À l’occasion de la journée internationale de la femme, le centre de leadership et de l’entrepreneuriat a invité cinq femmes entrepreneurs pour bousculer les idées reçues sur l’entrepreneuriat féminin lors d’un « petit-déjeuner – Panel de Discussion » organisé hier matin. 

Oubah Ahmed Malow et son staff ont permis hier, au centre de leadership et de l’entrepreneuriat (CLE), aux femmes de se retrouver, de s’ouvrir les unes aux autres pour partager des leçons de vie et de courage et s’ouvrir le chemin du succès dans « l’entrepreneuriat féminin ! »

Ce sont les propos qui revenaient le plus souvent hier matin dans la bouche de la centaine de jeunes femmes qui ont pris part à la rencontre sur l’entrepreneuriat féminin. Il faut dire que le CLE a su trouver les bonnes personnes pour redonner l’envie d’avoir envie à des jeunes femmes peut être dans le doute, d’autres en plein désarroi à cause de ce halo d’idées reçues qui les découragent voire les désespèrent d’entreprendre.

…Tordre le cou aux clichés réducteurs. Badria Houssein, de Gueska Africa, Dr. Fozia Hassan, Pédiatre,  Fathia Abdillahi, conceptrice de gamme de produits cosmétiques Bio,  Me Fatouma Mahamoud, du Cabinet d’avocats Mahamoud, et Loula Ali Ismaël, notre cinéaste de renom, étaient les panélistes qui ont partagé quelques leçons de vie et de courage à travers leurs parcours. Des femmes de valeur et de mérite qui ont su se démarquer et réussir dans un milieu plutôt masculin et assez hostile.

« Les études longues étaient un obstacle, on me disait souvent “tu vas finir vieille fille” mais le désir et la volonté d’y arriver était plus forts. Un peu plus tard les jeunes filles en médecine se posent plus de questions, si elles doivent continuer ou non, c’est là que la valorisation des jeunes filles devient importante car le domaine est trusté par les hommes. Les femmes pionnières ont la responsabilité et le devoir de réussir, de persévérer et d’y croire », déclarait la pédiatre Fozia Hassan.

« Pour moi, c’était un retour aux sources, le retour chez soi et auprès des miens après une longue période d’absence passée à l’étranger. Je suis rentrée avec des idées pleines l’esprit mais mon cœur a penché pour le Qassil, (une onction de plantes malaxées aux huiles). Ce produit cosmétique plutôt traditionnel ne plaisait pas tellement et je n’ai pas été encouragée dans mon projet. Mais, j’ai trouvé la bonne formule pour le moderniser, j’ai dû faire preuve d’innovation pour le réinventer et en faire toute une gamme de produits cosmétiques BIO», raconte Fathia Abdillahi, conceptrice d’une ligne de produits cosmétiques bio.

Et ainsi de suite. Lula Ali Ismaïl, qui est sortie des sentiers battus, a raconté combien il lui aura fallu se dépasser pour trouver sa voie dans le Cinéma. « Le septième art franchement, qui connait ça à Djibouti où il n’y a même plus de salle de cinéma depuis des lustres ? Et puis, où aller trouver les fonds, les moyens matériels, les acteurs, etc ? Autant se lancer dans une aventure de fou. C’est pourtant ce grain de folie et cette volonté farouche et ferme qui lui ont ouvert les portes du paradis pour ainsi dire. La jeune cinéaste est entrée par les grandes portes du 7ème art avec seulement un court métrage, « Laan » et un long métrage «  Dhalinyaro » qui lui ont demandé respectivement 2 et 5 ans de travail acharné. Même parcours et même combat pour l’avocate Fatouma Mahamoud, qui doit se battre dans un milieu très masculin et hostile. «  Tigresse, femme hystérique parfumée à la dynamite, etc . Ce sont quelques uns des surnoms que me vaut ma détermination et mon acharnement dans les prétoires » dit-elle. Des clichés persistants mais qu’elle a su dépasser au cours du temps et qui n’ont aucune prise sur elle aujourd’hui. Elle regrette seulement qu’elle ne soit que quatre femmes parmi les 35 avocats du barreau de Djibouti. « Un corps de métier que les femmes doivent aussi investir ! » a-t-elle plaidé avec élégance et panache. Une femme au verbe haut  qui a conquis son public.  

La styliste et designer Badria Houssein, a bousculé elle aussi ces idées reçues et les clichés dégradants et décourageants autour de l’entreprenariat féminin. Elle a bouclé la boucle avec un récit plein d’enthousiasme qui a redonné aux jeunes femmes la niaque et l’envie de se lancer sans craintes dans l’entreprenariat.

… Assez de larmes, en avant les femmes !

Les interventions des panélistes ont été suivies de trois heures d’échanges et de discussions tellement passionnés et débordant de ferveur ! Les participantes ont partagé leurs expériences personnelles sur les obstacles de toutes sortes qui les ont fait douter puis se remettre à y croire. Ce fut aussi l’occasion de se ressourcer et de faire à profit des vécus des ainées.

Ces trois heures de belles envolées féministes et de plaidoyers pour la femme courage, la palme de la journée revient incontestablement à l’ancienne ministre de la femme, Mme Aicha Mohamed Robleh, qui a fait montre de tous ses talents de comédienne. Après un bref hommage à la représentante du PNUD, Fatima Elsheikh, elle a clamé «  Assez de larmes, Assez de larmes ! En avant les femmes ! », Ce poème-chant  tiré de sa pièce de théâtre «  Et si madame devenait ministre? » . « Personnes n’essuiera vos larmes, mesdames » a-t-elle poursuivi, fustigeant les attitudes de victimes chez certaines femmes ingénues voire craintives.

Puis, elle s’est lancée dans le récit d’une légende du terroir où une vieille jument qui a laissé derrière elle ses années de gloires se retrouve piégée au fond d’un puits avec les côtes brisées après une lourde chute. Son maître peu compatissant décide de l’y ensevelir, mais elle réussi à s’extirper de cette mauvaise trappe en jouant de ses pattes pour rebondir sur les coups de pelles qui déversent du sable et du gravier jusqu’à remonter à la surface à la grande surprise du maître félon qui se résout à  la prendre dans ses bras sournoisement. Une histoire à la morale très simple, ne cédez rien à vos détracteurs et servez-vous de leurs coups de pelles et de pioches pour rebondir à chaque fois, a-t-elle fini dans l’hilarité générale.

…Le temps de l’entrepreneuriat féminin. L’Afrique est la seule région au monde où plus de femmes que d’hommes choisissent la voie de l’entrepreneuriat, une réalité dont on ne parle pas assez. Et Djibouti ne fait pas exception à la règle. C’est dans ce contexte que le CLE a voulu mettre un coup de projecteur sur la réussite d’entrepreneures djiboutiennes à l’occasion de la journée internationale de la femme et s’est attaché à mettre en lumière les obstacles auxquels se heurtent les femmes qui souhaitent monter et faire grandir leur entreprise.

Le panel de discussions autour de l’entrepreneuriat au féminin visait à informer sur les obstacles rencontrés par les femmes entrepreneures et à débattre sur les idées reçues quant à la question de l’émancipation de la Femme Djiboutienne, sa place dans la société et son évolution dans le milieu professionnel. La célébration de la femme, la mise en avant de toutes celles qui militent au quotidien au sein de notre société est l’affaire de tous, c’est aussi une question de tous les jours car l’égalité des chances passe à travers une meilleure image de la femme. Soutenir et encourager les femmes fait nécessairement partie des priorités du CLE durant toute l’année, mais la date du 8 Mars est toujours une belle occasion pour se souvenir en quoi les femmes qui nous entourent font une différence dans notre société, selon les responsables du centre de leadership et de l’entrepreneuriat.

MAS