C’est un sérieux revers pour les adeptes de la diffamation et autres spécialistes de la propagande haineuse en ligne, tous désormais passibles de poursuites judiciaires conformément aux nouveaux dispositifs juridiques de la loi sur la liberté de la communication.

Formidable outil de communication, Internet peut, en effet, s’avérer être un instrument à double tranchant où expressions légitimes côtoient déclarations abusives.

Confronté ces dernières années à une forte augmentation de messages injurieux sur les réseaux sociaux, de menaces, de montages photo humiliants, de diffamation ou d’usurpation d’identité en ligne, le gouvernement s’est vu dans l’obligation d’apporter une réponse à ce phénomène croissant, sans bafouer les droits fondamentaux garantis par la constitution, notamment en matière de liberté d’expression.

Adoptée le 26 octobre 2020 par l’Assemblée nationale, la loi n°97/AN/20/8ème L sur la liberté de la communication et la déontologie de l’information modifiant et complétant la loi n°2/AN/92/2ème L est désormais entrée en vigueur en République de Djibouti après sa promulgation, la semaine dernière, par le chef de l’Etat, Son Excellence Ismail Omar Guelleh.

Il s’agit, pour tout dire, d’une loi qui, non seulement, renforce l’arsenal juridique mais qui, surtout, comble le vide existant en ce qui concerne la liberté de communication de notre pays.

En d’autres termes, le gouvernement veut, à travers le renforcement des dispositifs de cette loi, lutter contre le sentiment d’impunité en ligne.

Selon le ministre de la Communication chargé des Postes et des Télécommunications, M.Radwan Abdillahi Bahdon, il s’agit là d’une réforme habile soigneusement pensée et élaborée sous la houlette du président de la République, M. Ismail Omar Guelleh, l’objectif étant de mieux concilier liberté de communication avec respect des droits d’autrui et préservation de l’ordre public.

Zoom sur les articles des deux nouvelles lois

L’article 3 de cette nouvelle loi renforce et complète le dispositif de l’article 4 de celle n°2/AN/92/2ème et est modifié comme suit : « La liberté de communication s’exerce dans le respect de la déontologie de l’information. Elle ne doit en aucun cas porter atteinte à la dignité de la personne humaine ; à la paix sociale ; à la sûreté, l’unité, l’identité et la souveraineté nationale ; ni troubler l’ordre public. Elle ne doit comporter aucune information ou insertion contraires à la morale religieuse, ou susceptible de faire l’apologie du terrorisme, du fanatisme, du racisme, du tribalisme et de haute trahison. Celle-ci se doit également de protéger le secret de l’instruction judiciaire et les intérêts suprêmes de la nation ». Cette nouvelle loi consolide par ailleurs, dans son article 5, le rôle de la Commission Nationale de la Communication (CNC). Elle confie à la CNC une nouvelle mission qui est de « veiller au respect de la liberté de communication, de la déontologie et du pluralisme de l’information».

La Commission nationale de la Communication est donc saisie, pour avis, par toute personne ou entité ayant observé un manquement ou une violation des normes en vigueur.

Dans le chapitre de la déontologie de l’information, l’article 5 stipule que l’information est exercée librement dans le respect des lois et règlements en vigueur en République de Djibouti.

Cependant, il est clarifié dans l’article 6 que « l’information doit être exercée dans le respect de la vie privée des individus, la dignité humaine et des libertés individuelles. Elle doit respecter le caractère pluraliste des courants de pensée et d’opinion. Il ne peut être porté atteinte à l’honneur et/ou à la réputation des individus en vertu de la présente loi.»

L’une des plus grandes dispositions instituées par cette nouvelle loi demeure sans aucun doute la délivrance à tout journaliste d’une carte nationale de presse. L’article 16 concède en effet à la Commission Nationale de la Communication la compétence de délivrer une carte nationale de presse. Dans ce même article, il est souligné que les journalistes sollicitant cette carte devront signer au préalable une charte de bonne conduite.

Pour le ministre de la Communication chargé des Postes et des Télécommunications, M.RadwanAbdillahiBahdon, il incombe au gouvernement d’établir les dispositifs nécessaires pour assurer la diffusion d’informations justes et honnêtes et la protection de l’ordre public.

« Désormais, journalistes, éditeurs et blogueurs seront tenus de publier des informations non manipulées et véridiques, qui n’appellent en aucune façon la violence, la haine ou la délinquance», précise le ministre de la Communication.  « Un autre objectif  primordial visé à travers la mise en place de ces nouvelles lois est d’assurer la protection de la jeunesse et des mineurs contre des contenus promouvant la violence et de programmes ayant des effets nocifs sur eux. Il s’agit pour les pouvoirs publics de promouvoir des programmes adaptés pour faciliter le développement physique et intellectuel de la jeunesse », poursuit M. Radwan Abdillahi Bahdon.

Il était temps d’agir. Oui, il était temps, pour notre pays, de mettre en place enfin des instruments juridiques solides pour réguler, contrôler les contenus diffusés et dans les médias audiovisuels et sur internet. C’est désormais chose faite ! 

AAD