
Responsabilité, transparence, performance : des mots à la mode ou le nouveau mantra des entreprises publiques ? Découvrez comment ces principes clés transforment le paysage économique. Longtemps restées à l’abri des regards, les entreprises publiques se dévoilent enfin. Une révolution en marche, portée par un impératif de modernisation et une exigence croissante de redevabilité. Au programme: des comptes clairs, une gestion rigoureuse, et une performance accrue au service du développement. Mais ces changements suffiront-ils à restaurer la confiance et à garantir une utilisation optimale des ressources publiques ?

C’est sous le signe de la modernité et de la transparence que s’est achevé, jeudi dernier au Palais du Peuple, un atelier de trois jours dédiés à la bonne gouvernance des entreprises et établissements publics. Piloté par le Secrétariat Exécutif chargé du Portefeuille de l’État (SEPE) en collaboration avec l’Agence Française de Développement (AFD), cet événement marque une étape cruciale dans la transformation institutionnelle et économique de Djibouti.
Dès son lancement, mardi dernier, l’atelier a affiché une ambition claire : refondre les pratiques de gestion des entités publiques pour répondre aux exigences d’un monde globalisé.
Cette initiative s’inscrit dans une dynamique plus large de réformes visant à désengager progressivement l’État des activités productives tout en renforçant l’efficacité opérationnelle des structures stratégiques. L’enjeu est colossal: transformer ces institutions souvent perçues comme rigides en moteurs de croissance économique et de progrès social.
Les deux premières journées ont été rythmées par des échanges nourris entre responsables d’entreprises publiques, experts en gouvernance et partenaires au développement.
Les participants ont exploré des thématiques aussi variées que la transparence, l’optimisation des ressources, la mise en place de mécanismes de contrôle robustes ou encore l’intégration de normes internationales. Ces discussions ont permis de clarifier les nouveaux standards de gouvernance et de définir des attentes précises en matière de reddition de comptes.
Le troisième jour, celui de la clôture, a marqué une montée en puissance avec des propositions concrètes pour améliorer la gestion des entreprises publiques. Parmi elles, l’adoption de mécanismes de contrôle solides, la formation des dirigeants et employés, ainsi que l’intégration de critères environnementaux et sociaux dans les processus décisionnels. Le rôle central du SEPE a été unanimement salué, tant dans sa mission de coordination que dans son accompagnement stratégique pour guider cette transition.
Au-delà des discours, cet atelier symbolise une volonté politique affirmée de faire de la bonne gouvernance un pilier du développement durable du pays. Il témoigne également d’une prise de conscience collective: face à un contexte mondial incertain, la modernisation des pratiques de gouvernance n’est plus une option mais un impératif.
Mais cela s’inscrit dans une perspective plus grande mes chers lecteurs, notre pays affiche une nouvelle détermination. Après avoir accompli son rôle de hub logistique, il s’attaque à un chantier essentiel pour son avenir: la modernisation de la gouvernance de ses entreprises publiques.
Et c’est avec l’adoption d’un Code de Bonne Gouvernance qu’il entend donner un nouvel élan à son développement durable. Un simple code ? Détrompez-vous, c’est bien plus que cela. C‘une ambition qui mérite d’être saluée, car derrière les termes techniques, derrière les articles réglementaires qui pourraient rebuter les esprits les moins avertis, se cache une ambition qui mérite d’être saluée.
Il ne s’agit plus seulement de cocher des cases, de se conformer aux injonctions des institutions internationales. Car derrière les termes techniques, derrière les articles réglementaires qui pourraient rebuter les esprits les moins avertis, se cache une ambition qui mérite d’être saluée.
Forger un modèle djiboutien adapté aux spécificités et aux rêves de ce pays
Il ne s’agit plus seulement de cocher des cases, de se conformer aux injonctions des institutions internationales. Non, il s’agit de forger un modèle djiboutien, un modèle sur mesure, adapté aux spécificités, aux défis, et surtout aux rêves de ce pays. Un modèle qui transcende la simple fonctionnalité pour embrasser une vision d’élévation.
L’État, pivot de ce nouveau dispositif, se voit confier un rôle d’équilibriste, jonglant avec trois casquettes : stratège, actionnaire, et contrôleur. Il définit les grandes orientations, veille à la performance des entreprises, tout en garantissant une marge de manœuvre suffisante pour l’innovation et la prise d’initiative.
Un équilibre délicat, une ligne de crête entre l’impératif de guider et celui de ne pas étouffer les forces vives.
La tentation de l’omniprésence est grande, mais il faut résister à cette sirène, car la véritable force de ce code réside dans sa capacité à libérer le potentiel de nos entreprises publiques, à créer un environnement propice à l’innovation et à la performance, tout en limitant les risques de dérives.
C’est pourquoi la mise en place d’un contrat d’objectifs et de performance entre l’État et chaque EP constitue un autre élément clé de cette réforme. Ce mécanisme, inspiré des meilleures pratiques internationales, vise à fixer des objectifs clairs et mesurables, permettant ainsi d’évaluer la performance de nos EP et de responsabiliser leurs dirigeants.
Transparence et reddition de comptes sont les piliers d’une nouvelle ère. Et que dire de la transparence ? De la reddition de comptes ? Ces mots, souvent galvaudés, prennent ici une dimension singulière.
Lors d’un atelier organisé le 9 octobre 2024 au Kempeski à Djibouti, à l’occasion du lancement du programme stratégique de performance de l’ONEAD et du projet d’assistant exploitant, le ministre des Finances, M. Ilyas Moussa Dawaleh, a exprimé ses observations sur la gestion des entreprises publiques dans le pays.
Il a souligné que, quel que soit le secteur, toutes les institutions publiques à Djibouti ont vu leur envergure évoluer, mais qu’elles demeurent ancrées dans un modèle de gestion dépassé, où la performance n’est pas une priorité. Il a ajouté que les objectifs ne sont pas toujours clairement définis et que les résultats ne sont pas évalués à leur juste valeur.
Il a ensuite salué l’initiative de la direction générale de l’ONEAD, qu’il a félicitée pour avoir accepté de s’engager dans la réforme des entreprises publiques. Selon lui, l’ONEAD se distingue comme une pionnière en instaurant une culture de reddition des comptes.
Il a insisté sur l’importance de rendre compte de ses actions, particulièrement dans le cadre d’entreprises et d’établissements publics, dont les ressources ne relèvent pas du privé. Il a comparé cette exigence à celle des entreprises privées, où des comptes sont rendus aux actionnaires et aux employés, et a affirmé que cette responsabilité est encore plus cruciale dans le secteur public. Enfin, il a mis en avant la nécessité de transparence, tant dans la gestion et la performance que dans les réalisations et les projections futures.
Créer une culture de la responsabilité
Si nous revenons à ce dit code de gouvernance et que l’on comprend bien les dires du ministre Ilyas Moussa Dawaleh, Il ne s’agit ici plus seulement de publier des rapports, de cocher des cases sur une checklist. Il s’agit de créer une culture de la responsabilité, où chaque acteur, à chaque niveau, se sent comptable de ses actes.
Un changement de paradigme, une révolution mentale qui ne se décrète pas, mais qui se cultive, jour après jour, avec constance et détermination. C’est là, je crois, une des clés du succès.
Ce Code de Bonne Gouvernance ne se contente pas d’importer des modèles étrangers. Il est le fruit d’une réflexion profonde sur les spécificités de notre contexte djiboutien, prenant en compte les enjeux économiques, sociaux et culturels de notre pays.
La création d’un Conseil de Coordination de la Gouvernance des Entreprises et Établissements Publics (CCGEP) témoigne de cette volonté d’adapter les principes de bonne gouvernance à nos réalités locales.
Je dois dire qu’il y’a des défis à surmonter et la route est longue mais bien sûr, la boussole est bien orientée. Des résistances au changement, des habitudes tenaces, des inerties bureaucratiques… Mais nous avons un atout majeur: une volonté politique affirmée, une détermination sans faille à aller de l’avant.
Et c’est cette volonté, cette détermination, qui nous donnent l’espoir que ce Code de Bonne Gouvernance ne restera pas un simple catalogue de bonnes intentions, mais qu’il deviendra le socle d’une gouvernance plus juste, plus efficace, et surtout plus au service du peuple djiboutien.
Alors, chers lecteurs, gardons l’œil ouvert, restons attentifs à l’évolution de cette entreprise audacieuse. Car l’avenir de notre pays, son développement durable, son rayonnement dans cette partie du monde, se jouent en partie ici, dans la mise en œuvre effective de ce Code de Bonne Gouvernance.
Un code qui, au-delà des mots, doit se traduire en actes concrets…
Said Mohamed Halato