Des erreurs se sont glissées lors de notre entretien avec le Directeur Général de l’ONEAD M.Mohamed Fouad Abdo publié jeudi dernier. Nous republions cette interview en priant nos lecteurs de nous excuser pour cette malencontreuse omission indépendante de notre volonté. 

A.A.-MAHE

La population de Djibouti-ville se plaint beaucoup de leur alimentation en eau. Quelle est la cause de ces fréquentes coupures et qu’est-ce que vous avez prévu pour rétablir la situation ?

Dieu merci, les coupures ne sont pas aussi fréquentes, comme vous le dites, à Djibouti. Nous avons d’innombrables travaux en cours dont les plus importants ont lieu aux réservoirs Farahad situés à la Cité Hodan où, nous construisons de grandes structures de stockage qui seront le point de chute de l’eau qui nous vient d’Ethiopie ; mais également, celle de l’usine de dessalement de Doraleh qui sera bientôt inauguré. Bâtis sur la côte 70, ces réservoirs assureront partout, la distribution de l’eau potable par gravité.

La principale cause n’est-elle pas tout simplement la vétusté du réseau de distribution et des châteaux d’eau mis hors d’usage ?                                                                                                                   

Pas du tout M. Mahé ! Les réseaux de distribution de la Commune de Djibouti et celle de Balbala ont fait l’objet d’une rénovation très récente. Toutes les conduites en amiante ciment ont été remplacées par des PEHD avec un diamètre beaucoup plus importants que les vieux. Et, vous l’avez vous-même constaté lors de votre reportage, les travaux de remplacement des vieilles infrastructures sont encore en cours au niveau de la station de pompage. En ce qui concerne les châteaux d’eau, tous sont opérationnelles sauf celui du Quartier 6 et celui de la Voirie. Ces deux châteaux d’eau ont été mis hors service suite à une inspection technique. Nous n’avons donc pas voulu prendre de risque pour des raisons évidentes de sécurité.

Pourquoi vous ne les détruisez pas alors ?

Parce que, ce n’est pas pour l’instant une priorité. Notre principale préoccupation est de prospecter de nouvelles sources d’approvisionnement pour faire face à la croissance démographique et combler les besoins en eau de la population citadine. Par ailleurs, nous avons déjà rasé un château d’eau et connaissons par expérience que les travaux de démolition d’une telle structure n’est pas aussi facile que l’on croit. Sans parler du coût financier. On vous les laisse donc admirer encore pour un temps.

Justement, cela fait maintenant quatre ans que l’on parle d’une connexion d’eau venant des forages de Hadagala. D’abord, qui en est le propriétaire ? Et ensuite, quand cette eau arrivera-telle dans le réseau de distribution de la ville de Djibouti ou bien, coulera-t-elle des robinets des consommateurs ?                                                                                            

Pour répondre à la première partie de cette question, c’est l’Etat Djiboutien qui a engagé tous les investissements et qui a réalisé les vingt-huit forages du projet, les équipements de pompages, les réservoirs et les conduites d’adduction d’eau etc…. De ce fait, c’est la République de Djibouti qui est propriétaire de toutes les infrastructures qui se trouvent en territoire Ethiopien. Ces forages sont réalisés sur une concession cédée à l’Etat djiboutien qui devra exploiter cette ressource d’eau gratuitement pour une durée déterminée. L’eau de ce projet transfrontalier, unique en Afrique, alimente donc déjà les régions d’Ali-Sabieh, de Dikhil, d’Arta et Balbala.

Sa distribution a déjà commencé  alors ?                                                   

Effectivement ! Pour Djibouti, de nouvelles infrastructures de gestion et de distribution sont en court de construction. Une fois terminée, ces nouvelles conduites seront raccordées aux différents réseaux de distribution  de la ville.

Nous avons vu que l’usine de dessalement est en pleine construction et qu’elle sera mise en service, selon le planning, au mois de février 2021. C’est-à-dire dans un peu plus de soixante jours. Qu’apportera-t-elle de plus à la population ? Et, sachant que son coût de production est extrêmement élevé et que seuls les pays producteurs de pétrole supportent aisément sa consommation d’énergie, combien cette eau dessalée coûtera-t-elle aux consommateurs?                                                                

Tout d’abord M. Mahé, cette usine de dessalement est une usine de dernière génération dotée de composants ultra modernes. Et, vu sa capacité, l’apport de cette nouvelle ressource sera loin d’être négligeable. Ses besoins énergétiques, quoique élevés, n’ont rien à voir avec ses ancêtres et restent exploitables. Les 22 500 m3 d’eau potable qu’elle va produire quotidiennement, seront en mesure d’assurer largement, non seulement la couverture de toutes ses charges d’exploitation ; mais également, son amortissement. Il n’y a donc pas de soucis à se faire.

Sans monter le prix du m3 ?                                                                                                                                

Bien sûr, sans monter le prix du m3. Le seul habilité à les modifier est l’Etat et celui-ci ne cherche en aucun cas à augmenter les charges des foyers Djiboutiens.

La démographie de la population est galopante et de nouvelles zones d’habitations apparaissent de plus en plus. Que prévoit l’Onead pour suivre ce mode d’urbanisation qui échappe à toute planification ?                                                                                                                                                       

Les différents services de l’ONEAD sont obligés de suivre le rythme de l’expansion de toute urbanisation populaire. Et, même si courir derrière reste toujours pénible, nous avons le devoir de le faire. Tout le monde doit avoir accès à l’eau et à l’assainissement.

Planifier les extensions urbaines à tout moment, c’est l’idéal et le département de l’urbanisme fait correctement son travail. Mais dans tous les pays en voie de développement, et même dans les pays émergeants, l’urbanisation sauvage et provisoire gagne toujours du terrain et prend le dessus. La course est donc permanente.  

Pour venir à l’assainissement, M. le Directeur Général, la capitale souffre d’un gros problème d’évacuation des eaux de pluie et autres. Les perpétuelles stagnations sont sources de maladies et vous le savez. Que comptez-vous faire pour doter la ville d’un système d’évacuation des eaux, quelles soient usées ou pluviales ? 

L’assainissement est un secteur très important pour l’hygiène, la santé et le bien-être de la population. Mon attachement est donc de la plus haute importance et l’Etat ne l’a jamais négligé. Souvenez-vous des grosses réalisations exécutées, dans le domaine de l’assainissement, sur les conduites de refoulement de l’Avenue 13, de Khor Bourhan, de Boulaos et de Nasser. Souvenez-vous des petits canaux d’évacuation des eaux de pluie construits sur les rues de presque tous les quartiers. Tous ces travaux ont coûté beaucoup d’argent à l’Etat qui n’a jamais cessé de déployer de gros moyens en matière d’assainissement.

Depuis 2008, nous avons construit beaucoup de station de collecte et de refoulement à travers la ville. Comme vous l’avez constaté, nous avons ensuite construit la première station de traitement digne de ce nom, moderne et de bonne capacité. Une deuxième est à l’étude et verra le jour très bientôt. L’effort consenti par l’Etat est donc énorme. Mais à mon avis, il faut que la population apporte de son côté sa contribution et fasse preuve de civisme pour que les évacuations se passent dans les meilleurs conditions possibles.

Il y a peut-être un manque de sensibilisation ?                                                                                             

Vous avez raison ! Nous allons nous y mettre et elle sera inlassable.

Est-ce que les services d’assainissement ont accès aux logements privés et peuvent-ils opérer des contrôles réguliers ?

Ca n’arrive pas souvent mais, nos agents peuvent intervenir à tout moment dans les propriétés privées, s’il y a des écoulements d’eaux usées et des débordements vers  la voie publique. Car, il existe des dispositifs de sécurité sanitaire qui nous l’autorise.

Pour finir, qu’est-ce que vous préconisez pour que ça marche mieux?                                                             

Dans certains pays développés, le service d’assainissement joue un rôle de police pour surveiller le bon fonctionnement des infrastructures et peut verbaliser les contrevenants de toute effraction. Quelle que soit sa nature. Il fut un temps où, les administrations des différents arrondissements et leurs chefs de quartiers, assistés par la police, assuraient cette surveillance dans notre pays et ça marchait très bien.

Il faut simplement relancer cette surveillance et leur permettre d’exercer pleinement leur pouvoir pour responsabiliser et réveiller la vigilance de nos concitoyens.