatisée, avec un investissement massif de 1,5 milliard de dollars dans ses ports et zones franches. Ces améliorations ont considérablement renforcé le fonctionnement des ports de Djibouti, ce qui en fait un hub logistique crucial pour la région.
Au-delà de l’aspect infrastructurel, une dimension tout aussi essentielle de cette transformation a été la numérisation des opérations portuaires et logistique pour faciliter le commerce en accélérant les processus d’importation et d’exportation. Cette initiative visait à rendre les échanges commerciaux plus fluides et plus rapides, en réduisant la paperasserie et les délais.
La mise en place du Système Communautaire Portuaire de Djibouti (DPCS) en 2017 faisait partie intégrante de cette initiative. Le démarrage du projet a été initié sur les instructions du Président de la République de Djibouti, qui a préconisé la création d’un système électronique unifié de type « guichet unique » pour gérer la documentation de l’ensemble des processus d’importation et d’exportation. Aujourd’hui, la plateforme DPCS est pleinement opérationnelle et son succès est le fruit de l’engagement continu de l’Autorité des ports et zones franches de Djibouti, ainsi que de la collaboration active de tous les participants de la communauté portuaire des secteurs publics et privés.
Pourquoi cette étude de cas est-elle significative ?
Un élément clé de cette étude de cas réside dans sa portée étendue, couvrant les fonctionnalités du Système de Guichet unique maritime (MSW). La solution englobe le Port de Doraleh Multipurpose (DMP), la Société de Gestion du Terminal à Conteneur de Doraleh (SGTD), anciennement le Terminal à Conteneur de Doraleh (DCT), le Port de Tadjourah et le terminal Horizon. Bien qu’elle ne soit pas connectée aux aéroports ou aux ports frontaliers terrestres, elle inclut néanmoins des fonctionnalités de MSW (Guichet Unique Maritime).
De plus, le DPCS a été étendu pour inclure à la fois les opérations d’importation et d’exportation, tant pour les fonctions MSW que PCS. Cette démarche a permis d’intégrer la facturation des frais de port pour les opérations d’exportation.
Un aspect remarquable de la structure de gouvernance du système à Djibouti réside dans sa flexibilité. Contrairement à certains projets qui établissent des réglementations strictes, le DPCS collabore directement avec les parties prenantes pour digitaliser leurs services. Ce processus implique une intégration avec les systèmes existants des parties prenantes ou la mise en œuvre de nouveaux modules, avec l’approbation et la collaboration des parties prenantes. Ainsi, les parties prenantes peuvent demander de nouveaux services selon leurs besoins.
Préparation et développement du Projet
L’initiative qui a conduit à la création du DPCS en 2017 était une décision prise par le Président de la République de Djibouti. L’Autorité des Ports et des zones Franches a été chargée du projet et plusieurs fournisseurs de solutions PCS ont été identifiés et sélectionnés par le biais d’un processus rigoureux. La société Crimson Logic du Singapore a été choisie pour son étendue fonctionnelle, son prix compétitif et la possibilité d’acquérir la pleine propriété de la plateforme. Une nouvelle société, DPCS SAS, a été créée pour travailler en collaboration avec le fournisseur de solutions PCS sur la mise en œuvre du système. Le transfert de connaissances était une composante clé du projet, permettant à l’opérateur du système DPCS de prendre en charge l’exploitation, la maintenance et le développement continu de la solution.
Le développement du DPCS était prévu en trois étapes consécutives, comprenant la mise en place des modules de Guichet Unique Maritime (MSW), des modules du Système Communautaire Portuaire (PCS) et l’intégration des agences Gouvernementales impliquées dans les processus de l’importation et d’exportation (OGA) et enfin la mise en place du module « business intelligence ». Actuellement, le système est opérationnel et son intégration avec Sydonia, le système de gestion des douanes, pour la partie manifeste, a été réalisée avec succès.
Gouvernance et modèle économique
Le DPCS est une société détenue par Great Horn Investment Holding (GHIH), une holding d’investissement public. GHIH est elle-même détenue à 60 % par l’Autorité des Ports et Zones Franches de Djibouti (APZFD) et à 40 % par le Fonds Souverain de Djibouti (FSD). Ce modèle de gouvernance garantit un équilibre entre les intérêts publics et privés dans la gestion du DPCS.
Le modèle économique du DPCS SAS repose sur la collecte de frais de service auprès des utilisateurs du système, ce qui assure sa viabilité financière. Ces frais sont basés sur le volume de cargaison traitée, ce qui permet de maintenir un coût abordable pour les entreprises tout en générant des revenus pour le système. Cette approche économique s’est avérée efficace pour financer le fonctionnement continu du DPCS tout en offrant des avantages tangibles à la communauté portuaire.
Réussites et avantages du DPCS
Le déploiement du DPCS a apporté d’innombrables avantages à Djibouti, tant du point de vue économique que logistique. L’efficacité opérationnelle des ports s’est considérablement améliorée, réduisant les délais de traitement des cargaisons et les coûts logistiques. Le système a également renforcé la transparence et la traçabilité des opérations, réduisant ainsi les risques de fraude et d’erreur humaine. Un exemple particulièrement probant de l’impact du DPCS est la manière dont les performances se sont améliorées pour la Direction de la Capitainerie. Après la mise en œuvre du DPCS, les opérations sont désormais mieux intégrées, ce qui a considérablement amélioré les performances globales. Le système de facturation portuaire est également connecté aux clients, simplifiant ainsi le processus de facturation. La communauté portuaire a également réussi à numériser leurs opérations, ce qui s’est traduit par des temps de réponse plus rapides et une meilleure efficacité.
Défis et perspectives futures
En ce qui concerne les perspectives, le DPCS cherche à élargir sa portée en intégrant de nouveaux acteurs et en développant de nouvelles fonctionnalités. La collaboration avec d’autres pays de la région pour harmoniser les systèmes de communauté portuaire et faciliter les échanges transfrontaliers est également un objectif à long terme.
Points clés de l’étude
Le système mis en place à Djibouti comprend les fonctionnalités d’un Système Communautaire Portuaire et ceux d’un Système de Guichet Unique Maritime. L’adoption a été élevée et le système est utilisé par la plupart des ports et zones franches du pays. Tous les ports opérationnels (DMP/PDSA, SGTD et Port de Tadjourah) et la plupart des zones franches (DFZ, EAH, UKAB) sont intégrés.
La structure et l’organisation du projet ainsi que l’opérateur de la plateforme (DPCS SAS) sont conçues pour réduire ou, au minimum, minimiser les formalités administratives superflues. Cette flexibilité est obtenue en évitant de fixer un périmètre trop rigide pour la solution et en encourageant plutôt les intervenants à partager leur retour d’expérience et leurs exigences, ainsi qu’à solliciter l’ajout de nouvelles fonctionnalités selon leurs besoins spécifiques.
L’impact du DPCS a été positif et des indicateur clés de performance sont en place pour surveiller cela. Les exemples particulièrement intéressants ont été les améliorations observées en ce qui concerne les fonctions et opérations portuaires. Cependant, les douanes n’ont pas complètement soutenu l’initiative de numérisation et des efforts doivent encore être faits dans ce domaine.
Lien de la publication de la banque mondiale et IAPH en entier : https ://bit.ly/WBIAPHpcs